Il était tard lorsque Norman rentra au chalet. Le froid polaire ayant eu raison de lui, harassé, il se déshabilla avant de pénétrer sous le plaid froid et la couette qui devraient le garder en vie jusqu'au lever du jour. Le lendemain, il allait devoir oursuivre ses investigation ; il lui fallait absolument reprendre des forces. Il s'endormit, à peine la tête posée sur l'oreiller, d'un sommeil sans rêves.

  Il se réveilla, comme à son habitude, à six heures, quelques minutes avant que retentisse la sonnerie de son réveil.

  Après un solide petit déjeuner, thé et toasts beurrés, agrémenté d'œufs au lard, de jus d'orange ainsi que d'un grand chocolat chaud, il se glissa sous la douche. Il revêtit ensuite sa combinaison matelassée, les sous bottes fourrées, les gants isothermes et tout ce qui lui permettrait d'affronter les températures glaciales qui sévissaient au dehors.

  Les différents appareils de mesure disposés autour du chalet avaient enregistré un certain nombre de données qu'il analyserait ultérieurement. Mais pour l'instant, son regard était attiré par une faille qui lui parut bien plus large que la veille. En s'approchant, il constata qu'elle avait en effet triplé. Elle était maintenant presque assez grande pour qu'il puisse s'y introduire.

  Ce fait était vraiment des plus étranges, c'était comme si la glace à cet endroit fondait plus rapidement qu'ailleurs.

  Pensif, Norman en récupéra un morceau qu'il mit dans un récipient destiné à être placé au congélateur, puis rentra se mettre au chaud afin d'analyser tranquillement les données recueillies.

  Avant toutes choses et après s'être déshabillé, il joignit par radio la station Byrd pour leur communiquer les chiffres et leur faire part de l'agrandissement de la crevasse ; ils lui confirmèrent que le satellite avait décelé une caverne sous la glace au niveau de la roche.

  Norman se dit que si la faille continuait à s'agrandir, il pourrait descendre voir ça de plus près. Mais pour l'heure, il voulait examiner cette étrange glace.
  Sans plus attendre, il ressortit le fragment qu'il avait extrait de la surface lisse puis le plaça sous son microscope. A première vue, tout était normal. Cependant, en y regardant de plus près, il aperçut quelque chose de surprenant : certaines des gouttes formant le morceau étaient légèrement bleutées. À l'aide d'une pipette en verre, Il les recueillit pour les mettre dans un tube à essais qu'il glissa dans le spectromètre de masse afin d'en déterminer la composition chimique. Il lui faudrait patienter avant d'avoir les résultats, mais il se sentait comme à l'aube d'une fabuleuse découverte qui propulserait sa carrière. Norma allait être fière de lui et enfin, elle consentirait à quitter son abruti de mari, Norman le ressentait jusqu'au plus profond de son être. En pensant à son amante, le chercheur éprouva un léger frisson de plaisir et se mordit la lèvre inférieure. Bientôt, il serait de nouveau près d'elle.
  La sonnerie de fin d'analyse retentit. Norman jeta un coup d'œil sur les résultats, puis sursauta. L'appareil, pourtant récent et parmi les plus précis existant, affichait un rapport deutérium / hydrogène supérieur à celui de l'eau des océans. Il ajoutait que ces molécules d'eau étaient additionnées d'une substance inconnue. En fait, cette eau avait un ratio D/H correspondant à celui de certaines comètes. Il se gratta la tête d'un geste machinal, comme il le faisait toujours lorsqu'il était confronté à une situation qui le dépassait, avant de reporter son attention sur les résultats.

  Était-il possible que personne n'ait découvert la présence ici d'une partie de comète et qu'elle soit restée prisonnière de la glace durant si longtemps ? Et si c'était le cas, avait-elle pu "suinter" à tel point que l'eau présente en elle se soit mélangée à la glace terrestre ?

  Fatigué par ces conjectures qui demeureraient, pour l'heure, stériles, Norman se frotta les yeux et, regardant sa montre, s'aperçut qu'il était très tard. Laissant son travail en plan sur le bureau, il rejoignit le lit glacial qui l'attendait. Pourquoi ne l'avait-on pas envoyé au soleil pour une fois ?

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Ad'H & JI 01/09/20