Acacia

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Adossée à l’arbre sous lequel elle reposait, elle ouvre les yeux avec sérénité.

Elle n’a pas en mémoire l’instant qui l’a précipitée dans le songe. Elle a oublié la raison de sa présence dans ce désert de sable où seul règne cet acacia gigantesque, unique protecteur de sa peau contre le soleil qui déjà répand partout sa lumière.

Même son nom a disparu. Elle feint de le chercher un temps, tandis qu’elle promène son regard sur l’étendue dorée qui s’offre à elle.

Le silence se fait entendre jusqu’au lointain. Aucun insecte, pas le moindre petit animal, pas même un oiseau dans le ciel. Aucun nuage. Rien. Tout semble figé, prisonnier d’une éternité venue s’abattre sur cette parcelle du Monde qu’elle seule occupe.

Elle, et l’arbre contre lequel elle se tient. Il est son refuge. Sa source d’ombre au milieu de l’océan doré reflétant les rayons de ce corps céleste capable tantôt de donner la vie, tantôt de la détruire.

Elle observe le sol sous ses pieds, laissant aller le sable entre ses orteils nus, cherchant à ressentir un contact plus profond avec la Terre, comme pour s’ancrer dans cette réalité qu’elle peine à atteindre parfois. Souvent. Toujours.

Les souvenirs remontent progressivement à la surface, en autant de petites bulles d’oxygène venues se rompre à la surface de l’eau, à la surface du ciel. Son ciel.

Elle retrouve son prénom, déjà sans importance. Elle se souvient être descendue des nuages, avoir été violemment tirée vers la terre, être venue percuter la plus haute branche de son protecteur, s’être accrochée aux branches pour finalement descendre le long de son tronc et y trouver un creux dans lequel se nicher.

Elle se souvient de la raison de sa présence. Quelque chose s’est produit. Quelque chose de beau. Quelque chose d’inattendu. Quelque chose qui l’a arrachée à son monde pour la précipiter dans celui-ci.

Elle se souvient avoir quitté la commissure d’un œil, avoir coulé le long d’une joue chaude, avant de s’éparpiller au sol en fines gouttelettes nouvelles.

Elle se souvient avoir été cette larme tout autant que ce corps qui l’abritait, comme l’abrite désormais cet arbre providentiel.

Elle a été cette larme chaude, l’émotion en ayant été la cause, les paroles entendues, prononcées. Elle a été ce feu brûlant à l’intérieur d’elle-même, ce sentiment diffus inondant son être jusqu’à ses extrémités les plus fines.

Elle est cette goute d’eau salée. Elle est cette émotion non contenue. Elle est ce corps baigné de lumière.

Il est cet arbre. Protecteur, puissant, inamovible. Celui qui dans un murmure lui a fait entendre qu’elle pouvait demeurer avec lui, qu’elle pourrait venir se reposer sous lui à loisir.

La vie a repris autour d’eux. Le Monde s’est remis en marche. Elle s’adosse encore un peu plus, puis s’abandonne, enveloppée de son écorce, bercée par son parfum d’éternité.

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