Chapitre 1 : Le rendez-vous

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 La chambre était à l’image du motel, sombre et poussiéreuse, à des années lumières de chaleureux. Il n’y avait que le strict minimum pour le mobilier. Un grand lit était placé au centre de la pièce avec à sa droite une petite table de chevet sur laquelle reposait une lampe de couleur jaune pipi. Un bureau en vieux bois se situait juste à côté de la porte d’entrée, avec une chaise des plus banales. Je hochai les épaules. Le pauvre décor de la chambre m’importait peu. Ce n’était pas comme si j’allais passer ma vie dans ce motel démodé. Mais l’odeur de renfermé m’irritait les narines. Couplée à la chaleur ambiante, il y suffoquait presque. Après avoir grand ouvert la seule et unique fenêtre, je fermai la porte derrière moi et examinai un peu plus les lieux. La propreté de la salle de bain laissait à désirer mais je m’y étais préparée. J’avais acheté exprès pour l’occasion des sandales en plastique à utiliser uniquement sous la douche pour ne pas risquer d’attraper des mycoses aux pieds ou toutes autres infections bizarres. J’attrapai mon énorme sac à dos que je déposai sur le lit. Les ressorts chouinèrent sous la pression, m’annonçant de longues et inconfortables nuits. Je tirai des vêtements de rechange puis ma main rechercha rapidement la présence de l'arme à feu. Je la sortis, vérifiai qu’elle était bien chargée et prit la direction de la douche.

 Un air frais d’été avait envahi la chambre. Satisfaite, je fermai la fenêtre et m’installai au bureau. Tout en picorant des myrtilles, j’étudiai le journal local. Sans surprise, j’y lus quelques vols à main armée, des fusillades et d’autres faits divers peu intéressants. La ville n’était décidément pas très réputée. Sinistre portait bien son nom avec son lot de hors-la-loi. Mes yeux se reposèrent sur la photo de la fillette de 7 ans qui était portée disparu depuis une semaine. Elle s’appelait Denise Bourge et était la raison pour laquelle ma cliente m’avait engagé. Mme Bourge m’avait contacté il y a environ deux jours pour enquêter sur l’enlèvement de sa très chère fille et pour la retrouver saine et sauve. Elle ne faisait pas confiance à la police et les trouvait même incompétents. C’était une femme d’affaire assez connue et surtout riche. Son secteur d’activité étant principalement axé sur l’immobilier. Elle était aussi veuve depuis près de deux ans, son mari ayant trouvé la mort suite à une crise cardiaque. Il avait tout juste quarante ans au moment du drame et ne présentait aucune maladie chronique. Comme quoi, la mort pouvait nous surprendre à n’importe quel âge sans crier garde. Je reportai mon attention sur la jeune fille qui souriait sur la photo. Elle avait des cheveux mi-longs de couleur châtain et des yeux marron clair. Je ressentis un peu de pitié pour cette fille qui devait subir l’horreur, si elle était encore vivante. Et c’est ce que j’allais découvrir dans peu de temps, j’avais trouvé une piste qui devait me mener droit sur ses kidnappeurs. J’abandonnai le journal et me frottai les cheveux avec la serviette de bain. J’avais encore du temps devant moi. Je regrettai l’absence d’une télé mais pour le coût de la chambre je ne me plaignis pas plus et décidai de faire quelques étirements à la place.

 Quelqu’un me percuta de plein fouet alors que je fonçais droit sur ma cible. Je levai la tête et remarquai que l’obstacle en question était un grand homme d’environ deux mètres de hauteur, portant des lunettes de soleil noires. Mon regard dévia sur ses cheveux bruns foncés qui bataillaient sur le haut de sa tête de manière désinvolte. J’attendis des excuses mais rien ne se passa. L’homme en question n’avait même pas pris la peine de s’arrêter et continuait d’avancer au sens inverse. Je jetai un bref coup d’œil à ma cible qui n’avait pas bougé d’un poil et sans réfléchir, courrait après l’inconnu et le retint par le bras.

— Vous ne devriez pas vous excuser par hasard ? Vous venez de me percuter, je me trompe ?

L’inconnu tourna enfin la tête en ma direction et grimaça.

— Qu’est ce que tu me veux, gamine ? Des histoires ?

 J’en restai bouche bée. J’avais enfin eu mes dix-huit ans, je méritais un peu plus de respect ! Lui-même ne paraissait pas si vieux.

— Heuuu… Des excuses pour commencer ? dis-je d’une voix traînante. Tu m’as percuté je te signale.

 La grimace s’accentua sur son visage. Pas content ? Moi aussi ! Je sentais aussi la colère monter en moi.

— Tu n’avais qu’à pas être sur mon chemin. Maintenant lâche moi et barre toi. C’est la deuxième fois que je te mets en garde.

 Je n’en crus pas mes oreilles. Ce monde tournait vraiment à l’envers. Je n’en attendis pas plus pour déplacer mon pied droit juste derrière le sien, l’attraper par les épaules et le pousser en arrière. L’homme comprit trop tard mes intentions et s’écrasa au sol sur ses fesses. Il était bien plus lourd que prévu mais j’avais été entraînée pour gérer ce genre de situation. Je m’en étais sortie à merveille. Fière d’avoir mis une bonne raclée à cet impoli, je hochai les épaules et fis l’innocente.

— Oups. Ma main a glissé.

 La rage se lisait sur son visage mais je n’y prêtai pas attention. Je regardai au loin pour voir si ma cible avait bougé et fus soulagée de constater que non. Je ne réussis à avancer que de quelques pas avant que mon attention ne fut attirée une nouvelle fois sur l’inconnu aux lunettes de soleil. Il m’avait attrapé par le mollet et me tirait violemment. Quelle force ! Si je n’étais qu’une simple gamine comme il le prétendait, je me serais faite méchamment mal avec cette chute en m’écrasant comme une crêpe à plat ventre sur le sol. Avec peut-être une entorse et quelques dents de cassés ? Je plaçai les deux mains face à moi les bras tendus et les fléchis une fois au sol. Je roulai juste après sur le côté et examinai mon agresseur d’un mauvais œil.

— Pas mal pour une gamine. On est quitte maintenant. Tu peux retourner jouer à tes poupées.

— Mais ça ne va pas la tête ! explosai-je. J’aurais pu me faire mal !

— Vu tes performances de crochepied, je doute que tu puisses mal tomber.

— Ah oui ? Et si je n’avais pas eu le temps de réagir ?

— Eh bien, cela aurait été tant pis pour toi.

— Quoi ?!

 Je serrai des poings. Cet homme cherchait décidément la bagarre. En temps habituel, je n’aurais pas hésité et me serais jetée littéralement sur lui. Mais j’avais des choses bien plus importantes à faire, comme approcher ma cible et trouver la fillette. Je ne devais pas décevoir ma cliente. Je me levai alors sans rien ajouter de plus, rejetai ma queue de cheval en arrière et essuyai mon jean. Je le foudroyai une dernière fois du regard et regrettai qu’il porte des lunettes, lui cachant une bonne partie de son visage. Il ne fit rien lorsque je le quittai. J’espérais simplement ne plus jamais le croiser de ma vie s’il tenait à la sienne.

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