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Cela faisait plusieurs heures qu’elle attendait dans l’inquiétude. Le premier sujet de ses angoisses était les informations importantes qu’elle détenait et qu’on allait tenter de lui arracher ; elle ne se sentait pas du tout prête à affronter cela. Il lui fallait parvenir à s’échapper de cette cellule et des prisons impériales avant qu’on ne l’interroge. Le deuxième objet de ses soucis était plus confus. Elle ne s’expliquait pas ce qu’elle avait entendu lors de son arrestation. L’un des Chasseurs avait fait une allusion à Mikio, avant de coter un nom qui était loin de lui être inconnu : Nikita, le prénom du Lieutenant. Et le sourire qu’il avait eu en le nommant avait suscité en elle des doutes, qu’elle ne parvenait pas à définir clairement. De plus, l’Empereur l’avait identifiée, et elle ne savait pas comment il pouvait la connaître. Que devait-elle en déduire ?

Elle commença à réfléchir aux moyens de s’évader. Elle avait peu de procédés à sa disposition. Tout juste détenait-elle une mini-lame qui avait échappé à l’attention des gardes car elle était habilement dissimulée dans ses cheveux. Elle les détacha et récupéra l’arme. À ce moment, les verrous de sa cellule résonnèrent et quelqu’un entra. La porte se referma. Elle s’était empressée de cacher la lame dans son dos.

« Mikio ? s’étonna-t-elle. Que t’est-il arrivé ? Tu as été arrêté toi aussi ? »

Il marqua un temps, puis répondit :

« Pas exactement.

- C’est-à-dire ? »

Elle commençait à comprendre.

« Alors c’était toi l’espion !

- En effet. » confirma-t-il d’un ton neutre.

Elle fut si stupéfiée qu’elle ne put parler. Il continua :

« Tu as un côté candide assez attachant, mais cette fois il a joué en ta défaveur. Et j’en ai profité.

- C’est déloyal ! s’exclama-t-elle.

- Nous sommes ennemis, je ne te dois rien. asséna-t-il.

- Comment peux-tu être aussi cynique ?

- Je comprends ta déception, mais je ne tenterai pas de me disculper. Tu as parfaitement compris mon rôle. »

Elle se remémora un élément.

« Tu es le Lieutenant, n’est-ce pas ?

- As-tu besoin de poser la question ?

- Je demande une confirmation.

- Je le suis. »

Il paraissait presque s’amuser de la situation. Mais pas tout à fait. Elle avait retrouvé un calme de façade. Baissant les yeux, elle dit d’une voix sourde :

« En ce cas, en te tuant je rendrai un double service à mon royaume et à ton Empire. »

Elle sortit sa mini-lame et tenta de le poignarder d’un geste vif. Il l’arrêta avec une évidente facilité en lui saisissant le poignet, puis esquissa un sourire.

« À l’Empire ? fit-il mine de s’étonner. Que veux-tu dire ?

- La réputation à laquelle tu sembles tenir parle d’elle-même. » répliqua-t-elle.

Sans se départir de son air diverti, il lui lâcha le poignet. En lui laissant son arme.

« Ne tente pas la même erreur deux fois. »

Déterminée, elle affermit sa prise sur sa lame. Tout à coup elle sentit une volonté étrangère prendre le contrôle d’elle. Elle lutta, mais l’emprise sur son âme s’abattit avec plus de force. Sans qu’elle ne puisse combattre l’injonction qui fusait dans son esprit, elle retourna la pointe contre elle. Il la regardait d’un air inexpressif, mais ne la contraignit pas à se frapper de sa propre arme. Peu à peu il cessa d’utiliser son pouvoir sur elle et elle retrouva la pleine maîtrise d’elle-même. Elle le fixa avec aversion.

« Je pourrais en finir avec toi dans l’instant, déclara-t-il froidement, mais je vais encore avoir besoin de toi. Considère cette petite démonstration comme un avertissement. Je pourrais aussi te soutirer les informations qui m’intéressent de cette façon. Mais tu dois déjà suffisamment me haïr, je ne vais pas en rajouter. Je laisse à d’autres le soin de te convaincre de nous faciliter la tâche.

- Tu me dégoûtes. rétorqua-t-elle.

- Le contraire m’eût étonné. observa-t-il d’un ton détaché.

- N’as-tu aucun remords ?

- Le regret est un luxe. Et si tu comptes me faire culpabiliser, tu perds ton temps. À moins que ce ne soit toi qui, malgré ton envie de meurtre et ta haine, soupire après tous ces bons moments passés ensemble. »

Il avait insisté moqueusement sur les derniers mots. Elle voulut répliquer vivement, mais ne trouva pas la repartie. Oui, elle aurait voulu qu’il ne soit pas un traître, ou même qu’il ait continué de lui mentir et la laisse s’illusionner. Mais il avait brisé le lien que quelques heures plus tôt elle défendait, et paraissait même avoir pris plaisir à le faire. Il était donc tel qu’on le disait. Glacial.

« À présent, donne-moi cette lame. reprit-il. Je voudrais éviter que tu ne tentes un suicide. »

Elle hésita. Finalement, elle la lui tendit à contre-cœur. C’était moins humiliant que s’il avait utilisé sa capacité spéciale. Il eut l’air satisfait et quitta la cellule. Et elle se retrouva à nouveau seule. Mais sa situation avait empiré.

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