XXIII

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Arrivèrent septembre et cette redoutée réunion de famille dans une grosse ferme céréalière de l’Oise, entre Senlis et Compiègne.

Je connaissais un peu l’itinéraire pour être déjà allé à Gerberoy, un des plus beaux villages de France, situé dans le pays de Bray. Cette fois, il s’agissait par Dinan, Dol, Avranches, Caen, de se rendre à Rouen, puis par Gournay-en-Bray et Beauvais d’atteindre la lisière de la forêt de Compiègne à Jaux, une bourgade de deux mille âmes, étirée le long de la départementale 13. Au total, cent kilomètres de plus que la distance entre chez moi et le domicile de Jackie. Cela me semblait réalisable dans la journée, sans problème. Une chambre nous était réservée sur place.

Mais je m’aperçois que je ne vous ai pas encore livré le nom de jeune fille de Jackie ; c’est le plus porté dans son département, la Vienne, tout comme en France d’ailleurs : Martin ! Tout cela dû à la sainteté et célébrité de l’évêque de Tours au IVe siècle. C’est pourquoi je redoutais ce rassemblement qui promettait d’être pléthorique, même en le réduisant à la portion congrue de sa famille proche.

Nous fîmes un agréable voyage par un temps clément avec une escapade jusqu’à Honfleur pour déjeuner sur les quais du Vieux bassin, près de la Lieutenance. En soirée, un peu ankylosé par toutes ces heures de conduite, mais guidé de main de maître par Jackie qui a un sens de l’orientation étonnant et sait lire une carte, au contraire de Jeanne qui était nulle en ce domaine, j’arrivais en vue de notre destination.

C’était une exploitation aux nombreux bâtiments regroupés en un quadrilatère, dans lequel on pénétrait par un porche fermé d’un portail métallique à deux vantaux. Vous vous trouviez alors dans une grande cour pavée, avec un haut bâtiment carré à usage de silo, un peu décentré sur la droite. Tout autour, des hangars, des remises, une laiterie, des poulaillers et, sur la gauche, deux maisons d’habitation accolées, avec sur l’arrière un jardin d’agrément. La première, disparate et basse, assez ancienne, la seconde, en pierre d’appareil calcaire locale, imposante, munie d’un perron, de bow-windows et à l’évidence beaucoup plus récente. Il s’agissait d’une reconstruction après un incendie causé par la foudre qui avait ravagé celle d’origine.

Les exploitants, qui avaient initié une activité de restauration à la ferme, avaient aussi transformé une partie de leurs bâtiments, sur l’avant de la cour, en salle de réception pour une centaine de personnes. Le reste des convives serait installé sous les hangars et dans la cour sous des barnums. Les véhicules seraient relégués dans une arrière-cour fermée, où étaient garées habituellement les imposantes machines agricoles qui ne pouvaient plus être accueillies dans les remises d’antan, faute de hauteur suffisante.

Je figurais parmi les plus âgés des participants. À ce titre, il fut entendu dès le lancement des invitations que nous serions logés sur place dans la grande maison qui comportait des chambres libres. Pour le reste, chacune des familles avait été invitée depuis longtemps à prendre ses dispositions, qui à l’hôtel, qui en chambres d’hôtes, en camping-car, caravane, mobile home, location meublée, au gré des uns et des autres. Ce week-end-là, malheur aux imprévoyants qui auraient souhaité trouver un hébergement dans le secteur. À quinze kilomètres à la ronde, tout avait été réservé ou presque.

Nous n’étions ni les premiers ni les derniers. Et comme toujours, ma décapotable bicolore fit son petit effet en pénétrant dans la cour de la ferme. J’actionnai mon nouveau klaxon pour célébrer notre arrivée et des applaudissements nous répondirent.

Les propriétaires se détachèrent d’un petit groupe assemblé devant la grande maison pour venir à notre rencontre et Jackie fit les présentations :

— Françoise, Marcel, je vous présente Pierre, mon compagnon.

— Bienvenue à la Ferme des Baliveaux, Pierre !

Bises, accolade et ferme poignée de main.

(à suivre)

©Pierre-Alain GASSE, 26 avril 2020, 41e jour du confinement.

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