Chapitre 23 : Acrobaties diplomatiques

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Coucou ! Voici le chapitre 23 des aventures d'Adrick, cadeau pour mon anniversaire (oui, c'est contradictoire xD). Je vous avoue qu'en ce moment c'est pas trop la forme niveau écriture à cause des partiels, mais je fais au mieux. Désolée donc si la qualité de ce chapitre est un peu moins bonne que d'habitude, il m'a demandé une grosse mobilisation d'inspiration et je vous avoue que l'écriture a été compliquée. Mais bon, au moins, j'ai produit quelque chose, contrairement à Macédoine où c'est juste le blocage. Ça reviendra quand les exams seront terminés, ne vous inquiétez pas :) Bonne lecture !


LE CHANT DE L'OISEAU SOLITAIRE

Chapitre 23 : Acrobaties diplomatiques


Le garde de l’entrée du camp tint parole et m’apporta la dérogation pour partir vers Lothariel au réveil, le lendemain matin. Je rangeai le précieux sésame dans mon sac et, excité comme au premier jour de mon aventure, je choisis de préparer mon voyage avec soin. Contrairement aux hommes, les elfes n’ont pas d’argent. Leur commerce se base sur les échanges de biens et de services. Puisque je n’avais pas énormément de biens, je mis mes maigres compétences en soutien à la communauté. Je gardais les enfants lors des chasses, j’aidais à la récolte de pommes dans les arbres cultivables, je faisais la lessive pour les vieilles dames qui ne pouvaient plus se baisser… Et je me suis même retrouvé une fois cobaye lors d’un spectacle de magie organisé par un mage illusionniste un peu fou. Je peux vous dire que vous ne faites pas le fier quand vous voyez vos jambes flotter au-dessus de votre tête sans rien y comprendre. Une expérience traumatisante.

Ce petit manège dura cinq jours au bout desquels j’avais amassé plus que tout ce que je n’avais jamais eu : des vêtements de voyage amples et neufs, une écharpe bleue, une carte, des rations de fruits et légumes séchés, des gourdes de cuir pour boire et des gants en cuir aux griffes cloutées rétractables pour me défendre en cas d’attaque au corps à corps. Mais la pièce maîtresse de ma nouvelle collection restait une épée courte à lame courbe, dans un style elfique, tellement légère qu’elle pouvait aussi être lancée. Sa poignée était incrustée de morceaux de lapis lazuli d’un bleu puissant dans lequel mon regard se perdait parfois. Le forgeron m’expliqua que je devais lui donner un nom, une coutume de leur peuple, pour porter bonheur. Je choisis “Oiseau de feu”. Il avait soigneusement inscrit le nom sur la lame, en langue elfique ancienne. Cette arme était magnifique et pendait fièrement à ma ceinture nuit et jour. La simple pensée de m’en séparer m’angoissait. En échange de cette petite merveille, j’avais arraché une des plumes de mes ailes, puisqu’il y tenait tant.

La plume tranchée a repoussé presque immédiatement, à mon grand étonnement. Je n’ai rien senti lorsque je l’ai arrachée, ni lorsqu’elle s’est reformée. Par ailleurs, j’avais remarqué, depuis quelques jours, que je devenais plus résistant à la douleur et plus fort. Je parvenais à soulever des charges importantes sans grande difficulté, je me coupais parfois les mains en taillant les roseaux devant les cabanes centaures sans m’en apercevoir avant de longues minutes. Ces changements m’émerveillaient autant qu’ils m’inquiétaient, d’autant plus qu’ils n’étaient pas visibles physiquement. J’avais toujours mon corps et mon visage d’adolescent, je ne grossissais pas et mes muscles ne grossissaient pas comme ceux saillants des centaures qui me faisaient tant rêver. Je n’avais cependant plus assez de temps pour m’en soucier. Mes journées étaient éreintantes et je peinais difficilement à me lever le matin pour repartir pour une nouvelle journée de labeur.


Dans l’après-midi du sixième jour, alors que je gardais de jeunes elfes qui s’amusaient au bord de l’étang sous mon regard vigilant, une grande agitation secoua le camp. Elfes, centaures, créatures magiques se précipitaient tous vers l’orée de la forêt. Les enfants ne tardèrent pas eux aussi à vouloir découvrir ce qu’il se passait et je sautais sur l’occasion pour rejoindre les autres. Avec l’aide des mioches, je me frayais un chemin facilement vers les premiers rangs. On n’estime pas assez le potentiel charismatique d’enfants tristes de ne pas pouvoir voir le spectacle, j’en profitais avidement.

Au bout du sentier, des hommes, ou plutôt des elfes en armures dorées se rapprochaient. Plus ils avançaient et plus les murmures s’élevaient dans la foule. Dans les bribes de conversation, je compris que quelque chose n’allait pas et, en effet, les soldats paraissaient épuisés. Leurs visages sales étaient fermés et je compris rapidement que ce que j’avais pris à l’origine pour des charrettes de marchandises derrière eux étaient des transports de corps, soigneusement enveloppés dans des draps blancs. Il y eut plusieurs frémissements dans la foule, de femmes notamment, qui s’empressèrent de pousser tout le monde pour courir vers le convoi. Certaines se jetaient au cou de soldats épuisés qui se mettaient à pleurer à leur tour, d’autres tombaient à terre en hurlant de douleur et de tristesse, rapidement encerclées par d’autres gardes compatissant pour les aider à se relever.

Tout à la fin du cortège, un homme dans une armure plus blanche que les autres passa devant la foule désormais silencieuse. Je ne le reconnus pas immédiatement tant son visage était abîmé, mais c’était bien lui : Iphranir. Il boîtait difficilement vers les familles en pleurs. Alors que la foule se dispersait, je restais un moment à le regarder glisser quelques mots aux oreilles des femmes effondrées, avant de prendre les enfants par la main et rebrousser chemin, l’esprit plein de questions. Le reste de l’après-midi se passa dans un silence de mort. Les enfants, anxieux, attendaient de savoir si leur père faisait partie des victimes et ne riaient plus du tout. Leur mère les récupéra avec plusieurs heures de retard et, à ses yeux rougis par les larmes, je compris que la soirée allait être éprouvante pour elle. Par respect, je la laissais annoncer la mauvaise nouvelle avant de regagner ma tente.


Je sursautais en poussant la toile de la tente. Il était là, au-dessus de mon lit, les sourcils froncés sur mes affaires qu’il avait étalé sur ma paillasse. Il se retourna quand le rayon de lune traversa l’espace et nous nous regardâmes dans les yeux pendant de longues secondes sans rien dire. Son expression était indéchiffrable, je ne sus pas s’il était en colère, surpris ou content de me voir. Je n’y comprenais rien. Un certain soulagement était clairement visible sur son visage, mêlé à une rancoeur tenace.


“Alors c’était vrai, dit-il doucement. Tu es revenu jusqu’ici.”


Je baissais les yeux, mal à l’aise et inquiet. Qu’est-ce que j’étais censé répondre ? Tout ce que je voulais lui dire était comme bloqué quelque part dans ma tête sans que je ne puisse l’expliquer. J’étais figé sur place, tétanisé par son regard vert puissant et autoritaire que j’avais tant craint et détesté ces derniers mois. Pourtant, je n’avais plus l’impression de lui en vouloir. Cet homme ne ressemblait en rien à celui que j’avais croisé quelques mois plus tôt. Son regard me paraissait éteint, et une grand cicatrice encore fraîche lui traversait son visage du front jusqu’à la lèvre inférieure. Sa respiration sifflait et il ne tenait debout qu’avec l’aide d’une béquille de bois abîmée. Tout comme lui, il avait connu de mauvais jours récemment.


“Qu’est-ce qui s’est passé ? me demanda t-il en pointant mes ailes de la tête, sans animosité, juste curieux. Je vois que les derniers jours n’ont pas été tendre non plus avec toi.”


Les grands esprits se rencontrent.


“Parce que ça vous intéresse maintenant ? répondis-je avec une arrogance que je ne me connaissais pas. Quand vous m’avez abandonné au pied de cet arbre, c’est pas l’impression que j’avais. Vous ne m’avez même pas laissé une chance de parler, de vous expliquer.

— J’ai fait ce que je pensais le plus juste. J’ai eu tort, c’est vrai. Mais je ne regrette pas de l’avoir fait, tout simplement parce que ça m’as permis de réaliser que ce n’était pas qu’une passade entre vous deux. Je ne suis pas ton ennemi, quand bien même tu as l’air de le penser.”


Je n’étais absolument pas certain de sa sincérité. Son changement de comportement était trop abrupte, trop soudain pour me paraître réel. Je gardais le silence un instant pour essayer de rassembler ses paroles dans ma tête. Tout cela n’avait aucun sens, mais si je voulais me montrer à la hauteur, je préférais avoir Iphranir de mon côté, ne serait-ce que pour rebondir si l’elfe s’avérait menteur.


“Je ne sais pas, répondis-je à sa question initiale, en pointant mes ailes. J’ai voulu aider des gens, on m’a tué et je suis revenu comme ça. Du jour au lendemain, je suis devenu un héros pour tous ces gens, mais j’ai aussi l’impression que certains veulent abuser de ce don pour se l’approprier, appuyai-je d’un ton implicite.

— C’est normal, répondit-il. Dès lors que tu fais preuve de supériorité sur le plan de la guerre, n’importe lequel de tes ennemis cherchent à devenir ton nouvel ami. Fais attention à toi. Ils seront de plus en plus nombreux et j’en sais quelque chose.”


Il tendit la main vers moi, un demi-sourire sur le visage.


“On fait la paix ?”


J’acquiesçai et lui serrai la main. Je n’avais rien à perdre et tout à gagner, autant tenter le coup. Il me donna une tape dans le dos et prit la direction de la sortie. Il s’arrêta sur le seuil et se tourna vers moi.


“Nous partons dans deux jours, le temps de rendre hommage aux morts.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? ne pus-je m’empêcher de demander, piqué de curiosité.

— Un groupe de manticores a décimé Thenca. Nous avons fait ce que nous avons pu pour les repousser mais… Ca n’a pas suffit. Nous avons perdu beaucoup de bonnes âmes aujourd’hui. Et maintenant, si tu veux bien m’excuser, je dois aller annoncer à des familles qu’ils ne reverront jamais leurs fils et maris.”


J’hochai la tête respectueusement et le laissai partir. Sur mon lit, une feuille de papier avait été déposée. Le trait de crayon était fin et précis. Le portrait me représentait et été signé de la main de Lorette. Mon cœur bondit de joie à sa signature. Elle ne m’avait pas oublié, et il me tardait de la retrouver dans quelques jours.

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