Evènement qui changera son monde.

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Ils montèrent dans le métro, Lise avant Jean. Dans la rame, il repérèrent deux places vides et s'assirent.

-J'espère que le boss a apprécié mon rapport commercial, dit Lise. J'ai sacrifié ma nuit dessus.

-Il n'y a aucune raison pour qu'il ne l'ai pas aimé, la rassura Jean. Le boss t'as à la bonne, tu sais. Il te considère comme un des moteurs de cette entreprise.

-Dis plutôt qu'il m'aimerait bien dans son lit. Tu devrais voir comment il me regarde, quand je passe devant son bureau.

Le métro avait déjà traversé quatre stations. La machine émettait maintenant son bruit de croisière et le trajet était devenu monotone.

A la cinquième station, Jean vit le premier qu'un homme suspect avait grimpé dans la rame. L'individu dégageait une odeur d'alcool. Il portait un long manteau beige, des lunettes, et l'on voyait ses jambes nues. Jean pria pour qu'il ait mis un short en dessous.

- Encore un clodo, persifla soudain Lise. Celui-là n'a même pas fait l'effort de mettre un pantalon.

-Arrête. Peut-être qu'un jour a-t-il travaillé mais que sa boîte a coulé, répliqua Jean. Tu ne le connais même pas.

A environ quatre mètres devant eux, une adolescente écoutait ses tubes. Ses écouteurs se vissaient dans ses oreilles et la coupait du bruit extérieur.

L'homme un peu suspect s'approchait d'elle. Il mouvait avec lenteur sa grande carcasse, et ne quittait pas des yeux sa tête blonde ni sa nuque rose et découverte.

Il commença à déboutonner son long manteau. La tension se fit palpable parmis les usagers. De nombreux passagers se tenaient là. Ils se demandaient tous ce qu'allait faire l'homme.

Quand il eut finit de déboutonner son manteau, les passagers découvrirent qu'il était nu.Il balaya son sexe de droite à gauche devant l'adolescente qui mit un temps à réagir. Elle pleurait pendant que le bonhomme continuait sa manoeuvre en y prenant un plaisir malsain.

Jean avait perdu tous ses repères.

- Mais c'est quoi ce bordel! s'indigna Lise. Il faut l'arrêter!

Jean regarda autour de lui. Il n'était pas bien costaud, alors il se voyait mal s'interposer entre le pervers et la jeune fille. Malheureusement,il n'y avait dans cette rame que des femmes et des vieillars et il était le seul à pouvoir agir. Jean respira un grand coup. Peut-être qu'avec une bonne droite derrière la nuque, rapide, précise, comme à la télé, il assomerait le colosse et aurait le temps d'appeler la police.

Jean se tint prêt. Il semblait sur le qui-vive. Mais Lise lut ses intentions dans son regard et saisit son bras.

-Non. N'y va pas. Tu te prendras juste un coup de couteau, et mourras bêtement.

Le ton sur lequel elle prononça ces mots me glaça les veines. La banalité du quotidien avait laissé la place à une terrifiante situation d'urgence. Le genre de situation qui vous change un homme.

Je restais donc sur mon siège, et attendis de voir la suite. Le bonhomme harcelait toujours cette pauvre fille sans que personne n'eut parut l'avoir remarqué. Au bout de cinq minutes, il lui attrapa le bras. Il défit son vêtement, la courba et... ce qui arriva ensuite, je ne peux décemment pas vous le raconter.

Les policiers ont reconnu que Jeanne Gernez, quinze ans, avait subi un viol dans les transports en commun, au jour du vingt-sixième janvier deux-mille dix-huit à dix-huit heures. Ils ont également inculpé tous les passagers présents ce soir là pour non assistance à personne en danger. Jean et Lise sont concernés.

-Je mérite pas d'être en vie.

Jean et Lise songeaient dans un parc à la frontière entre le quinzième et la quartier de la tour eiffel. Ils avaient assistés au viol il y a deux semaines. Aucun des deux ne parvenaient encore à bien dormir la nuit, et, dans leurs cauchemars, chacun réentendait les cris de Jeanne.

-Ne dis pas cela, lui répondit Lise. S'il y a une responsable ici, c'est moi, et c'est moi qui devrait être à cette heure-ci dans un cercueil.

Lise rêvassait. Elle aimait bien ça, rêvasser, depuis deux semaines, adoptant quand elle s'oubliait un air profond et lointain. Soudain, elle pleura.

-hé moi, je pensais à ce que mon boss allait penser de moi, et,...et, je ne voulais pas d'histoire. On violait une fille devant mes yeux, et je n'ai fait que réfléchir à ma carrière...

Jean eut de la peine pour elle. Quoiqu'il en avait aussi pour lui-même. Certains gestes de la vie quotidienne comme de regarder son reflet dans la glace se montrèrent pénibles. Il ne pouvait plus non plus fixer ses enfants, et quand il y parvenait, il imaginait un autre lui se tortiller péniblement sur son siège pendant qu'un de ses enfants se faisait violer.

Deux ans s'écoulèrent. Lise avait fini par se faire une raison, et après quelques séances de psy, Jean se reconstruisit un amour propre. Le train train de vie avait repris, et un soir où Jean préparait la cuisine, il réussit pour la première fois à parler à sa femme de l'incident.

-Tu sais, chérie.... c'est peut-être un cliché que j'ai pu lire dans un roman à l'eau de rose , mais voilà; il ne se passe pas un jour sans que je ne pense à elle.

Sa compagne s'appelait Carmen. Il l'avait épousé pour sa gentillesse, et elle avait toujours un mot gentil à lui adresser, ou de bons conseils à lui prodiguer.

-Ce n'est pas de ta faute. Ce qui arriva, c'est que tu as eu peur. C'est normal. Je dirais même que, parfois , ça demande du courage, d'avoir peur. Le courage de se dire qu'après cela, on se détestera pour toujours, mais qu'on reverra sa famille et qu'on continuera de s'en occuper.

Carmen était aussi très philosophe.

-Oui, mais tu ne comprends pas. Je... j'ai sincèrement eu peur. Oui, j'ai eu les jetons de ne plus vous voir, mais il y a autre chose. J'ai eu peur pour moi. Et j'ai agi comme une tapette.

-Oui, t'as vraiment agi comme un connard.

Ils ne l'avaient pas entendu entrer, à cause des plaques de cuisson. Gérard Gernez se tenait devant eux, un couteau à la main.

-Tu me reconnais, Jean? Depuis le départ, tu savais qu'un de ces jours je te rendrais une petite visite.

Jean ne joua même pas aux surpris. Il avait gardé ce secret depuis bien longtemps. L'adolescente qu'il avait laissé se faire violer s'avéra être la fille d'un ancien collègue, Gérard Gernez. Ils n'avaient jamais été les meilleurs amis du monde, mais à l'époque, ils se disaient toujours bonjour et s'échangèrent deux, trois blagues sur la nouvelle performance du fc club de lens ou sur la tenue de la chanteuse Israëlienne à l'eurovision. A présent, Gérard Gernez le regardait avec les yeux d'un fou, et il menaçait sa vie, et celle de son épouse.

-Gérard, je ... je suis désolé. Je ne pense pas pouvoir effacer ce qu'il s'est passé, sinon crois moi que je l'aurais fait dans la minute. Mais tout faire en mon pouvoir pour me faire pardonner, cela me semble possible.

-Te faire pardonner,... te faire pardonner...

Gérard se répéta au moins quatre/cinq fois, et Jean crut qu'il ne s'arrêterait pas, mais il enchaina;

- Crois tu que l'on parle de choses pardonnables? que ce dont on t'accuse est pardonnable?

-Non... mais je..

- Tu n'as RIEN FAIT!

Le hurlement de Gérard retentit dans la cuisine. Le temps se figea une minute. Puis Gérard avança vers Jean.

- Tu voudrais que je t'excuse? Cela soulagerait-il ta petite conscience? Pourrais-tu te représenter tout ce que moi, j'ai du perdre dans cette histoire que tu aurais pu éviter?

Gérard avait atteint la cuisinière. Il tenait maintenant Jean par la taille, lui appuyant son couteau sur la gorge.

-Tu veux te faire pardonner? demanda-t-il.

-Oui.

-Alors pas bougé.

Gérard relâcha la pression et rangea sa lame. Il se retourna et marcha vers Carmen. Au fond, Jean sut comment ça allait se finir depuis que Gérard lui avait dit de ne pas bouger. Il avait toujours gardé sur lui le couteau qui lui avait servi à couper les tomates. Ce couteau, il l'enfonça dans le dos de Gérard, se libérant de la tension, se libérant de la peur, pour découvrir une peur et une culpabilité encore plus grande que celles qui l'habitaient depuis maintenant deux ans.

La justice condamna Jean à treize ans de prison. Il avait assassiné un homme de sang froid, n'avait pu invoquer la légitime défense. Il l'avait poignardé dans le dos. Jean était dans la force de l'âge. Il adorait sa vie, qu'il voulait heureuse et prolifique. A présent, Jean était un criminel. Et je vais vous paraître prétentieux, mais laissez moi vous dire que s'il avait eu des couilles, il serait encore dans le peloton de tête de la fameuse course au bonheur.

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