Chapitre VI : partie II/II.

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  Allongée sur le dos, son bras droit posé nonchalamment sur le front, Elisabeth fixait le plafond. Impossible de trouver le sommeil. L’image de Thibault quittant le bureau après avoir remis le livre en place hantait son esprit. Il savait. Bien sûr qu’il savait ! Il savait toujours quand elle essayait de lui cacher quelque chose. Dès le début, dès le premier regard elle s’était sentie vulnérable avec lui. Il lisait en elle comme dans un livre ouvert. C'est à partir de ce moment là que le jeu des masques s’était mis en place de lui-même. C’était drôle de résister, de se faire croire des choses, de se chercher en public pour se trouver une fois seuls. Elle lui avait tout donné.

   C’était son sourire, elle se faisait toujours avoir. Peu importe ce qu'il avait pu dire ou faire, son sourire finissait toujours par avoir raison d'elle et de ses principes.

  Les draps se mirent en mouvement, Marc venait de se tourner vers elle. Elisabeth posa son regard sur le visage endormi de son mari. Marc était beau, c’est vrai. Ses cheveux bruns courts tout bouclés l’avaient rapidement fait craquer. Elle adorait y passer sa main, les enrouler autour de ses doigts. Mais ils étaient plus épais que ceux de Thibault. Ceux de Thibault. Ses mains y avaient passé des heures, jouant avec, les tortillant, les décoiffant, s’y accrochant parfois. Liz ferma les yeux, fort, très fort, tentant de chasser les images du passé qui l’assaillaient. Mais c’était impossible.

  Excédée, elle se redressa vivement et quitta le lit conjugal. Elle avait besoin d’air. Vite !

  La nuit était étouffante. Le vent était aux abonnés absents et la température refusait de redescendre, faisant peser ses 30° sur quiconque osait s’aventurer dehors. Et Elisabeth n’échappait pas à la règle. La sueur coulait le long de son dos, collant son t-shirt à sa peau au fur et à mesure qu’elle avançait. Au début, cette chaleur l’avait surprise et elle avait failli faire demi-tour, mais elle s’était souvenue de l’atmosphère qui régnait chez elle. Finalement, la chaleur n’était pas si étouffante.

  Après un quart d’heure de déambulation, Liz avait fini par s’arrêter sur un banc. Doucement, elle avait sorti son carnet de son sac, prit une grande inspiration et elle avait lu. Lu, encore et encore. Il avait raison, c’était eux. Cette nouvelle c’était tout ce qu’elle ne pouvait pas dire, tout ce qu’elle ne devait pas s’avouer. Mais ce soir, alors qu’elle errait seule à travers la ville, elle ne pouvait plus ignorer ce qu’elle ressentait, là, là tout au fond de son être. Elle voulait le toucher, le sentir près d’elle, comme avant.

  Son passé venait de la rattraper. A moins qu’il ait toujours été là, caché quelque part à attendre le bon moment pour surgir et la ramener à lui. A cet endroit, à leur endroit. Et si on changeait la fin ?

  Thibault n’en avait pas cru ses yeux. Par trois fois il avait relu le message, à voix haute. Elle voulait le voir, là, maintenant, à deux heures du matin. Pendant un instant, il avait pensé être en train de rêver et il avait eu peur de tomber en se levant pour se réveiller en sursaut une seconde plus tard. Mais il avait posé le pied à terre et rien ne s’était passé. Il réalisa alors que la chance de sa vie venait de s’offrir à lui et qu’il n’en aurait peut-être pas d’autre. Il quitta le lit où il était en train de lire pour s’habiller et se mettre en route aussi vite qu’il le put, laissant tout en désordre sur son passage, ne prenant que quelques secondes pour lui répondre : où ?

  Arrivé devant la chambre 115, il frissonna. C’était leur chambre. Elle lui avait donné rendez-vous là où tout s’était terminé 10 ans plutôt. Rien n'avait changé. Le motel avait toujours l'air aussi miteux et mal fréquenté. Le peu de néons qui fonctionnaient éclairaient le parking dans grésillement dis-harmonieux et les quelques voitures qui y étaient garées donnaient à sa berline des airs de Ferrari. Thibault sourit. Il ne la retrouverait peut-être pas intacte, mais qu'importe, il attendait ce moment depuis trop longtemps.

  Thibault prit une grande inspiration et ouvrit la porte. Elle était là, assise sur le lit, les mains posées sur les genoux. Il suivit son regard. Elle fixait ses pieds chaussés dans des sandales à talons compensés. Ses yeux verts remontèrent le long de ses fines jambes nues pour trouver son short marine. Il poursuivit son ascension, dévorant ce t-shirt blanc rendu transparent par l'humidité. Elle frissonna, relevant enfin les yeux qu'elle planta dans les siens. Elle lui sourit. Il ferma la porte derrière lui.

  Doucement, Thibault se rapprocha d'Elisabeth, son regard toujours accroché au sien. Elle se leva pour lui faire face. Leurs corps étaient si proches qu'elle pu sentir sa respiration qui s'emballait sous le coup de l'excitation. D'un geste tendre, Liz passa sa main dans les cheveux de Thibault, puis elle s'attarda un instant sur sa joue avant de descendre se poser sur son torse. Elle exerça une légère pression sur son torse et se hissa sur la pointe des pieds pour murmurer à son oreille :

« Et si on changeait la fin ? »

  Instinctivement leurs corps se retrouvèrent, se plaquant l'un contre l'autre alors que leurs lèvres venaient de s'unir dans un baiser passionné. Plus rien n'avait d'importance. Marc n'existait plus, elle n'était plus Lizzie. Elle était Liz, jeune étudiante issue d'une famille de cadres qui s'abandonnait dans les bras d'un fils à papa désinvolte. Un frisson parcourut chaque parcelle de sa peau. C'était le frisson de l'interdit, du danger.

  Élisabeth passa ses mains dans la nuque de Thibault, s'y agrippant de toutes ses forces. Au diable l'interdit ! Sa peau nue contre la sienne, c'était tout ce dont elle avait envie, tout ce dont elle avait besoin.

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