Déliquescence

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Ce n’est pas que je vieillisse, mais la tristesse m’envahit. Perdues, les belles années où il suffisait de s’introduire entre les pierres dorées pour trouver refuge dans des circonvolutions bien structurées ! Je me traîne, drapée dans un brouillard qui m’indispose. Je n’ose plus me présenter tant on essaie de déformer mon éclat dans des lorgnettes mal tenues. La mort ne se présentera pas. Elle n’a aucun pouvoir sur le choix de mes pas, et mes vieux souliers percés iront se loger dans les grottes humides et sauvages sans qu’il lui soit possible de m’exécuter.


Les forêts disparaissent sans compensation et leurs bois ne subissent plus cette honorable transfiguration qui nourrissait mes amants. Ignoble monde qui tue les larmes de lune et les chants étranges de la sylve ! Je refuse de n’être qu’exclusivement cantonnée à survivre ; je n’ai pas encore terminé mon numéro de trapèze volant mais je sais déjà que demain les sifflements fuseront parmi les spectateurs. Plus personne ne remarque le clown triste et le crâne chauve de la loyale introduction. Les cirques se vident et n’attirent plus que des duels mollassons où ne se croisent que des lames protégées par un blunt. Qui suis-je sans violence ? Sans la rage de vaincre ? Il faut que l’orage gronde, que les flots emportent la crasse qui gangrène l’intuitive lumière pour que je puisse m’installer, me couler dans la moiteur de la sueur et sortir de l’atelier. Or la bienséance des attitudes policées m’interdit l’accès aux profondeurs infernales, généreuses génitrices d’œuvres sulfureuses. La rosée seule a droit de cité dans les entrelacs des toiles d’araignées et n’abreuve que des êtres timides et sans envergure. Quelques gouttes de prescience s’oublient à mon passage éphémère, et je vois bien que cette dilution s’évapore sans apporter de réelle avancée. On ne veut plus de moi… Bannie par les fils de ceux que j’ai côtoyés si longtemps, je retire ma patience en une retraite bénie des dieux.


Je continuerai d’apparaître là où l’on ne m’attend pas. Je continuerai de supporter cette infamante anti-sœur, qui s’invite à mes côtés depuis que la libération des egos est entrée en guerre contre le dictat de la tempérance. Mais cela ne durera qu’un temps. Elle me suce, m’use le désir d’élever l’humanité. J’ai l’impression de la nourrir de mon énergie, car plus je suis aiguisée, plus son tourbillon prend de la force et entraîne ma perte. Je ne relèverai pas le gant et abandonnerai la place avec mépris en attendant ma revanche. Ce serait trop répondre à l’attente de ses mercenaires que mettre à l’affiche un combat entre Intelligence et Connerie.

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