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"La vengeance est une belle arme."

Oui.

Mais une arme à double tranchant !

Il avait retrouvé son bureau.

Son poste.

Sa prison.

Il avait retrouvé ses tâches habituelles.

Ses interrogatoires.

Ses suspects.

Il avait retrouvé son grade.

Son anonymat.

Son entière liberté.

Et il reprit son travail.

" Vous avez embauché cet homme comme chauffeur. Comment l'avez-vous rencontré et quelles furent ses références ?"

Deux questions d'affilée !

C'était mauvais.

L'officier chargé des interrogatoires sourit, comme pour s'excuser, et reprit posément :

" Comment avez-vous rencontré cet homme ?

- Au quartier général, répondit le prisonnier, mal à l'aise.

- Quelles furent ses références ?

- Il venait de XXXX et avait une lettre de référence signée de la main du général XXXX.

- Une enquête a-t-elle été faite pour vérifier la véracité de ces références ?"

Le prisonnier, fautif, se troubla et baissa la tête :

" Non, mais nous avions besoin de chauffeur et l'homme savait conduire à la perfection alors..."

L'officier retrouva son magnifique sourire, bienveillant et asséna :

" Oui, nous comprenons. Il fallait quelqu'un et il s'est trouvé là."

Le prisonnier leva les yeux, remplis d'espoir.

" Que savez-vous de lui ?, demanda le jeune soldat à son aîné.

- Je vais tout vous dire.

- Mais bien entendu. Nous n'en avons pas douté un seul instant."

Et le sourire de l'officier chargé des interrogatoires fit frémir l'homme interrogé.

Lui-même ne se sentait pas à l'aise avec cette histoire de chauffeur.

L'homme l'avait conduit des dizaines de fois, ils avaient parlé, ils avaient bu, ils avaient plaisanté.

L'officier se souvenait de discussions nocturnes.

" J'ai travaillé pour l'officier XXXX, l'officier XXXX, monsieur XXXX..."

Tous des gens morts ou disparus sur le front.

L'officier avait négligé de vérifier en profondeur.

Trop occupé qu'il était à assurer sa place auprès du Chef.

Il était aussi fautif que les autres et cela l'ennuyait particulièrement.

La vengeance empêchait de dormir.

L'officier ne rentrait plus chez lui. Ce n'était pas chez lui.

C'était le logement de fonction qu'il avait obtenu en pénétrant dans les cercles intérieurs de la politique.

Ce n'était pas sa place.

" Ainsi, vous avez couché avec le chauffeur ?, demanda l'officier à une jeune femme, honteuse.

- Oui. Il transporte ma mère et ma soeur. Il..."

Elle ne sut pas comment poursuivre sa phrase.

L'officier se pencha, conciliant et continua ainsi :

" Il était beau et gentil, je me trompe ?"

Un sourire incertain.

" Oui, un homme gentil. Puis, il m'a demandé si je connaissais votre femme."

L'officier serra les doigts et son sourire se figea.

" Et vous avez répondu quoi ?

- Oui."

Les larmes coulèrent très vite après cela et agacèrent passablement l'officier.

" Je suis désolée, je ne savais pas, je suis désolée, je..."

Il eut envie de gifler mais se retint de le faire.

" Je comprends. Vous ne pensiez pas à mal."

La jeune femme regarda l'officier avec tellement d'espoir qu'il ne put s'empêcher de sourire.

" Dites-moi tout ce que vous savez de lui.

- Oui, oui ! Pas de souci !

- Je n'en attendais pas moins de vous, mademoiselle XXXX."

Et la femme perdit tout espoir en apercevant le regard dur de l'officier chargé des interrogatoires.

La vengeance était longue à obtenir.

L'officier interrogeait et obtenait des informations.

Il les apportait à ses supérieurs.

Dans ces salons si luxueux, si dorés, où il n'avait pas sa place.

" La femme de XXXX a avoué. Elle a couché avec le chauffeur."

Ces mots, lâchés simplement en pleine réunion au sommet, firent se tourner les têtes vers le colonel XXXX qui devenait rouge de colère :

" Où est ma femme ?

- Dans mes geôles, monsieur. Elle attend son procès.

- Mais, mais..."

Une voix, calme, froide, apaisait la tension ambiante par un bienveillant :

" D'autres choses, officier ?, demanda le chef à son second.

- Elle a mentionné un voyage secret pour la ville de XXXX. Auquel vous participez, monsieur."

L'officier se tourna vers le Chef suprême et ce fut au tour de ce dernier de blêmir de rage :

" QUOI ? Comment cette garce a appris cela ? C'était secret !"

On regarda le colonel XXXX. Le militaire, décoré et reconnu, s'assit lentement sur son fauteuil, assommé.

" Je le lui ai dit.

- MERDE !," claqua le chef.

On arrêta le colonel et il rejoignit son épouse, ainsi que sa fille, ainsi que l'ancien officier recruteur...

Tous enfermés dans les geôles de la prison de XXXX.

Tous interrogés encore et encore.

Les jours passaient.

L'officier rencontra des femmes, des hommes.

Il inspecta le logement du chauffeur et les diverses chambres d'hôtel qui lui servaient de repères.

Point par point, suspect après suspect, d'interrogatoire en interrogatoire, il remonta la piste.

Il n'espérait même plus retrouver sa femme en vie.

Mais il espérait mettre la main sur le terroriste qui l'avait enlevée.

Et le tuer.

Enfin, l'interroger.

Mais cela faisait-il une différence maintenant ?

" Qui a donné les ordres ?

- Je croyais que c'était vous, monsieur, souffla un des soldats préposés à la garde personnelle de l'officier interrogateur.

- Jamais ! Vous n'avez jamais eu de messages de ma main.

- Non.

- Alors ! Qui a donné les ordres ?

- Votre femme, monsieur. Elle avait pris l'habitude de prendre la voiture pour rendre visite à des dames de la ville."

L'officier acquiesça.

Des dames de la ville.

D'autres interrogatoires.

Le chauffeur était un homme prudent.

Il conduisit avec soin l'épouse de l'officier pendant plusieurs semaines avant de mettre fin à son infiltration.

Ce qui n'était pas logique, d'ailleurs.

Mais qu'est-ce qui était logique quand il s'agissait de vengeance ?

" Vous la trouverez, officier, lança le chef, conciliant.

- Je vais essayer, monsieur.

- Vous y arriverez."

L'officier eut tout à coup le sentiment que quelque chose venait de changer.

" Je n'en doute pas un seul instant."

Et la main du chef pesa lourd sur son épaule.

Si lourd.

"Vous le trouverez ! Vous me l'amènerez !

Vous êtes le meilleur !

Tâchez de le rester !"

Tout était une question d'habileté !

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