Elle

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La première fois que je l’ai vue, j’ai discrètement pincé l’intérieur de mon bras, là où c’est vraiment tendre, et il m’a fallu pas mal de maîtrise pour retenir le petit cri qui allait m’échapper pour venir confirmer que tout était réel. La place ensoleillée et pailletée d’oiseaux becqueteurs, l’animation sur les quais, l’odeur du printemps qui s’enfuyait vers l’été et puis elle. Elle et sa forêt de boucles brunes et lâches, un sourire qui envahissait son visage comme un lierre enchanté, cette fossette haut placée qui dansait sur sa joue, son corps menu décoré par une adorable robe orange qui mettait en valeur le rosé de sa peau, les rousseurs de son petit nez. J’en suis restée con, j’en ai bafouillé comme une adolescente, j’en ai eu la tête qui bourdonne, un instant. Un spontané mais incongru « Tu es si jolie » s’est battu en duel avec un poli « J’aime beaucoup ta robe » dans ma gorge serrée. La raison a gagné, le second a franchi mes lèvres, vainqueur sans panache mais j’ai cette fois, cette fois qui n’était pas coutume sur bien des points, préféré éviter un choc frontal.

La première fois que je l’ai vue nue, dans ma tête a sifflé un gouailleur ouvrier de la tour Eiffel admirant une paire de jambes parfumée Guerlain depuis son périlleux perchoir. J’étais un peu ivre – c’était de sa faute – et j’avais le corps plein d’abeilles, celles de l’excitation, de l’attente. Celle de l’appréhension, aussi.

On m’avait dit plein de choses. Tellement de choses. On m’avait dit que c’était différent, que ça n’avait rien à voir, on m’avait dit que c’était la même chose. On m’avait dit que c’était limité, illimité, tendre, violent, que je changerais d’avis, que je virerais de bord.

Tout ça et plus encore.

Par contre, on ne m’avait rien dit de la douceur de sa peau, des abeilles toutes rassemblées sous mon crâne qui sont parties en folle danse nuptiale quand je l’ai touchée, des frissons de mon ventre abandonné à ses doigts. On ne m’avait pas dit les fous rires à la fois nerveux et sincères de l’exploration. On ne m’avait rien dit, ignorant qu’« on » est toujours, sur la joie de faire sa joie du bout de ma langue. On ne m’avait pas dit son regard alangui et ses joues empourprées, sa façon d’avoir l’air si sûre d’elle tout en me disant qu’elle ne sait pas du tout ce qu’elle fait.

On avait raison et tort sur toute la ligne.

On ne savait pas, et « on » là c’est aussi elle et moi, on ne savait pas qu’on pouvait créer quelque chose d’aussi joli sans savoir ce qu’on fait. On n’avait pas vu venir la sérendipité des sensations, des émotions. On voulait y croire, on voulait essayer, pour voir. On a bien fait.

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ElleChapitre8 messages | 2 ans

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