Comment naquit l'Entente cordiale avec les Z'humains.

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Comment naquit l’Entente cordiale avec les Z’Humains


L’ombre protectrice qui a chassé la clarté du jour déclenche comme chaque soir le réveil du clan. Premier à ouvrir l’œil, vite imité par mes compagnons, je m’étire, baille à plusieurs reprises, me frotte frénétiquement les yeux et les moustaches puis entame à grands coups de langue ma toilette. Agglutinés les uns contre les autres, nos poils se touchent et je frôle l’arrière-train de mon amoureuse en train d’allaiter sa dernière portée, nos bébés. Après un court moment passé à se mettre en ordre de marche, nous sommes prêts pour entamer le premier travail de la nuit : quérir la nourriture. Mon flair perçoit vite un délicieux parfum. Les autres me font confiance. Normal, je suis le chef. Je sais où aller, donc eux aussi. Le nez en l’air, je nous mène droit vers une abondante provision de grains de blé et de maïs déposés à notre intention par Lui sur le plancher. Trottinant rapidement à la queue leu leu, nous nous dirigeons droit dessus. Après m’être servi largement, l’assouvissement de mon appétit me porte à être magnanime et apte au partage. Il en est toujours ainsi depuis que notre multitude s’est installée dans ce grenier. Vous l’avez compris je pense, nous sommes des souris. Des souris de la haute, des sauvages, s’il vous plaît, pas de vulgaires souris domestiques qui se vautrent dans les immondices de vos poubelles. Cherchant un abris pour l’hiver, nous avons investi cette demeure par un tuyau qui remontait le long du mur jusqu’à ce grenier et maintenant, nous y sommes très bien installés et nous prospérons comme il nous convient et en toute dignité.


Mais chut, j’arrête de vous causer, Ecoutez, Il arrive. Qui Il ? Prêtez l’oreille. Vous l’entendez ? Non ! Ah oui, j’oubliais, vos oreilles sont moins efficaces que les nôtres. Le Z'Humain arrive, l’Ambassadeur, un être hors du commun je dois dire. Puisque vous m'écoutez encore, c'est que je ne vous fais pas peur. C'est bien et je vous en sais gré. Alors, pour vous remercier de votre intérêt pour ma petite personne, je vais vous raconter mon aventure. Ah ah, je ressens des effluves d’impatience. Allez, installez vous confortablement. Prenez quelques grains de blé et écoutez mon histoire.


Le Z'Humain habitant cette maison a décidé de me garder, moi, tout d’abord.

C’était par un soir pluvieux. Nos multiples familles m’avaient fait confiance, après que je leur avais indiqué l’abri que je nous avais dégoté. une maison assez grande, surtout haute, avec un grenier. Nos femelles avaient mis bas, et tandis que nos petits tétaient goulument,  nous, les mâles, avions profité de la première nuit pour partir à la découverte de ce nouveau territoire. Nous trottinions les uns derrière les autres le long des poutres poussiéreuses quand soudain, une de mes pattes ayant trébuché, j’étais tombé. Pris de panique, tout le monde s’était alors enfui. En quelques secondes, je me retrouvais seul, sur un plancher recouvert de meubles, d’objets humains de toutes sortes. Et puis soudain, ce fut la panique, les marches d’un escalier craquèrent. Quelqu’un allait surgir. Je ne savais pas encore ce que c’était, Z'Humain ou animal, et je tentais de me cacher. Sauve-qui-peut : je ne trouvais rien pour m’abriter. S’il s’agissait d’un prédateur, s’en était fait de moi. Mes congénères allaient élire un autre chef et ce serait fini. Désespéré, je me plaquai contre une pile de livres et attendis l’issue. La porte s’ouvrit en grinçant, laissant entrer l’intrus. Ses pas ne ressemblaient pas à ceux d’un animal. Aucuns bruits de fourrure, de coussinets ou de griffes. Ce n’était ni chien, ni chat ni rapace, mais le danger restait et mieux valait demeurer caché. Le bruit inquiétant se rapprochait de ma cachette. Je restais immobile. Puis, une ombre me surplomba. Immense. Son propriétaire devait être grand et resta longtemps immobile au-dessus de ma tête. Je gardais les yeux rivés au sol, espérant qu’en ne regardant pas, je ferai disparaître ce cauchemar. Mais non, au lieu de passer son chemin, ou de m’attaquer, l’être restait immobile. Que faisait-il ? Qu’attendait-il ? Cela dura un temps infini, lui et moi immobiles. Il semblait être devenu un de ses meubles. Et moi j’aurais souhaité en devenir un, mais je sentais mes propres odeurs dues à la peur. S’il les détectait, c’était fini. Le regard toujours plaqué vers le sol, je devinai au bout d’un certain temps que son ombre bougeait. Allait-il s’en aller, enfin ? Peut-être ne m’avait-il pas vu. Mais l’ombre, au lieu de disparaître, obscurcit soudain totalement ma place. J’entendis un léger craquement puis fût enveloppé par la tiédeur d'une respiration proche. C’était un souffle léger, sans aucun sentiment d’agressivité, ni besoin de communiquer. C’était doux, presque parfumé. Davantage étonné qu’apeuré, j’osais tourner légèrement ma tête pour le regarder. Il fallait en finir. Et puis j’avais faim. J’étais seul. Ma tribu m’avait quitté. M’avait abandonné. C’était normal. C’était la loi. Quand enfin mes yeux furent suffisamment tournés pour découvrir à qui appartenait cette ombre inhabituelle, je découvris qu’il s’agissait d’un Z’humain. Un mâle. Il s’était accroupi juste au-dessus de moi très lentement et avait réussi à faire fuir ma peur. Il avait ensuite tendu sa main vers moi, sans doute pour me toucher. Je restais méfiant, bien sûr, mais la confiance arrivait, peu à peu. Puis ce fût le contact. Il me caressa très doucement le dos puis le ventre, et moi, je lui léchouillai les doigts, scellant notre pacte.

C’est ainsi que l’Entente cordiale débuta entre les Z’humains et mon peuple. Et c’était grâce à quelqu’un de mon clan, moi.


ChroniqueConteJeunessesouris pacte grenier humains
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