31 mars

2 minutes de lecture

Je découvre sur Google Images des photographies du palais du facteur Cheval à Hauterives (quel nom !) : sans aucun doute, son journal à lui est bien plus splendide que le mien.


Paloma semble bien m'aimer, mais je veux Caroline. Caroline elle, ne désire rien sinon la solitude morbide dans laquelle elle s'ébat. Nous sommes réunis tous les trois ce soir dans un appartement minuscule où Hippie - un caniche - et Mila - une chatte - zigzaguent pour la dix millième fois de leur courte et vaine vie entre les pieds de la table basse. Les déçus de l'amour le sont par triangles, nous en sommes l'illustration banale.


L'ambiance est étrange. Chacun guette l'autre. Cherche le Brutus à venir. Pour endormir les méfiances, endormissons les consciences : les deux bouteilles de vin blanc sont définitivement plus proches des containers pour verre du quartier que de leurs chais originels.


La nuit tombe et les premières notes de guitare avec. Paloma s'empresse de finir les verres de tout le monde : l'ivresse naissante en appelle une plus forte. Caroline me propose de me tirer les cartes. J'accepte mais ne l'écoute pas ; je me crois tout ce qu'il y a de plus subversif. Depuis quand le mépris, la hauteur, sont-ils devenus dans l'imaginaire collectif quelque chose de branché, une véritable capacité à montrer son détachement pour mieux séduire ? Pourquoi faut-il être lointain pour draguer efficacement ? Le temps s'écoule en mensonges - j'y prends ma part - et tout finira en queue de poisson que mangera Mila, avant qu'il ne soit d'Avril.


Caroline part. Elle refuse que je la raccompagne en bas de l'immeuble flou. Le coup de poignard est inesquivable. Il se plante au milieu de tout, au milieu de moi et partout autour. Je flanche à jamais.


J'essaie de sagement m'endormir aux côtés de Paloma : le dernier bus était passé depuis longtemps déjà. La nuit tourne au seul son du caniche insomniaque. Elle ne semble même pas l'entendre. Il me regarde ne pas dormir de ses yeux torves. Je voudrais être lui - son ombre même, comme disait Brel - mais j'ai beau essayer, je reste moi. Paraît-il pourtant que l'amour est un infini mis à sa portée. Jouons le tout pour le tout, essayons une dernière fois. Je me mets à aboyer dans la chambre : Wouf ! Wouf ! Wouf ! Tant pis pour les fous, je leur tiendrai compagnie au bout de ma laisse. Je m'arrête, consterné. Je suis désolant. Je suis désolé. Tout s'effondre.

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