Chapitre 8 fin

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 Elle se tourna alors vers moi et m’examina longuement, s’attardant sur mes yeux et mon léger sourire. J’étais une parfaite inconnue pour elle. Soutenir son regard sans broncher m’était difficile, à cause de ses iris noisette aux pointes de vert. Pareils à ceux de son père.


  — Maman, je suis partie longtemps, bredouilla-t-elle sur un ton presque d’excuse.


Je pris place à mon tour sur le lit et l’embrassai.


  — Oui mon cœur, mais ça n’a pas d’importance.

  — Je suis désolée de m’être enfuie de la sorte, susurra-t-elle penaude.

  — Ne t’en fais pas ce n’est pas grave, la rassurai-je serrant doucement sa main.

  — Que t’est-il arrivé ? l’interrogea Eros.


Elle détourna le regard prête à fondre en larmes.


  — Pardonne-moi, ne te sens pas obligée.

  — Non, je peux le faire, affirma-t-elle avec conviction. J’ai volé le Thémis pour te rejoindre sur Baldwin. Je marchais jusqu’au parc quand j’ai croisé oncle Styx, j’ai vite compris qu’il n’était pas lui-même. J’ai voulu fuir pour te retrouver, je n’ai pas pu car il n’était pas le seul à me courir après. Quand ils m’ont attrapée je n’ai rien pu faire.

  — Pourquoi s’en prendre à toi ? la questionnai-je.

  — Ils voulaient le Thémis. J’ai hurlé de toutes mes forces pour que les filles m’aident mais elles n’ont pas pu, alors je leur ai dit de partir. Le vaisseau s’est volatilisé tandis que des appareils l’approchaient pour l’arraisonner.


 Elle s’arrêta pour reprendre son souffle, elle poursuivit son récit après une nouvelle gorgée d’eau.

  — En ne le voyant plus oncle Styx s’est mis dans une colère terrible et m’a frappé si fort que j’en ai perdu connaissance.


 Mon sang commençait à bouillir, il fallait toute ma volonté pour ne pas laisser mes pouvoirs tout détruire autour de moi. Eros lui ne dissimulait pas sa rage.


  — Je me suis réveillée dans une cellule, le conseiller Martin était là avec oncle Styx. Il m’a dit que tu étais devenue folle après ma fuite et que tu avais fait beaucoup de mal à notre planète. Il voulait le Thémis, tout savoir sur vos pouvoirs, le code, Shambala. Je ne l’ai pas cru et j’ai refusé de l’aider. Il est revenu avec… frémit-elle, la voix tremblante. Un bourreau.


 Je faisais des efforts surhumains afin de ne pas exploser. Je ne me rendis même pas compte que des flammèches se formaient autour de moi. Eros m’attrapa le bras et stoppa le flux de magie et d’émotions avant qu’ils ne provoquent des dégâts.

  — Pardon, m’excusai-je gênée.

  — Je n’ai rien dit maman je te le jure, pleura-t-elle.


Je la serrais dans mes bras pour la réconforter, caressant ses cheveux, incapable de dire quoi que ce soit.


  — J’ai perdu la notion du temps jusqu’à aujourd’hui et cette sensation. Je me suis retrouvée à bord du Thémis sans savoir comment. Je voulais rentrer mais on ne pouvait pas, j’ai…

  — Où est papa ? sanglota-t-elle.


Ce fut un nouveau poignard qui me traversa le cœur.


  — Il se trouve ailleurs…


 Comment lui expliquer la vérité sans aggraver son état ?

 J’entendis dans ma tête la voix de Risha me rappeler la situation pour m’encourager à laisser Aya aux bons soins d’Eros. Je l’insultais copieusement mais en dépit de l’énervement qu’elle me causait, elle n’avait pas tort, hélas. Pourtant je ne comptais pas la rejoindre tout de suite.


  — Mon ange je vais devoir retourner travailler, l’informai-je.

  — Je ne veux pas rester seule, gémit-elle.

  — Eros ne te laisseras pas, souris-je.


 Son regard interloqué passa de moi à son ancien amant.


  — C’est ta mère qui est elle-même venue me chercher, elle ne plaisante pas. Je ne partirais pas sans toi, la rassura-t-il.

  — Est-ce que…

  — Il m’arrive de changer d’avis quand j’ai tort, mais tu ne quitteras pas cet endroit avant d’être parfaitement rétablie.


 Elle acquiesça en souriant avant de se rallonger, elle ferma les yeux lorsque Eros lui caressa les cheveux. Je pris le chemin du sas il me rattrapa alors saisissant mon bras.


  — Je me fiche des règles et de la justice de l’Alliance, il s’en est pris à l’une des nôtres, il subira mon courroux, grogna-t-il en sourdine.

  — Aya n’est pas encore l’une des vôtres, comme tu dis. Tu n’auras peut-être pas l’appui de tes pairs.

  — Je me passerai de leur aval.

  — Dans ce cas tu passeras après moi, lui affirmai-je de la menace dans la voix.

  — D’accord, céda-t-il à contre cœur.

  — Essaie de lui apprendre en douceur ce qu’il s’est passé ces derniers siècles.

  — J’ai plutôt l’intention de la ménager.

  — Je ne te dis pas de l’assaillir d’explications, simplement de ne pas lui mentir quand elle te questionnera.

  — De la même manière que toi tout à l’heure ?


 Cette pique était méritée.


  — Fais-mieux que moi, arguai-je.


 Il grimaça et retourna auprès d’Aya accompagné par Alianoï. Je sortis, suivit par mes amis qui explosèrent en questions. Je captai quelques bribes au milieu du brouhaha qui me permirent de déduire que Styx avait mentionné qu’elle était ma fille et qu’Eros était à tomber par terre. J’avais des envies de meurtre et si je voulais les assouvir je devrais répondre.


  — Stop ! ordonnai-je. Un seul à la fois.

  — Elle t’a appelé maman, se lança Claire.

  — En effet.

  — Elle a pratiquement ton âge, c’est carrément impossible, poursuivit Flore.

  — Tout dépend de comment tu comptes, rétorquai-je.

  — Y a pas trente-six façon de compter son âge, rigola-t-elle.

  — Pour toi elle a quoi, vingt ans.

  — Oui, max.

  — Moi je sais que je l’ai mise au monde il y a un peu plus de sept siècles.

  — Sérieux ? dit-elle interloquée.

  — Je n’ai pas mentis, se vexa Styx.


Il affichait une moue boudeuse, bras croisés.


  — C’est un vampire ? demanda Flore avec sérieux et inquiétude reculant d’un pas.

  — Elle brille au soleil, pouffa Gaël s’attirant un regard circonspect de la part de Styx.


En temps normal j’aurais explosé de rire, mais là je n’y étais pas.


  — Non, ce n’est pas un vampire, soufflai-je.

  — Une elfe, ses oreilles sont-elles pointues ? s’interrogea Claire.


Elle se mit sur la pointe des pieds, tendant le cou pour voir par-dessus les autres


  — Non plus et les elfes ne sont pas immortels, pointai-je me mettant en marche.


 Claire me précéda aussitôt marchant à reculons pour ne pas que je lui échappa, avant de poursuivre :

  — Fais- moi plaisir alors, dis-nous tout parce que je vois pas comment tu l’as mise au monde pour qu’elle te ressemble si peu.

  — Je subis, comme tout le monde un cycle de réincarnation. Le dieu de petit ami de ma fille l’a rendu à demi immortelle.

  — Le bel apollon, c’est un dieu, articula Flore avec des étoiles dans les yeux.

  — Oui Eros, c’est un cupidon, déclarai-je évasive reprenant ma route cherchant à contourner claire.

  — Non mais tu peux pas nous laisser avec un tel mystère, insista Gaël en attrapant mon bras.

  — Vous n’avez qu’à harceler Styx, il s’amusera à répondre avec plaisir.

  — D’accord, chantonna Claire amusée.


Styx se retrouva immédiatement encerclé.


  — Comment ça, où est ce que tu vas ? réclama Styx absolument pas enchanté par la tournure de la situation.

  — Soumettre le cafard à la question, répondis-je avec colère.


Il se téléporta pour se placer devant moi à deux bons mètres de distance.


  — Tu ne peux pas faire ça.

  — Et pourquoi donc ?

  — D’abord ce n’est pas toi qui parles mais la colère.

  — Oh, mais j’en ai pleinement conscience et ça ne me gêne pas le moins du monde.


 Il tenta alors une autre approche.


  — Tout ce que tu pourras obtenir comme informations de cette manière ne sera pas utilisable pour son procès. Tu t’en voudras.

  — Je vais tâcher d’être claire, je me contrefous d’un procès éventuel devant l’Alliance. J’ai bien l’intention de le jeter en pâture au tribunal divin après lui avoir rendu la monnaie de sa pièce. Je ne laisserais personne m’en empêcher, tu m’entends, lui assurai-je menaçante.


 Pas le moindre doute ne perçait chez moi. Il fit en sorte de ne rien laisser paraître sur son visage mais s’écarta de mon chemin. Je repris immédiatement la direction des cellules, tandis que mes amis assaillaient Styx de questions.

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