Ses premiers pas, sa renaissance - Partie 2

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 Les couleurs rouge, blanc et or étaient encore une nouvelle fois les couleurs dominantes de la pièce. L’endroit était constitué d’une magnifique table ornée des mêmes teintes au centre de la pièce avec de multiples chaises autour. En entrant, le domestique les annonça, les jeunes femmes s’inclinèrent avec respect tandis que leur hôte les saluait d’un signe de la tête.

— Installez-vous mesdemoiselles, je vous en prie.

 Elles prirent place à droite de la table tandis que ce dernier prenait la place en face de Rina. Il était vêtu d’un uniforme militaire des couleurs éclatantes de son pays, de riches ornements de médailles étaient placées sur son plastron. Ses traits fins et son regard dur montraient qui détenait l’autorité suprême ici.

— Je n’avais pas retenu le fait que c’était une demoiselle qui m’était envoyée.

— Ce détail vous est désagréable, votre Majesté ?

 La voix de Rina était douce et sans orages, pourtant, elle semblait légèrement blessée qu’on lui fasse cette remarque déplacée dès les premières secondes de sa présence. Elle n’avait même pas fait attention à la présence d’Angel qui n’était pas prévue et au fait qu’elle répondait à l'Empereur, ce qui pourrait mettre sa tâche en péril.

— Ne vous méprenez pas, je pensais seulement, qu’étant donné que c’était une femme qui régnait sur votre empire, elle nous enverrait un homme, heureusement qu’il y a son mari, le Roi Yvans, pour redresser la barre.

— Pardonnez-moi votre Majesté, pouvons-nous en venir au fait ? Sa Majesté l’Impératrice d’Astril souhaitait que je vous transmette le traité dans les plus brefs délais.

— Faites, faites.

 Bien que la tournure de ses explications faisait fulminer Rina, elle faisait en sorte de ne rien laisser paraître à ses insinuations. Elle avait gardé depuis le bateau son minuscule sac qu’elle ouvrit sur la table avant d’en sortir le parchemin tant attendu et de le faire glisser vers l’impatient Empereur.

— Voici donc ce que l’on m’a transmis, toutes les closes de sa Majesté sont attestées ici même. Elle attend de moi que je prenne en notes tout ce que vous voudriez modifier, annoter, refuser ou accepter. Permettez-moi alors de prendre toutes les informations que vous pourriez en dire.

 À la suite directe de ses affirmations Rina sortie de quoi écrire en attendant les commentaires qui suivraient, son hôte récupéra le papier avant de le lire avec minutie pendant de longues minutes qui donnèrent des sueurs froides à la jeune femme. Même Angelica semblait se sentir mal à l’aise.

 Au bout d’un certain temps, il leva cependant la tête vers ses invitées.

— Cela semble correct, quel est le piège ?

— Pardonnez-moi, je ne comprends pas.

 L’Empereur semblait sur les nerfs en leur disant cela, comme si c’était une sombre blague faite pour l’humilier.

— Votre Impératrice est connue pour son inflexibilité, comment elle aurait pu faire un traité qui ne l’avantage pas elle plus que nous ?

— Notre Impératrice est aussi connue pour son grand sens de la justice, Votre Majesté.

— Je n’en ai que faire de la justice, que diable ! Est-ce une avanie ?

 Même si l’esprit bouillonnait en face d’elle, Rina ne se laissait pas démonter pour autant, la fatigue paraissait l’envahir et sa patience s’amenuiser. Cependant, elle se rappelait que c’était une personne qui pouvait se montrer très cruelle alors elle devait faire attention. Elle devait prendre garde au fait qu’elle savait qu’il connaissait quelque chose sur elle et ses pouvoirs mais pas son rapport face à cela.

— Votre Majesté, je vous prie de croire que notre souveraine est réellement sérieuse en vous faisant transmettre ceci. Comprenez bien que nous cherchons à faciliter l’entente entre nos empires pour empêcher une guerre à tout prix. De plus, vous pensez bien que nous n’allions pas envoyer un de nos sujets aussi loin, moi, pour une simple blague. Si nos deux puissances s'allient, nous pourrons continuer dans une paix stable sans avoir peur d’une quelconque pénurie de nourriture ou que sais-je.

 Le discours de la femme qui lui faisait face semblait le convaincre plus qu’il ne l’avouerait, il s’était peut-être trompé sur son compte.

— Comment connaissez-vous autant de choses ? L’Impératrice vous a vraiment donné toutes ces informations ?

— Non, elle m’a informé du minimum requis en sachant mes antécédents familiaux. La plus grande partie de ma famille fait partie de l’armée de l'empire, j'ai donc l’opportunité de connaître certaines choses. Ce ne sont pas non plus des informations secrètes, elles sont d’une logique enfantine.

— Vous devez en savoir aussi grâce à votre sang.

— Que voulez-vous dire ?

— Vous êtes une Sokl n’est-ce pas ?

 Elle n’avait pas osé s’aventurer sur ce chemin glissant et essayait de se rassurer en se souvenant que l’Impératrice lui avait assuré qu’il ne ferait rien de mal envers elle. Elle s’était efforcé de se convaincre pendant tout le voyage que normalement les souverains ne devaient pas faire de différences entre les différents peuples mais l’Histoire lui avait démontré plusieurs fois le contraire.

— Est-ce un problème majeur à notre entente, monsieur ?

— Pourquoi cela ? Mademoiselle Angelica elle-même en est une et pourtant elle est en pleine forme.

 Sans prendre en compte ses bonnes manières, elle détourna vivement son regard vers sa compagne comme si elle s’était fait piquer.

— Vous ?

— Je n’avais pas le droit de vous le dire tant que sa Majesté n’en avait pas parlé et que vous n’aviez pas prouvé votre bonne foi.

— Je sais que vous venez pour des raisons familiales mademoiselle mais j’ai une condition importante à mettre en place.

— Je vous en prie.

 L’Empereur avait à présent les mains jointes sur le devant de la table, comme si l’explication qu’il allait donner était bien plus importante que les précédentes.

— Vous êtes tout d’abord là pour des raisons diplomatiques et par conséquent Angelica devra veiller sur vous tout en vous accompagnant régulièrement durant vos sorties.

— J’ai cru comprendre cela quand ma souveraine m’a évoqué son obligation de vous dire pour mon sang.

— Êtes-vous contre ?

— Aucunement.

— Alors tout est réglé, vous pouvez disposer.

— Quand pourrais-je récupérer le traité ?

— La veille de votre départ annoncez-vous, je vous le ferais transmettre. Je ne peux vous laisser le reprendre en sachant que vous ne repartez pas de suite et sans en discuter avec mes conseillers.

— Je comprends tout à fait. Je vous remercie pour votre accueil, votre Majesté.

— Tout le plaisir est pour moi, Jessy !

 À peine le souverain avait-il parlé que le jeune homme s’était matérialisé dans la pièce.

— Oui, votre Majesté ?

— Veuillez accompagner Mesdemoiselles Grintofk et Gorguet chez monsieur Tryni je vous prie.

— Tout de suite, votre Majesté, veuillez me suivre, je vous prie.

 Après une révérence pour l'Empereur, les deux jeunes femmes suivirent Jessy au dehors en direction des fiacres qui allaient les emmener loin d’ici. Tandis que le jeune homme tendait la main pour permettre à son amie de monter, celle-ci se moqua de lui en prenant un ton haut perché :

— Veuillez me suivre, je vous prie.

 L’intéressé ne répliqua pas en s’installant à leurs côtés, l’Empereur lui avait demandé de procéder ainsi au lieu de se mettre à l’extérieur comme le voudraient les bonnes manières. Même si celui-ci n’avait pas répliqué, Angelica ne se laissa pas démonter.

— Par les Dieux mais Jessy, ce n’est pas comme ça qu’un Sokl doit se comporter, que diable !

— Voyons Angelica ! Qu’est-ce qui vous prend de dire une chose pareille devant…

— Elle est comme nous, espèce d’andouille.

 Son ton détaché fit rire Rina qui s’amusait à voir la rougeur sur les joues du jeune homme qui ne savait plus où se mettre.

— Oh… je...

— Ne vous en faites pas, ce n’est rien. Mais ne vous cachez pas, mon compte est pire que le vôtre.

— Comment ça ?

 Angelica la regarda bizarrement, comme si elle ne comprenait pas le fond de sa pensée qui pourtant semblait relever de la logique même.

— Je pensais que vous auriez été au courant de quelque chose d’autre étant donné que vous devez m’accompagner dans mes sorties.

— Zluna ? Est-ce cela ? J’en ai entendu parler enfant par le père de Jessy je crois mais non l’Empereur ne nous en as pas reparlé.

— Effectivement mes parents, je ne sais comment, mais avait eu vent de cette affaire. Mais dites-moi, comment vous portez-vous à présent ?

— Nous sommes tous semblables alors ç'a dû s'étaler comme une trainée de poudre. Mais disons que je vis avec, nous n’avons pas encore de remède malgré les recherches incessantes de ma famille.

— Avez-vous consulté des professionnels ?

— Que voulez-vous dire par là ?

 Rina regardait Jessy sans comprendre, tout ce qu’elle savait c’étaient les recherches magiques que ses parents avaient faites. Cette fois-ci, c’était Angelica qui lui répondait.

— Vous n’avez pas de mages à Omnège ?

— Je vous avoue que mes parents ont surtout cherché des remèdes magiques purs car je ne crois pas que les mages soient choses courantes chez nous.

— Pardonnez-moi mademoiselle mais je trouve cela étonnant, la plupart des sorciers viennent de votre royaume, pourquoi n’y en a-t-il pas ?

— Je suppose que vous avez déjà entendu les phénomènes des chasses aux sorcières ?

 Angelica observa la jeune femme avec interrogation, où voulait-elle en venir en abordant ce sujet ?

— Oui, bien sûr, il y a eu cela partout, je ne vois pas particulièrement le rapport.

— Le fait est que c’était bien plus propagé dans mon pays au moment où l’ancien empereur menait une politique assez sanglante et par le fait ils sont tous partis ici ou dans d’autre pays pour leur sécurité.

— Ils sont restés en exil et leurs descendances aussi donc. Souhaitez-vous en rencontrer ici même ?

— Je vous remercie mais je n’en sais encore rien, tout ce que je souhaite c’est rencontrer ma famille et je m’occuperai du reste plus tard si vous le voulez bien.

— Contactez-nous si besoin, nous avons beaucoup de contacts, nous saurons nous rendre utile.

 Avec respect et reconnaissance, Rina hocha la tête avec un sourire. Elle se sentait bien ici et avait hâte d’enfin poser ses valises.

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