L'arrivée de l'espion impérial - Partie 2

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— Tu sais, normalement il devait venir ce soir, il voulait essayer de ne pas te croiser.

— Est-il venu ?

— Non, je ne sais pas où il se trouve, il a dû être retardé ou il t'a entendu ?

— Sans doute qui sait ? Ou il a peut-être malencontreusement fini enfermé dans sa chambre en bonne compagnie, disons... pour s'envoyer en l'air ?

— Tin je t’en prie ! Tu pourrais te montrer plus sympathi…

 En arrivant, Tin et Rina n’en croyaient pas leurs yeux tellement qu’ils en furent bouche bée. Des colonnes d’aliments étaient déjà placées partout dans la pièce et au milieu de tout cela on trouvait... Mino qui s’affairait de plus en plus.
 Rina le regarda avec surprise avant de regarder la grande horloge familiale qui se situait non loin, vers le salon et vit qu’il était bientôt minuit, elle s’étonna elle-même en pensant que ça faisait donc plusieurs heures qu’ils étaient dehors à parler tandis que Mino, cuisinait sans s’arrêter. Ses pouvoirs aidant, il faisait voleter des aliments d’un bout à l’autre de la cuisine sans remarquer ses aînés qui le regardait avec amusement. Elle lança un regard malicieux à son frère et leva la main vers un paquet de confiseries qui trônait sur le comptoir de la cuisine, celui-ci se mit à voleter et s’arrêta juste à côté du visage du Mino qui lui lança un regard interrogateur, il ne les avaient toujours pas vus et ils allaient bientôt exploser de rire s’il ne les voyaient pas rapidement.

— Je pense que tu vas avoir besoin de cela, mon cher.

 Dans un sursaut de surprise, il en fit tomber l’œuf qu’il avait dans sa main droite.

— Nan mais vous n’êtes pas bien de me faire peur comme ça ?!

— Tu es d’une maladresse déconcertante aujourd’hui Mino.

 Sans se soucier des réflexions de son jeune frère, Tin s'était permis de lui faire la remarque en s’avançant vers la zone de froid de la cuisine pour récupérer de quoi se rafraîchir tandis que Mino leva la main pour récupérer le sachet qui flottait toujours à côté de sa tête.

— Non, c’est faux.

 Mino détestait qu’on le sonde ainsi, pourtant comme un automatisme, Rina répondit en abaissant sa main pour annuler l’attraction qu’elle exerçait sur le sachet.

— Oh que si, dehors, on a entendu la cocotte de cuivre tomber, tu sais, celle de grand-mère Marianne.

 La jeune fille essayait de cacher son rire, elle savait que sa mère était très attachée à la cocotte de sa belle-mère mais embêter son frère était vraiment trop jouissif.

— J’espère qu’elle n’a rien sinon…

 Tin quant à lui essayait de se montrer faussement menaçant, il ne voulait pas que leurs parents rentrent et voient des objets de familles abîmés.

— Je sais maman va m’achever si elle a quelque chose mais non elle n’a rien, j’ai vérifié.

 Mino montrait un ton exaspéré et roula des yeux comme s’il était lassé de parler de cela, pourtant il continua sur sa lancée.

— C’est tout ça là… Entre le domaine, Zluna, l’école et l’absence des parents, c'est compliqué pour moi.

 Il décrivait de petits mouvements en direction de différents points de la cuisine. La jeune femme regarda son plus grand-frère et s’avança vers le plus petit pour le prendre dans ses bras, même si elle avait une grande part de responsabilité dans son mal-être, elle voulait être présente un maximum pour lui.

— Tout va changer quand ils rentreront, crois-moi.

 Depuis qu’ils étaient dans le manoir, Rina n’avait cessé de réfléchir à une solution. Mino ne répliqua rien mais il soupira et Tin la regardait d’un air interrogateur en lui mimant des mots du bout des lèvres.

— Pourquoi ?

— Je t’expliquerai.

 Toujours du bout des lèvres, elle exprima sa réponse, elle semblait sûre d’elle et afficha un sourire franc à son frère avant d’enfouir sa tête dans les cheveux de Mino pendant que Tin bus et s’approcha doucement de sa fratrie pour les enlacer quelques instants avant de se séparer.

— Allons dormir, papa et maman arrivent bientôt, il faut que tout soit prêt à leur arrivée.

 Mino se détacha de sa sœur en hochant négativement la tête.

— Attend Tin, regarde tout ce que j’ai à ranger, je monterai quand tout seras propre, je ne tarderai pas.

 Rina secoua sa main dans les cheveux de son frère pour les ébouriffer un bon coup.

— Je vais ranger ne t’en fais pas, je dois finir quelque chose avant de dormir donc je dois veiller encore un peu. Toi, file, tu as eu une rude journée.

 Mino lui adressa un air interrogateur et ouvrit la bouche pour protester mais il fut coupé par Tin.

— Aller, va dormir.

— D'accord, bonne nuit tous les deux.

 Il passa aux côtés de ses aînés pour les embrasser tout en glissant un remerciement dans l’oreille de Rina. Quand il fut monté dans sa chambre à l'étage, elle se mit à ranger, la fatigue se faisant ressentir, les étincelles que produisaient ses doigts n’était toujours pas aussi étincelantes que d’habitude. Tin fit de même mais de ses mains apparaissait des étincelles noires.

 Les Sokl avaient une couleur différente qui apparaissait quand ils effectuaient leur magie et la teinte était unique pour chacun. Malgré ça, un jour, la mère de Rina lui avait conté une légende vieille comme le monde, selon elle il était possible que deux personnes puissent avoir exactement la même teinte de magie, c’étaient les âmes-sœurs. Elle ne savait si c’était vrai pour beaucoup de cas mais elle savait que c’est parents avaient tous les deux la même couleur, rouille. Elle avait ancré cette pensée tout au fond de son cœur tant elle l’apaisait. Même si son fiancé ne pouvait pas faire de magie, elle voulait savoir si c’était une réalité. Kizune faisait, jusqu’à preuve du contraire, partie de la communauté des Jiklo, incapable de créer une once de magie. En ce qui concernait la fratrie, Rina c’était le rouge, Tin le noir et Mino le bleu turquoise.

 Des plats sales voletaient à présent jusqu’au lavabo et se nettoyaient tous seuls, des sachets d’ingrédients entraient dans les placards par leurs propres moyens comme si c’étaient des petites choses animées, c’était comme un conte pour enfant. Tout à leur concentration, Tin démarra la conversation d’un ton monocorde.

— Alors dis-moi ? Pourquoi tout va changer quand les parents rentreront ?

 Elle se mit à avoir un petit sourire, tout en continuant de ranger la pièce en désordre, elle regarda son aîné pendant quelques secondes encore avant de lui répondre.

— Tout simplement parce que j’ai réfléchi à ce que tu m’as dit tout à l’heure. Je n’utiliserais en aucun cas Tessa et c’était complètement stupide d’y avoir même légèrement pensé, je l’avoue. J’attendrais quelques années et je verrais avec le temps, peut-être qu’un jour je rencontrerais quelqu’un qui sera apte pour ce sortilège ou peut-être que je ne voudrais plus m’en débarrasser qui sait ? Je sais que c’est une idée folle mais elle deviendra probablement une amie ? Ne me regarde pas comme ça ! On ne sait jamais et je suis sûr que tu as déjà caressé cette hypothèse. Nous nous haïssons mais selon les circonstances, on pourrait collaborer au moins pour survivre.

 Elle afficha un air satisfait qui fit sourire grandement Tin qui avait une once de moquerie sur son visage.

— Tu es sûre de toi ? Tu m’avais l’air plutôt déterminé tout à l’heure. J’espère que tu ne me feras pas de faux espoirs et que d’un coup tu vas faire ça derrière mon dos.

— Plus que sûr à vrai dire. Pourquoi ne pas essayer après tout ? Je ne vais pas me défiler comme ça et dans tous les cas j’aurais besoin de toi et de tes connaissances en la matière. Je ne suis pas assez doué en maléfices.

— Je suis heureux que tu aies pris cette décision. J’ai eu peur que tu fasses une énième folie.

— Moi aussi je suis contente de ne pas avoir fait quelque chose que j’aurais pu amèrement regretter.

 Elle continuait à manipuler les objets autour d’elle, à distance, pour pouvoir tout ranger rapidement. Dans son esprit tout fusait, elle était joyeuse que son frère l’ai résonné et qu’elle n’ait pas fait n’importe quoi. Les étincelles rouges et noires donnaient à la grande cuisine des airs de fête estivale.

 Une demi-heure plus tard, quand tout fut rangé à sa place, Rina attacha ses longs cheveux châtains dans une queue de cheval haute et observa la cuisine d’un air satisfait en s’asseyant sur une chaise du salon attenant.

— C’est bon, nous avons tout fini, on aurait pu croire que Quitana était passée par ici !

— Tu m'étonnes, il a mis un bazar impressionnant.

 Ils se mirent à rire, Quitana était la déesse des tempêtes dans les mœurs de leur royaume, et souvent quand elle passait ça provoquait de nombreux dégâts souvent dévastateurs. Elle pouvait tout autant provoquer des tempêtes minimes que de grandes tornades.

— Tu te souviens quand elle est passée pas loin de Kjilofk ?

 Tin demanda cela à sa sœur tout en séchant ses mains dans un tissu de la cuisine pendant qu’elle hocha la tête positivement.

— Oui, il ne restait plus rien du tout. Ce n’était pas dans un village de Sokl ?

— Si, et j’ai toujours pensé personnellement que les Ziny avaient fait des offrandes à la déesse pour qu’elle attaque ce village, mais quand j’y suis retourné la dernière fois pendant une mission, ils avaient réussi à reconstruire quelque peu.

 Tin eu un regard grave sur le visage, les Ziny c’était toutes les personnes qui voulait se débarrasser de toute cette population spéciale, parfois c’était des Sokl qui détestaient leurs propres origines ou des Jiklo qui ne les aimaient pas. Généralement, ils essayaient de leur nuire par tous les moyens comme implanter un monstre dans une enfant par exemple. Ils avaient fait au cours des siècles énormément de dégâts, notamment au moment où les Sokl n’avaient pas encore de moyens solides pour se défendre. Rina observa ses mains qui faisaient exploser de petites étincelles rouges qui tiraient sur le blanc cassé.

— Je suis sûr qu’un jour les Ziny nous accepterons

— Ne te fais pas d’illusion Rina, tu le sais encore mieux que moi comment réagissent les gens quand ils se sentent attaqués par une force supérieure, ou du moins, différente de la leur.

— Oui, mais il y a des exceptions ! Regarde Mia, Tessa, et...

— Stop, tais-toi ! J’ai compris, je ne veux rien entendre de plus.

— Je...

— Va te coucher Rina, je t’en prie, c’est rangé, tu n’as plus rien à faire ici.

 La main du jeune homme avait fendu le vide pour la couper dans ses paroles, son ton était devenu plus dur et son visage plus pâle. Elle avait touché un point trop sensible qu’elle pensait refermer depuis bien longtemps.
 Elle se leva doucement, remit la chaise en place, passa devant lui en n’osant pas dire quelque chose par peur de refaire une erreur. En arrivant au pied d’un grand escalier en chêne qui se situait vers une extrémité du salon et jeta un regard en arrière. Il avait les poings serrés et ses yeux fixaient un point invisible, pendant encore quelques secondes elle l’observa puis abaissa la tête.

— Bonsoir Tin.

 Elle prit un livre qu’elle avait laissé sur la console près de là puis souleva faiblement son jupon pour ne pas se prendre les pieds dedans. Elle monta lentement le grand escalier pour rejoindre l’étage du manoir, là où toutes les chambres étaient desservies.

 Dans sa chambre elle se dirigea directement vers la grande fenêtre en face d’elle, elle ouvrit les deux battants en grands pour s’accouder sur le garde-fou et regarder la nuit tombée. Elle avait peur, peur du noir, mais elle s’efforçait de rester en place pour se changer les idées. Il était tard et elle ne pouvait donc pas se mettre à lire, elle devait se reposer mais ce n’était décidément pas son objectif, surtout avec la tête aussi embrouillée. Elle respira un bon coup et referma la fenêtre ainsi que les volets et se dirigea vers sa penderie pour se vêtir d’un pyjama pour la nuit, elle prit celui sur le plus haut de la pile, c’était un pyjama simple bleu ciel et bleu marine avec un chat orangé sur la poitrine. Elle enleva sa robe qui glissa le long de ses bras, de sa poitrine et le long de ses jambes pour arriver sur le sol, elle ramassa le vêtement et la posa sur la chaise de son bureau. Ensuite, elle prit le haut de son pyjama et l’enfila ainsi que son pantalon, ses gestes étaient lents, elle avait hâte de s’endormir. Décidément, elle adorait les pantalons. Elle se débarrassa de ses chaussures quand elle arriva au pied de son lit, ouvrit les couvertures et se glissa à l’intérieur en soupirant de bonheur.

— Enfin.

 Elle avait l’impression que cette journée fut brutalement la plus longue de toute sa vie et qu’elle avait été remplie d’émotion mais c’est en repensant à tout cela que Moonia, la déesse du sommeil, vint rapidement la chercher pour l’emporter dans le royaume des songes pour une nuit réparatrice au possible.

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