... et effet papillon

3 minutes de lecture

Des cravates noires. Et merde - fut votre première pensée quand vous retrouviez vos esprits. Vous étiez en salle de réunion - comme tout le reste ici, une certaine froideur s’en dégageait. Tout était aseptisé, blanc, ou métallique. Une pauvre plante, qui n’avait sans doute jamais vu le soleil, crevait dans son coin. D’ordinaire, elle ornait la table devant vous, comme en témoignait les traces d’eau et de terreau qui n’avaient pas été enlevées. Vos deux compagnons de cellule n’avaient rien d’aimable non plus. Ils discutaient entre eux, mais s'interrompent quand ils remarquent que vous reprenez conscience.

- Bien. Vous êtes matricule GFC-230240, division CRM, Corrections et Réparations Mécaniques, correct ?

- Correct.

Vous n’étiez pas certain qu’en dire plus était dans votre intérêt - la présence silencieuse mais dissuasive d’un robot autour de la table -, et vous n’aviez encore aucune explication sur votre présence … ici.

- Il a été porté à la connaissance du service RDD, Recherche, Développement et Déviances - il fit un signe pour les désigner, avant de baisser le nez dans ses notes - d’un comportement non protocolaire de votre part …

Vos sourcils témoignèrent de votre surprise. Il n’y avait pas franchement de protocoles, au garage, tant que les machines sortaient de votre atelier conformes et prêts à être renvoyés sur le front … Le deuxième continua :

- Il semblerait que vous témoignez de l’affection pour vos machines, correct ?

- Je … ce sont des machines. J’apprécie mon travail.

Les deux hommes ne parurent pas franchement apprécier ma réponse, mais semblaient pas très confortables avec les notes qu’ils avaient. Si vos réponses étaient surveillées, leurs questions l’étaient sans doute tout autant.

- Un témoin a rapporté vous avoir vu … parler à, et … tapoter les robots de manière familière. Correct ?

- Correct.

Si apprécier les robots quadrupèdes de la même manière qu’un chien faisait de vous quelqu’un de non protocolaire, il faudrait également qu’on vous renseigne sur la partie du règlement qui l’interdisait. Mais vous pouviez difficilement faire cette remarque.

- Pourquoi ?

Des grincements se firent entendre de l’autre côté de la porte close. Des bruits distincts, distants, inhumains. L’on essayait d’ouvrir la porte, et cela vous apprit que celle-ci était verrouillée. Puis le silence reprit sa place.

- Je travaille seul, la plupart du temps. Je suppose que leur parler m’occupe l’esprit. Je dois préciser que ma spécialité au sein de la division CRM est celle des robots quadrupèdes, et que ces robots sont sans doute plus intelligents que des animaux dont ils sont souvent inspirés. Je ne peux qu’apprécier et m’émerveiller de cette technologie.

- Certes … mais vous n’êtes pas vétérinaire. Est-ce que vous avez évoqué votre solitude à vos responsables ? Au médecin, au psychologue ? Cela n'apparaît pas dans votre dossier.

- Non.

- Pourquoi ?

L’incompréhension continuait. Que répondre à ça ?

- Je viens de le réaliser, je pense. Grâce à vous. Pouvez-vous prendre un rendez-vous avec un médecin ?

L’un d’eux acquiesça, et en deux temps, trois mouvements sur sa tablette, le problème était résolu.

- Bien. Désormais … pensez-vous que votre comportement ait pu impacter celui des robots que vous avez réparés ?

- Non.

L’air pincé du costume noir s’accentua. Vous ne compreniez pas comment parler à vos amochés et caresser leurs corps d’acier pouvait les impacter. N’était-ce pas là toute la complexité du travail de vos collègues des divisions d’Intelligence Artificielle ? Faire en sorte que les comportements des civils n’affectent pas les propriétés militaires ?

Les types du RDD n’eurent pas le temps de vous contredire, ni de vous expliquer leurs craintes.

La porte fut violemment arrachée de ses gonds, et s’écrasa dans le plâtre du mur d’en face.

Vous pouviez reconnaître le bruit d’une clé de douze retentissant contre le sol entre mille.

Vous n’aviez pas besoin de lire les microscopiques gravures pour identifier les robots qui trônaient désormais dans la pièce. Lassie vous avait rapporté son bâton. Et quand elle vous a trouvé, enfermé, elle est partie chercher de quoi vous libérer. Ce qui vous laissait admiratif … et dans une merde monumentale.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Maelys ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0