Richard

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(contenu sensible)

Il est encore en train de recommencer. Merde. C’est la quatrième fois. Au moins. Il ne cherche même pas à être discret, Marine l’entend marcher sur le parquet qui grince, remonter tout le couloir jusqu’à la porte de sa chambre. Le silence s’installe, un frisson de malaise remonte son dos. Elle l’a déjà engueulé, trois fois, elle ne sait plus quoi faire. Merde ! Pourquoi elle a accepté ce plan foireux. Ça ne fait que deux semaines qu’elle partage l’appart avec lui. Quand Chloé lui a proposé de prendre un remplaçant pendant son voyage à Rome, histoire de sous-louer et se faire un peu de blé, elle a accepté. Ce n’était que pour un mois, en plus Chloé avait ce pote dans le besoin, Richard - un type super, tu verras, un peu perdu mais inoffensif -, c’était pratique, pas besoin de faire visiter, même pas besoin de déplacer les affaires de chambre. Elle aurait dû deviner le plan foireux, elle en avait rencontré pourtant, déjà, des fameux potes à Chloé.

Elle avait senti l’embrouille arriver quand cette dernière l’avait invité à manger, pour qu’ils fassent connaissance. Pour le côté perdu, oui, ça, elle n’avait pas menti. Le côté inoffensif, Marine avait eu des doutes, même si c’est vrai qu’il avait l’air aussi dangereux qu’une vieille éponge. Sûrement qu’il devait avoir autant dans le sang à lui seul que tous les Led Zeppelin réunis. Une épave. Comment-allait-il payer le loyer ? Il touche une pension adulte handicapé, t'inquiète. Charmant. Elle avait dit oui, et le manège avait commencé. La première fois, elle n’avait pas compris, elle s’était dit, naïve, qu’il avait quelque chose à lui demander et qu’il n’osait pas la déranger, ou qu’il avait oublié comment frapper à une porte. Elle s’était rhabillée, avait rabattu la couette sur son vibro et était allée déverrouiller. Il était juste devant, tout grelottant, l’oeil vitreux, à se mordre la lèvre. Elle avait cru qu’il faisait un bad trip, quelque chose dans ce goût là. Puis elle avait remarqué sa main qui descendait dans son sarouel dégueulasse. Non, Richard ne grelottait pas, non… Il se masturbait ! Devant sa porte ! Elle l’avait engueulé, poussé, elle avait littéralement piqué une crise. Elle s’était sentie sale face à ce type glauque. Il avait fini par déguerpir sous ses coups hystériques. Tremblante de rage, elle s’était renfermée et avait mis plus d’une heure avant de se calmer et de pouvoir s’endormir.

Marine avait remis une couche le lendemain, essayant de l’avoir à jeun de quelques heures de sommeil. Richard s’était contenté d’opiner, la bouche pleine de ses dernières céréales, les siennes à elle ! Elle l’avait maudit intérieurement et était partie pour ses cours en prenant bien soin de fermer sa chambre à clé. Elle n’avait plus eu envie de recommencer pendant plusieurs jours, la présence de ce “coloc” forcé et malsain la dérangeant profondément. Puis elle avait craqué, c’était pas ce drogué qui allait l'empêcher d’avoir une sexualité épanouie, quand même. Elle avait tenté d’être discrète, silencieuse, rien n’y faisait, le Richard semblait avoir un sixième sens, une sorte de radar infaillible. À peine commençait-elle à profiter de son plaisir qu’elle entendait son pas grincer sur le plancher. Il venait toujours s’arrêter devant sa chambre puis se coiffait la girafe en silence. La deuxième fois, elle l’avait cogné avec la bouteille d’eau qu’elle emmène quand elle va à la salle. La troisième, il avait filé comme un sale voyeur avant qu’elle n’ait pu le surprendre. Elle lui avait secoué les puces le lendemain mais sans résultat, le mec planait beaucoup trop haut.

Et le voilà qui recommençait encore, cette fois il allait voir. Sans cesser de pousser de petits gémissements, elle renfile sa culotte et son pyjama, sort du lit et attrape sa bouteille d’eau. Elle continue son manège, simulant un plaisir qui monte, tout en s’approchant de la porte. Elle pose la main sur la clé, déverrouille et ouvre brusquement en poussant un cri de guerre. Elle brandit la bouteille tandis que Richard, effrayé, lève ses mains pour se protéger. Les deux. Devant cet étonnant constat, Marine s’arrête. Elle baisse les yeux, sans réfléchir. Le type ne porte pas de pantalon. Rien d’autre qu’un string à Chloé. Sa demie-molle et ses testicules débordent de chaque côté du triangle de tissus taché. Elle a le temps de remarquer que ce taré s’épile les boules avant de remonter son regard en frémissant. Putain de merde !

– Bordel, connard ? Tu fous quoi là ?

Il la regarde en clignant de ses yeux huileux, les bras ballants, pas que les bras d’ailleurs… Non, elle ne veut pas regarder.

– Dis, ‘rine, t’une gonzesse, toi ?

Elle craint le pire, il a la pâteuse, avale la moitié de ses mots. Ça se trouve, il sait même pas qu’il est à moitié à poil. Merde, c’est pas une raison !

– Et alors ?

– Bah, moi chuis ‘n homme, s’u veux, on pourrait…

– Certainement pas ! Retourne dans ta chambre, Richard, sinon je te jure que je t’émascules à coup de Badoit.

– ‘llez quoi, ç’s’voit qu’t’es une c’chonne…

Le coup est parti tout seul. Le cul de la bouteille l’a frappé au dessus de l’oreille et il s’est effondré. Elle lui met encore deux coups de pieds dans les côtes, pour la forme. Il ne réagit pas, K-eau en un round. Exaspérée, elle l’attrappe par le bras et le tire derrière elle. Il ne pèse rien, il n’a que les veines et la peau sur les os. Elle le traîne ainsi jusqu’à la porte de l’appartement et l’abandonne sur le paillasson du voisin. L’enfoiré de voisin qui s'était amusé une fois ou deux à coincer Chloé dans le local poubelle avant qu’on ne dépose une main courante contre lui. C’était une blague, bien évidemment, ces jeunes, de nos jours, ça n’a plus d’humour. Eh bien qu’ils s’amusent ensemble, elle, elle en a plein les fesses des connards. Elle remet au lendemain la mise à la poubelle des affaires de Richard et retourne se glisser sous sa couette, bien décidée à profiter enfin de son clito sans être dérangée.

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