La légende d'Himeko

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Il y a très longtemps, dans un pays lointain et enchanteur, vivait une magnifique jeune fille du nom de Himeko. C’était la fille de l’Empereur de la région de Kume. Elle était belle, aussi fraîche et pure qu’une fleur de cerisier. La nature l’avait dotée, à sa naissance, du don de fertilité. Partout où elle passait, la nature se réveillait pour elle et les fleurs se paraient de milles couleurs chatoyantes pour son plaisir, si bien que sa main était convoitée par tous les hommes du pays.

Chaque jour, ils étaient nombreux à se presser à la cour de l’empereur dans le seul but de l’apercevoir. Chacun y allait de sa méthode pour tenter d’attirer son attention et obtenir les faveurs de son père. Cependant, la Belle ne daignait jamais et aucun n’attira jamais son attention. Elle préférait à la compagnie des hommes, celle de la nature et des animaux. Elle passait de nombreuses heures dans la forêt du palais, à se promener dans des lieux emprunts de féeries.

Un jour, alors qu’elle paressait à côté d’une petite mare, baignant ses pieds dans l’ondine fraîche, jouant avec les petits poissons multicolores, elle fût surprise par l’arrivée de deux hommes à la mine austère. C’était des bandits de grands chemin qui, attirés par les rumeurs de sa beauté avaient décidé de l’enlever pour la vendre au plus offrants. Devant leur aspect repoussant, elle prit peur et s’enfuit à travers bois. La forêt, mue par son étrange pouvoir, tenta de la dissimuler au regard de ses poursuivants en lui créant des passages dérobés. Les fourrés se refermaient derrières elle, se parant d’épines acérées pour ralentir les malfrats qui déjà la rattrapaient. Elle ne s’était jamais aventurée si loin dans la forêt et se sentait perdu, ralentie par ses amples vêtements.

Quand elle passa sous l’arche d’un Torii sacré l’atmosphère sembla se mystifier. Soudain le sol se déroba sous elle et elle roula le long d’un talus puis chuta à travers la petite ouverture d’une grotte naturelle. La cachette lui permit d’échapper à ses poursuivants mais elle fut bien en peine de remonter car les parois étaient trop abruptes.

Les mains en sang, après maintes tentatives vaines, elle ne put que se résigner et se mit à pleurer en comprenant qu’elle était coincée ici pour toujours et que personne ne la trouverait jamais.

Attiré par les pleurs de la jeune demoiselle un petit renard roux curieux passa sa tête par-dessus le trou. Intriguée la jeune fille cessa immédiatement de pleurer.

— Eh bien, cet endroit ne sied pas à une personne de votre délicatesse.

Quelle ne fut pas la surprise d’Himeko lorsqu’elle entendit ces mots sortir de la bouche du renard.

— Par tous les Dieux, vous pouvez parler ? Quel tour mon esprit me joue-t-il là ?

— N’aie point peur douce enfant, je suis simplement un esprit renard. Tu te trouves en ces lieux dans le domaine des Kitsune.

Himeko se remémora les légendes que sa mère lui avait mainte fois conté, quand elle était enfant, sur ce lieu. On disait qu’au cœur de la forêt commençait le domaine des Renards. C’était un lieu empli de magie et peuplé de renards doués d’intelligence et de ruse et dont la mission était de veiller à l’équilibre de la forêt. La légende les décrivait comme des êtres ni profondément bon et ni foncièrement mauvais, capables de bonté comme de ruse pour mener à bien leur mission.

— Doux et beau renard, auriez-vous l’amabilité de m’aider à sortir de ce trou ? Voyez-vous, je j’en suis incapable moi-même.

— Cela est en effet dans mes compétences, cependant un esprit obtient toujours compensation pour une faveur accordée.

Elle songea qu’il ne devrait pas être bien difficile de contenter un renard, aussi s’empressa-t-elle d’accepter le marché.

— Mais c’est tout naturel, vous aurez tout ce que vous voulez lorsque je serais revenue au château de mon Père l’Empereur.

— Fort bien, ferme les yeux et je te sortirais de ce mauvais pas.

Himeko s’exécuta et lorsqu’elle ferma les yeux elle senti un souffle frais l’envelopper.

— C’est bon, tu peux les rouvrir.

Comme par magie elle était sortie de la grotte et se trouvait en haut du talus. Guidée par son ami le renard, elle retrouva rapidement son chemin et ne tarda pas à être en vue de son Palais.

— Tu dois maintenant tenir ta promesse Princesse.

Elle se rendit auprès de son Père et lui conta toute l’histoire. Ce dernier ordonna que l’on retrouve les brigands et qu’on les émascule et accorda une entrevu au renard. Le Père d’Himeko était un homme vaniteux, toujours en quête d’un moyen d’affirmer son pouvoir aussi était-il fortement intéressé par ce renard parlant.

— Cher renard, je me dois de vous remercier pour vous être porté au secours de mon unique fille. Il va de soi que vous méritez une récompense. Faites-moi part de vos désirs, s’il vous faut des terres ou de la nourriture, je peux les obtenir en un claquement de doigts.

— Vous êtes bien aimable, mais les récompenses que vous me citez sied aux humains et je n’en ai cure. Pouvez-vous me dire ce que je ferais de terres alors que mon domaine est la forêt et que j’y trouve toute la nourriture dont j’ai besoin ?

L’Empereur se trouva fort dépourvu par les propos tenus par le renard.

— Que désirez-vous donc que je sois capable de vous offrir ?

— Je ne souhaite rien d’autre que la main de votre fille.

Himeko poussa un cri d’horreur. Elle ne voulait en aucun cas devenir la femme d’un renard, fut il parlant. L’Empereur ne pouvait bien évidement accepter une telle requête. L’homme qu’il choisirait pour sa fille se devrait d’être d’un rang égal et leur union devra lui être bénéfique. Cependant il ne pouvait pas refuser sans vexer le renard ni sans revenir sur sa parole devant public. Aussi dû-t-il trouver une ruse pour se sortir de ce mauvais pas.

— Vous m’en voyez fort contrit mais je ne peux accéder à votre requête car ma fille est déjà promise à un autre et il en va de mon honneur de respecter l’engagement. Demandez-moi n’importe quoi d’autre et je m’en acquitterai.

— Je comprends votre position mais il n’y a rien d’autre que je veuille. Je vais donc partir mais sachez que je n’oublierais pas votre dette et qu’un jour je reviendrais réclamer mon dû.

Pendant les premières semaines qui suivirent l’Empereur et Himeko ne purent trouver le repos de crainte que l’esprit revienne ayant découvert la supercherie. Et comme rien ne se passait, ils finirent par oublier cet incident et la vie repris son cour au Palais.

Quelques temps plus tard se présenta à la cour de l’Empereur un magnifique jeune homme. Jamais on n’avait vu beauté pareil chez un homme, il faisait pâlir d’envie toutes les dames. Il se présenta comme le Prince Kaï, disant venir d’un lointain royaume, attiré par la beauté de la princesse Himeko dont on lui avait vanté les mérites. Il raconta à l’Empereur être instantanément tombé amoureux de Himeko à qui il ne cessait de penser depuis qu’il avait appris son existence et avoir fait tout ce chemin dans l’espoir de pouvoir l’épouser.

Pendant des jours et des jours il raconta les milles et unes merveilles de son château, la richesse et la splendeur de son pays et tout l’or qu’il était prêt à offrir pour obtenir la main de sa belle. Ses boniments étaient tels que l’Empereur fut vite conquit et même l’inébranlable Himeko ne put résister à ses charmes. Très vite un mariage fût arrangé et le Prince Kaï couvrit l’Empereur de richesse comme il l’avait promis.

Toutes les parties pensaient avoir tiré le meilleur profit de l’affaire mais alors que le Prince et la Princesse allaient partir en lune de miel, le Prince Kaï se transforma en renard devant les yeux ébahis de tous.

L’Empereur entra alors dans une colère noire en reconnaissant l’esprit.

— Quelle est cette supercherie ?

— Il n’y a là aucune supercherie, je suis Kaï, prince des Kitsune et je règne en maître sur la forêt. Vous avez reçu l’or promis et le seul à avoir manqué à sa parole ici c’est vous. Il est trop tard maintenant, Himeko est mienne pour toujours et sera la Princesse des Kitsune à mes côtés.

Et tandis qu’il prononçait ces mots, Himeko se transforma en une magnifique renarde blanche. Le prince Kaï disparut alors dans une bourrasque de vent, emmenant avec lui sa belle transformée. L’Empereur ne put rien faire et compris bien trop tard qu’il n’aurait pas dû mentir à un esprit retors.

On raconte que de nos jours, en s’égarant dans les bois derrière le Palais à la fin de l’hiver, il est possible d’apercevoir deux renards se promener. L’un roux et l’autre blanc et que la nature se pare de ses habits de printemps dans leur sillage.

Et si d’aventure vous croisez la route d’un renard en difficulté, ne passez pas votre chemin et alors peut être recevrez-vous la bénédiction de la Princesse Renard au pelage aussi immaculé que sa pureté.

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