Chapitre 11

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Aujourd’hui, le soleil brillait dans le ciel. Aucun nuage ne venait tacher de blanc se magnifique ciel bleu. Véra avait même demandé à ce que le déjeuner soit installé dans les jardins. Elle voulait profiter du beau temps avant la saison des pluies.


— Margot, tu pourras t’occuper de faire renouveler la garde-robe d’Élia cet après-midi ? J’ai remarqué qu’elle avait grandi.

— En cinq mois ? Ses robes lui vont encore très bien, râla-t-elle, comme à chaque fois que ça me concernait.

— Ce n’était pas une proposition Margot. Tu en profiteras pour ajouter deux ou trois robes de bal, tout à mes frais.

— Bien, Ma dame.

— Bonjour, Mesdames, s’imposa alors une voix masculine derrière moi.

— Marcus ! s’exclama alors Véra. Quel bon vent t’amène ?

— Une bonne nouvelle Majesté, une très bonne nouvelle.


Avant que je n’aie le temps de me retourner, il entoura mes épaules de ses bras, dans mon dos et déposa un bisou sur ma joue.


— Comment va ma princesse ? enchaîna-t-il

— Mais tait toi, répliquais-je en attrapant un morceau de pain pour le placer dans sa bouche avant de déposer à mon tour un bisou sur sa joue.

— Quelle est donc cette bonne nouvelle ? reprit Véra pour nous empêcher de nous disputer.

— Je vais me marier, Majesté.

— Mais c’est génial !

— Quoi ? Qui me vole mon partenaire de danse ? m’énervais-je en me levant et en passant mes bras autour de sa taille.

— La femme que j’aime, Élia, enchaîna-t-il en me soulevant, comme si je n’étais qu’une poupée, pour m’éloigner. Mais ne t’inquiète pas, je reviendrais danser avec toi.

— J’espère bien.


Je croisais les bras et boudais, ce qui fit rire Marcus et Véra. Ce dernier m’embrassa sur le front avant d’attraper mon poignet pour me forcer à m’asseoir sur ses genoux. Du coin de l’œil, je vis le regard noir que Margot m’accordait mais décidais de ne pas en tenir compte. Marcus était de retour et j’avais tellement de choses à lui dire.


— Majesté, reprit Marcus en entourant ma taille de ses bras, j’aimerais que ce soit vous qui nous mariez. Après tous, vous êtes ma cousine et l’Impératrice. Je sais qu’en tant que Prince Héritier de Carandis, ma mère serait plus apte à me marier mais je tenais à ce que ce soit toi, Véra.

— Tu dois vraiment l’aimer pour te marier à dix-huit ans.

— Je suis très amoureux, en effet.

— Je serai ravie de vous marier. Es-tu venu avec ta fiancée ?

— Oui et avec ses deux filles, âgées d’un an toutes les deux.


En entendant ça, mon cerveau prit la fuite et mon cœur fondit. Il y avait des bébés au palais et je n’étais même pas au courant. Je devais absolument les rencontrer. Je me tournais légèrement pour regarder Marcus avec un grand sourire. Mes yeux s’étaient aussi illuminés.


— Toi, tu veux les voir, n’est-ce pas ?

— S’il te plaît ! Si tu me dis non, je vais fouiller tout le palais pour les retrouver, compte sur moi.

— Tu sais t’y faire avec des enfants ? m’interrogea alors Véra.

— Si je sais m’y faire ? Au village, je passais tout mon temps libre à l’orphelinat, à aider les bénévoles, quand je n’étais pas avec ma sœur. J’étais souvent avec les moins de trois ans.


Véra se leva et fit le tour de la table pour m’embrasser sur le front. Dans mon dos, je sentis l’instinct protecteur et tueur de Margot se réveiller. Si elle avait pu, elle m’aurait étripé sur place. Tout ça à cause de se bisou.


— Tu es une fille en or, Élia, tu le sais ?

— Si vous le dites, répondis-je en me frottant la nuque, gênée.

— Je vois que j’ai interrompu votre repas et je dois retrouver ma fiancée, souhaites-tu venir avec moi Élia ? me proposa Marcus.

— Ma dame ? demandais-je alors à Véra.

— Vas-y Élia. Pars en reconnaissance me dire si cette femme mérite d’épouser mon cousin.

— Je l’observerais avec attention.


Je descendis des genoux de Marcus qui se leva ensuite. Il fit une révérence avant de prendre ma main dans la sienne pour s’éloigner. Dès qu’on fut assez loin de Véra et Margot, il passa un bras autour de ma taille et ralentis le pas.


— Dis-moi Élia, il y a quelque chose entre toi et l’Impératrice ?

— Non, pourquoi ? mentis-je à moitié.

— Je n’ai jamais vu ma cousine aussi tactile avec quelqu’un et il me semblait avoir vu ses yeux pétiller quand elle te regardait.

— C’est en effet possible, répondis-je en frottant ma nuque. Disons que… nous sommes devenues proches.

— Proche comment ?

— Je t’en pose des questions ? m’exclamais-je alors face à son indiscrétion

— Je suis sérieux Élia, enchaîna-t-elle en s’arrêtant et en prenant mes mains dans les siennes. Je m’inquiète pour elle.

— Pourquoi ?

— Quelle est votre relation ? Êtes-vous amie ou plus ? Et si plus, qui as fait les avances en première ?


Pendant plusieurs secondes qui parurent une éternité, je réfléchis à si je devais vraiment répondre. Margot me détestait déjà pour être si proche de l’Impératrice. Heureusement qu’elle ne savait rien des fameuses avances, de ce qu’il s’était passé à plusieurs reprises quand nous étions seules toutes les deux.


— C’est elle, répondis-je en retirant mes mains pour croiser mes bras. C’est elle qui me fait des avances.

— Merci de m’avoir répondu Élia, dit-il en reprenant sa marche. Si c’est elle qui a commencé, je n’ai pas besoin de m’inquiéter.

— Pourquoi tu t’inquiétais pour elle ? osais-je demander.

— Ce n’est pas à moi de te le dire. Et sinon toi, qu’est-ce que tu ressens pour elle ?

— C’est… compliqué. Je ne sais pas vraiment en fait et… commençais-je en me frottant la nuque à nouveau, ça me fait penser à ma sœur.

— Je m’occupe des recherches pour retrouver ta sœur dans mes différents domaines de l’Empire.

— Vraiment ?

— Oui. Mes hommes ne négligent aucune piste. Ils regardent dans tous les recoins, même les lieux abandonnés. On finira par la retrouver. Mais pourquoi ça te fait penser à elle ?


Je cueillis une rose blanche pour trouver mes mots.


— La dernière fois que je l’ai vue, elle était avec son fiancé. Je sais que je ressens certaines choses pour Véra, surtout quand… mais j’ai peur qu’il lui arrive quelque chose. J’aimais ma sœur et ils l’ont kidnappé.

— C’est l’Impératrice, Élia. En plus d’être protégée par plein de soldats en permanence, elle a une super demoiselle de chambre. Je pense que tu as peur de tomber amoureuse, de remettre ton cœur entre les mains de quelqu’un après la perte de ta sœur et ça se comprend.

— Je sais surtout que c’est interdit Marcus ! Je pourrais me faire exécuter pour le simple fait de l’aimer ! Et Margot me surveille déjà.

— Elle te protégera et puis elle pensera peut-être enfin à modifier cette loi ridicule. Surtout que ma grand-mère a épousé deux femmes.

— On peut arrêter d’en parler ?

— Bien sûr. Isa devrait être dans les cuisines pour faire manger les filles.

— Je te suis alors.


Quand on entra dans les cuisines, la chaleur était étouffante, bien plus qu’à l’extérieur. Près d’une table, une jeune femme donnait le biberon à un bébé.


— Marcus, commença-t-elle, tu veux bien t’occuper de Violette ?

— Bien sûr.


Dans un panier, il récupéra un autre bébé dans ses bras et se rapprocha de moi.


— Tu sais donner le biberon Élia ? me demanda-t-il

— Évidement !

— Je te présente Violette et là-bas c’est Rose. Prends-là, je vais t’amener ce qu’il faut.

— Marcus, si elles ont un an, pourquoi vous leur donnez encore le biberon ?

— Elles ont l’estomac et la santé fragile, me répondit la femme à la place. On ne peut pas encore leur donner d’aliment solide.

— Avez-vous essayé les yaourts ? Nature évidement mais vous le secouez et c’est liquide. Plus solide que le lait mais toujours liquide. Elles s’habitueront plus facilement comme ça.

— Il faudrait voir avec un médecin mais ce n’est pas bête comme idée. Et sinon, tu es ?

— Élia, Madame. Vous m’avez volé mon partenaire de danse, rigolais-je.

— La fameuse Élia. Moi c’est Isabella mais tu peux m’appeler Isa.


Comment ça la fameuse Élia ? Qu’est-ce que cet idiot avez bien pu dire sur moi à sa fiancée ? Heureusement que j’avais Violette dans les bras, sinon je lui aurais jeté du pain dessus.


— Au fait, chérie, repris Marcus, la Reine accepte de nous marier.

— C’est génial ! Tu lui as dit pour les filles ?

— Juste qu’elles étaient là, répondit-il en me donnant un biberon de lait chaud.

— Ça ne va pas lui rappeler de mauvais souvenir ?

— Je ne pense pas. Et puis elle chouchoute suffisamment Élia pour oublier.

— Je t’entends, Idiot ! répliquais-je.

— Je ne dis que la vérité, princesse.


Cette fois-ci, j’attrapai vraiment une pomme pour lui jeter dessus. D’un mouvement d’épaule, il l’esquiva en rigolant. Derrière moi j’entendis la porte s’ouvrir et une main se posa sur mon épaule. Malgré la bonne odeur des gâteaux tout juste sortie des fours, le parfum de Véra emplit la pièce.


— Est-ce que mon cousin t’embête Élia ? me demanda-t-elle alors.

— Non, Ma dame, répondis-je en tournant légèrement la tête vers elle.

— Qui est cette petite merveille ?

— Ma fille, Majesté, répondit Isa. Violette et Rose avec moi.

— Elles sont toutes les deux magnifiques. Tu me présentes ta fiancée Marcus.

— Oui bien sûr. C’est Isa et on s’est rencontré par hasard sur un chemin. Le père des filles venait de les abandonner au milieu de la route.

— Quel enfoiré ! m’exclamais-je subitement, oubliant que je n’étais plus à la maison.

— Élia, ton langage, me repris Véra.

— Pardon, Ma dame.

— Et vous avez quel âge ?

— Vingt ans, Majesté.

— Et bien, je suis ravie de faire votre rencontre.


Véra passa ses bras autour de mes épaules et m’observa en silence pendant plusieurs minutes


— Je suis impressionnée, mon ange, me chuchota-t-elle à l’oreille me faisant rougir. Tu te débrouilles très bien avec cette petite.

— Merci, Ma dame.

— Si un jour j’ai des enfants, j’aimerais que tu sois leurs nourrices.


Le temps s’arrêta subitement, ne laissant plus qu’elle et moi dans la pièce. Elle était toujours dans mon dos, mais jouait désormais avec mes cheveux, emmêlant ses doigts dans ma coiffure. Pourquoi cette phrase faisait-elle aussi mal ?


— Si j’ai des enfants et qu’il devait m’arriver quelque chose, je veux que soit toi qui les élèves. Je veux que ce soit toi, leur mère de substitution, reprit-elle en chuchotant.

— Ne dites pas ça ! répliquais-je en me levant et en redonnant Violette à Marcus.

— Élia, enchaîna-t-elle en voyant une larme rouler sur ma joue.


Elle se rapprocha de moi jusqu’à ce que je sois bloquée par le mur. Autour de nous, plus personne ne parlait.


— Non ! Ne redites jamais ça ! Mon père est mort, ma sœur a disparu, elle est même peut-être morte à l’heure qu’il est et ma mère est trop loin d’ici. Je n’ai plus que vous, Véra. Je n’ai plus que vous et je ne veux pas qu’il vous arrive quoi que ce soit. Je… je ne pourrais plus vivre sans vous, avouais-je. Ma vie n’aurait plus aucun sens.


— Je suis juste prévoyante, mon ange.

— Arrêtez d’être prévoyante dans ce cas !

— Très bien, reprit-elle en me serrant dans ses bras. Excuse-moi mon ange, excuse-moi.


Une main dans mon dos et une main derrière ma tête, sa présence était rassurante. En me disant ça, elle m’avait fait voir la possibilité qu’il lui arrive un jour quelque chose. La possibilité que, comme mon père et ma sœur avant, elle sorte de ma vie. Ça ne faisait que cinq mois que j’étais à son service et pourtant elle m’était devenue aussi indispensable que ma sœur. Aujourd’hui, mon monde entier tournait autour d’elle.


— Véra, ajouta Marcus, serait-il possible de te parler, seul à seule ?


Véra me regarda avant de reporter son attention sur Marcus. Quittant le confort de ses bras, je m’éloignais en séchant mes larmes.


— Bien sûr. Allons dans les jardins.


Marcus lui tendit son bras et me regarda quelques instants avant de sortir de la cuisine avec Véra.

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