Chaleur

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J’étais là assis sur le sol glacé, le dos appuyé contre un bâtiment. Le trottoir sur lequel je me trouvais était battue par les vents. J’avais la sensation, à chaque rafale, qu’un millier de petites aiguilles de glace venaient s’enfoncer partout dans mon corps. Laissant le froid s’insinuer doucement mais surement en moi. Faisant bleuir mes lèvres craquelées. Coupant la circulation du sang dans mes extrémités. Je ne pouvais plus bouger mon corps, j’étais ankylosé et je me transformais peu à peu en statue de glace. Le ciel d’un gris bleuté était vide et terne. Soudain, doucement, tranquillement et dans un silence absolu des flocons de neige commencèrent à tomber.

Dans la rue il n’y avait personne, pourtant un bruit me dérangeait. D’où venait-il ? Je ne voyais rien dans les alentours capables de produire de tels sons. Pourtant ce bruit venait bien de quelque part ! Je me rendis alors compte que ce son si gênant, c’était moi qui le faisait, et que je serais bien incapable de m’arrêter. Je claquais des dents, tellement j’étais congelé !

Je me rapprochais de l’hypothermie. Avec un froid pareil, personne n’était assez fou pour trainer dehors, et surtout pas habillé de guenilles comme moi. Que devais-je faire ? Si je restais là, c’était la mort assurée. Je devais bouger mon corps, faire circuler mon sang et tenter de me réchauffer par tous les moyens. Bouge. Ce mot tournait en boucle dans ma tête mais mon cerveau avait l’air incapable de transmettre l’ordre à mes muscles. En tremblant j’effleurais de mes doigts nu ma peau. Elle était froide. J’avais l’apparence d’un cadavre, la température d’un macchabé et bientôt je serais mort pour de bon. Ce constat me donna suffisamment d’énergie et je parvins à me dresser sur mes jambes branlantes. Tout en m’appuyant au mur qui me servait de guide, je parcourais la rue.

A travers les fenêtre j’apercevais du rouge, du jaune, de l’or, de si belles couleurs projetées par le feu dansant dans la cheminée. Un cocon de chaleur qui contrastait avec mon univers de glaçons. Je les enviais tellement, ils ne se rendaient pas compte de la chance qu’ils avaient. Un toit, un âtre, un feu, la chaleur d’une famille… tout cela vous semblait acquis, naturelle, jusqu’à ce que tout vous soit retirée sans rien en retour qu’un grand trou glacée et vide dans la poitrine, et tout le froid extérieur n’était rien comparé à celui qui me rongeait de l’intérieur. Ce grand souffle glacé qui soufflait mon espoir et ma volonté de vivre comme un courant d’air souffle des bougies.

Soudain une odeur. Je tournais lentement la tête de peur qu’un mouvement trop brusque ne face craquer ma peau congelée. J’étais en train de m’appuyer sur la devanture d’un café, et l’odeur chaude et alléchante venait de l’intérieur. Je regardais l’enseigne. Je n’avais jamais vu ce café ici avant. Etait-il nouveau ? Il s’appelait « Le café qu’il vous faut ».

Je me décidais à entrer, juste le temps de me réchauffer un peu avant d’être jeté dehors. Je m’assis à une table. Aussitôt une serveuse s’approcha de moi. Ils sont rapides pensais-je, persuadé que c’était pour me mettre à la porte. Au lieu de ça elle déposa devant moi une tasse de café. Je ne me fis pas prier et la saisi prudemment pour la boire. Curieusement le café était juste à la bonne température. Lorsque le liquide chaud s’écoula dans ma gorge il me réchauffa. Je pouvais presque voir les vagues de chaleurs faire fondre les cristaux de glace qui s’étaient accroché à moi.

Mais c’était bizarre, le café était vide, la serveuse avait disparu et je sentais la fatigue m’emporter. Ce café n’avait jamais existé, je m’en rappelais maintenant. Il n’était pas nouveau, il n’existait tout simplement pas. A part peut-être dans mon esprit mourant. Car oui, j’étais en train de mourir de froid. Mais une chose était sûr, lorsque la dernière bougie de vie fut soufflée en moi et que je m’éteignais, la seule chose qui me vint à l’esprit fut la chaleur de ce café imaginaire, pure fantaisie de mon cerveau congelé.

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