Un banc pour une vie

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En cet après-midi, je me prélassais au soleil. Mars était là, amenant ses premiers rayons de soleil printanier et ne pas en profiter aurait été un crime. Devant, les massifs de jonquilles et narcisses rayonnait autant que le soleil. Pour l’ambiance sonore quelques oiseaux gazouillaient gaiement dans les arbres et arbustes environnant. Un peu de quiétude ne pouvait pas faire de mal dans ce beau parc. Pour l’occasion j’avais sorti un livre, un de ceux dans lequel je n’avais pas encore eu le temps de me plonger.
Je n’avais pas vu le temps passé, et je devais bien comptabiliser une heure de lecture lorsqu’une jeune femme, je dirais même une adolescente, s’approcha du banc et sans même se donner la peine de le demander s’installa sur l’autre bout. Je mis cela sur le compte de l’âge bête et du côté irrévérencieux des jeunes de cet âge, même si je suis trentenaire ! Je passais à la page 37 !
Après un moment de lecture environné par le silence, au détour d’un regard en coin, je fis une rapide observation de ma voisine de banc. Quelque chose me stoppa et frappa ma vue. La jeune femme se tenant le visage était en train de sangloter. Je décidais de me replonger dans mes pages, après tout cela ne me regardais pas !
Ou plutôt c’était censé ne pas me concerner. J’étais de bonne humeur en venant mais entendre ces sanglot me mettais mal à l’aise. Je n’étais plus concentré sur mon livre alors je l’ai refermé et j’ai fixé les massifs devant moi demeurant silencieux mais réfléchissant.
Mon regard se fixa ensuite sur la jeune femme et la détailla. Adolescente fine ayant atteint une bonne taille, proche de l’adulte. De long cheveux doré d’une grande finesse. Un visage avec, encore, quelques traits juvénile en train de s’estomper. Ses joues étaient roses de tristesse, vraiment cette ado était touchante et j’en devenait empathique à son égard. Presque, je lui aurais passé une main bienveillante dans le dos. Mais ce n’était pas possible, je n’allais pas passé pour un pervers !
Après une longue hésitation je prononça une phrase à son égard.
« Mademoiselle, quelque chose ne va pas ? »
La question resta sans réponse. Je l’avais bien mérité ce vent ! Elle pleurais à chaude larmes et je lui demandais si quelque chose n'allais pas ! Comme si la réponse n’était pas évidente ! Vraiment fallait que j’arrête avec l’empathie !
J'étais maintenant démoralisé et gêné, j’avais l’impression de m’être introduit dans la tristesse de l’adolescente. Il était temps de partir, je pouvais bien lui laisser le banc pour qu’elle pleure tranquillement ! Je me suis levé et m’apprêtais à partir lorsqu’une voix triste ce fit entendre.

« Vous pouvez rester ! Ne partez pas à cause de moi ! »

Mon esprit s’arrêta une seconde avant de réagir. Parce qu’elle lit dans les pensées aussi ? Je repris place, après tout si je suis utile !

« Pardon, je ne voulais pas m’immiscer dans votre vie, simplement je vous vois triste et je me suis demandé si d’une façon où d’une autre je pouvais vous aidez ! »


« Je crois que le meilleur moyen de m’aider est que vous restiez assis sur ce banc, vous y étiez en premier. D’ailleurs, pardonnez mes pleures, peut-être que je suis faible ! »


« Vous avez le droit d’être triste et j’imagine que vous avez une bonne raison pour cela ! Je ne suis pas sûr que ça fait de vous un être faible ! »


«Je sais que l’on ne ce connaît pas mais peut être que vous devriez lire cela ! »

Elle me tendit un courrier qui m’interpella aussitôt.

« Vous êtes sûr de souhaiter que je lise cette lettre ? Il y a l’entête d’un cabinet médical et je ne voudrais surtout pas être trop indiscret ! »
« Peu m’importe, maintenant que vous m’avez vu pleuré , vous avez le droit de savoir pourquoi ! D’ailleurs je m’appelle Lisa ! »
« Enchanté, je suis Arthur ! »
« Maintenant on se connaît ! Alors vas y lis ça, tu comprendras !

J’ai déplié lentement le papier et calmement commencé à lire. Arrivé à la moitié du courrier mon sang se glaça . J’en eu froid et si je l’avais pu j’aurais été me mettre au chaud ! À présent les rayons de soleil printanier ne me suffisait plus. Arrivée au bas, je refermais la page, là rendit à sa propriétaire et demeura silencieux.

« Tu comprends maintenant ? » annonça t’elle. « je viens juste de l’apprendre et tu es maintenant le seul autre à le savoir ! Personne d’autre que nous deux doit le savoir, c’est mon souhait ! Alors peut-être que de temps en temps j’aurais besoin de venir m’écrouler sur ce banc ! »

« Oui je comprends et dans ces conditions tu as le droit de te sentir mal ! Si je peux me permettre, pour ton entourage ? »

« Pas un mot ! Je t’en prie, j’aurais besoin de force ! Je ne veux qu’il s’apitoient sur mon sors, Je veux vivre, comme si rien n’était ! Ma famille, mes amis l’apprendront un jour et ce sera mieux ainsi ! Je ne veux pas qu’ils me voient différemment ! »

« Pourtant tu viens de me dire tout ! »


« C’est différent, on vient à peine de se connaître et j’avais besoin de parler ! »


«Je crois qu’en fait tu est quelqu’un de forte mentalement, vouloir vivre ta vie normalement sans vouloir casser l’harmonie avec les gens qui te sont chères, c’est courageux ! »

« J’ai pas envie de leurs réactions ! Comment leurs faire comprendre que je ne verrai peut-être pas mes dix huit ans parce qu’il est grandement possible que je sois morte avant à cause de cette foutue maladie ! Puis essayer de faire comprendre que je veux vivre jusqu’au bout ! Certains essaieraient mais sans comprendre ce choix et en pensant uniquement à ma disparition en me voyant ! Vraiment je préfère ainsi ! »


Notre discussion continua sur d’autres sujets. Chacun de nous deux évoqua sa vie réciproque. Des éclats de rires fusaient tout en refaisant le monde. Vers 17h00 il fût temps de se séparer. Lisa m’affirma que le fait de la rencontrer et d’avoir échangé en parfaite bienveillance lui avait fait un bien fou.
Par la suite ce fut un rituel : ce jour dans la semaine où nous refaisions le monde sur un banc. Sans jamais les avoir rencontré, elle parlait de ses proches, amies ou bien famille. Quand elle en avait envie, elle évoquait sa santé et parfois, quand elle en avait besoin, pleurait sur mon épaule. Mais ce fut toujours en simple amitié et j’attendais avec impatience de pouvoir à nouveau se voir.
Et puis un jour, c’était en automne, elle n’est pas venue. Je l’avais attendue toute l’après-midi , misant sur un retard, mais rien. Je suis rentré chez moi en me questionnant, Le lendemain, achetant un journal, je tombe par hasard sur les nécrologies. Lisa était décédé la veille de ses dix huit ans ! Comme un symbole cruel. J’ai réalisé que je ne la verrais plus et qu’il y avait plein de sujets que l’on aurait pu évoquer. La vie en avait décidé autrement. De son vivant elle m’avait fait promettre de ne pas me rendre à ses funérailles, aussi pénible soit le moment. J’ai respecté cette décision mais j’ai senti un grand vide : cette fois c’est de moi que venait les larmes.
J’ai regardé à la fenêtre et dans la rue, il pleuvait des cordes !
Lisa voulait que ses amis ne s’apitoient pas de son vivant, alors passé le choc et la tristesse profondes j’ai essayé d’en faire autant après sa disparition.



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