Mouton noir par défaut

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Je suis un mouton noir par défaut. Hors du troupeau, bête à cornes solitaire qui préfère garder sa laine plutôt que de se la faire tondre ou dévorer, mouton têtu qui choisit son pâturage. Les sentiers tracés où passent les autres ne m’ont jamais apporté que du malheur. Jouer selon leurs règles ne m’a jamais réussi. Alors j’avance dans les hautes herbes, grignotant petit à petit mon chemin. Mais c’est fatiguant de suivre le troupeau en parallèle.

C’est quand j’ai rongé définitivement ma laisse, que j’ai changé radicalement de cap, que je me suis affranchie de leur opinion, de leur « il le faut parce que c’est comme ça », alors j’ai découvert la chose la plus étrange et mystérieuse du monde.

Moi.

C’est effrayant de se trouver parce qu’à la seconde où ça nous arrive, on découvre en même temps à quel point nous avons été formé et transformé par tous ces « il le faut ». C’est jouissif  pourtant d’être complètement libre et de choisir uniquement ce qui nous plaît. La liberté absolue d’être soi-même est l’un des plus beaux cadeaux que je me suis accordé. À mesure que je me connaissais mieux, je faisais de moins en moins de concessions : pas question que je joue les moutons. J’ai appris à me définir et je ne suis plus un animal bêlant.

Je fais peur. Évidemment, les moutons ont peur de tout ce qui n’est pas un mouton. Ce qui est différent est effrayant, ce qui est libre n’est pas rassurant, ce qui n’est pas contrôlable ou manipulable est traité avec dédain. On me rejette aussi instinctivement qu’on repousse le loup. Je suis loin de vouloir les dévorer pourtant! Ce serait plutôt eux qui se retourneraient contre le mouton noir pour lui arracher ce petit plus qu’ils sentent (le parfum unique de la liberté).

Alors la solitude semble totale. La liberté devient effrayante, sans rien à quoi se raccrocher. Même un mouton qui n’est plus un mouton a besoin d’un soutien de temps en temps! Et alors, la magie opère à nouveau et le hasard nous fait rencontrer d’autres moutons qui ne sont plus des moutons.

On les appelle des amis.

Je ne le savais pas mais, dans les hautes herbes, je n’étais pas seule à tracer ma voie. Eux aussi étaient là, essayant d’avancer de leur mieux, tout comme moi. Et la richesse de leur amitié et de leur personnalité compense des millions de fois la pâle assurance du troupeau. J’ai trouvé une sœur, j’ai trouvé un frère, j’ai trouvé des âmes sœurs qui savaient voler tout comme moi.

Nous avons laissé le troupeau au loin et nous franchissons de nouvelles limites, parfois indépendants, parfois main dans la main.

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