Chapitre 8

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 Gabin approcha davantage le couteau de la gorge de Katherine.

 — Comment ça un dilemme ? s’énerva-t-il. Y a pas à hésiter, c’est notre ennemie !

 — Alors pourquoi tu attends ? Tu hésites ? s’assura Jean.

 Gabin grogna.

 — Je veux être sûr que tu sois d’accord avec ma décision.

 — Bah non, bof. Je l’aime bien moi…

 — C’est pas ça la question ! Elle s’est moquée de nous, elle a fait semblant d’être gentille pour gagner notre confiance et nous buter quand on relâchera notre garde !

 — Vous vous trompez, si j’avais voulu aspirer vos essences vous ne seriez pas en train de débattre à l’heure qu’il est. J’ai eu des dizaines d’occasions… Et je ne vous aurais pas révélé autant d’informations.

 — Je trouve que la logique de Katherine est correcte, signifia Jean. Laissons-la au moins le bénéfice du doute.

 — N’importe quoi, il doit juste y avoir une raison qui nous échappe… Peut-être est-ce parce qu’avaler notre vitalité a meilleur goût si on n’est pas apeurés, j’en sais rien… Et puis même, dans l’éventualité où elle dit la vérité, qu’est-ce qui nous dit qu’elle saura se contrôler quand sa faim reviendra ? Peut-être même qu’elle nous garde simplement en réserve pour quand elle voudra se nourrir ?

 — T’es encore en train de débloquer Gabin, t’es complètement parano.

 — Et toi beaucoup trop détendu ! Dis-moi Jean, combien de bonnes décisions tu as pris aujourd’hui ?

 — Je vois pas bien où tu veux en venir mec, tu cherches à m’embrouiller ?

 — C’est à moi de prendre cette décision. Ce n’est pas facile, mais je dois le faire, pour nous deux.

 Katherine se débattit ; Gabin ressentit aussitôt la grande force qui émanait de cette femme. Elle pourrait reprendre le dessus sur lui en un rien de temps, tout comme ce surveillant dont le corps était tellement résistant qu’il semblait constitué de métal. Il fallait agir, vite.

 Gabin planta la lame dans le cou de son otage et le découpa d’un mouvement sec dans le sens de la longueur. Katherine s’écroula. Les mains recouvertes de sang et les yeux grands ouverts, Gabin souffla :

 — Merde… Qu’est-ce que j’ai fait ?

 — Mec, pas cool, fit Jean. Pas cool du tout.

 — Je… Je sais pas ce qui m’a pris. J’ai eu peur.

 — T’as déconné.

 — Ouais… ‘Fin, c’est pas si sûr… J’ai peut-être bien fait… Peut-être que… Qu’elle allait s’en prendre à nous… On est sauvés maintenant.

 — Je suis vraiment triste. T’aurais pas dû faire ça. Je la croyais moi.

 — On peut faire confiance à personne. Je crois que j’ai compris. Je suis déboussolé parce que j’avais encore jamais tué, mais on va devoir le faire maintenant, tous les deux. On ne vit plus dans le même monde que la semaine dernière.

 — Si tu le dis…

 — Bon, Jean, je suis désolé que ça te cause de la peine, mais c’était nécessaire. Maintenant, il faut qu’on rejoigne ta mère et les autres à la Nouvelle Ligne.

 — Ouais…

 — Prenons de quoi tenir la route, il faudra qu’on puisse se défen…

 Gabin s’étrangla au milieu de sa phrase. Le corps de Katherine s’était mis à bouger. En quelques secondes, elle se releva, la gorge totalement reconstruite.

 — Qu’est-ce que…

 — Vous n’auriez jamais dû faire ça, fit Katherine, le visage couvert de son propre sang.

 — Je suis désolé, je voulais pas ! s’écria Gabin.

 La femme morte-vivante s’approcha d’eux et posa délicatement ses mains sur leurs épaules.

 — Ce n’est pas très grave, je comprends la réaction. Seulement, j’ai dû puiser beaucoup d’énergie pour me régénérer. Cela a réduit le temps que je pourrais tenir avant de vouloir tuer.

 — Pardon, pardon, s’excusait Gabin, à la limite du sanglot.

 — Oublions cela.

 — Alors, tu ne vas pas nous bouffer ? demanda Jean.

 — J’espère que non.


 Katherine passa entre les deux adolescents et se dirigea vers l’évier. Elle s’aspergea le visage d’eau sous leurs regards incrédules et apaisés, puis se l’essuya avec un torchon. Quand elle se retourna vers eux, ils remarquèrent que sa peau était bien moins colorée qu’avant.

 — Allons à la Nouvelle Ligne, fit-elle. Je vous accompagnerai, vous aurez bien besoin de ma protection.

 Les jeunes hommes s’échangèrent un regard puis acceptèrent.

 — Je t’avais dit qu’elle pourrait nous défendre sur la route, rappela Jean.

 — Tu n’as jamais dit ça, soupira Gabin.

 — Ah bon ? En tous cas je l’ai pensé très fort.

 Ils enlevèrent leurs affaires d’école de leurs sacs à dos pour les remplacer par le plus de nourriture possible, et quelques armes blanches. Alors qu’ils empaquetaient le tout, leurs deux téléphones vibrèrent en même temps. Katherine jeta sur eux un œil méfiant.

 — C’est Dimitri, dit Jean en déverrouillant son cellulaire. Il a envoyé un message sur la conv’ de classe.

 — Sérieux ? Qu’est-ce qu’il dit ?

 — « Wsh pk ya persoonne a lecole ya pas cour ou quoi? »

 — Mais il est dix heures passées là, pourquoi il remarque ça que maintenant ?

 — Ce serait pas la première fois qu’il arrive en retard.

 — Qui est ce « Dimitri » ? s’interrogea Katherine.

 — Un camarade de classe, répondit Gabin

 — C’est un vrai boloss ! ajouta Jean. Un casse-couille qui se prend pour une kaïra.

 — Je vois.

 — Attends mais s’il est à l’école, raisonna Gabin, il va se faire tabasser comme le petit Sébastien !

 — Et alors ? On s’en fout de ce gars !

 — C’est un sacré con, c’est vrai, mais chaque vie est précieuse, surtout par les temps qui courent.

 — Mouais…

 Gabin envoya un message sur la conversation de classe, intimant à Dimitri de ne surtout pas entrer dans l’école, de les attendre devant et de ne pas s’approcher des hommes en costume.

 — On va le chercher, dit-il pendant qu’il écrivait.

 — Pfff, vraiment ? C’est même pas sur notre chemin !

 — C’est pas très loin, il faut qu’on le fasse.

 — Ok ok…


 Prêts à partir, Katherine mena la marche. Elle s’assura que les rues étaient désertes avant de mettre un pied dehors. Par habitude, Gabin referma la porte à clef. Alors qu’il allait proposer à Jean de mettre leurs téléphones en silencieux, ils vibrèrent à nouveau. Gabin s’exaspéra ; Dimitri s’était contenté d’un simple :

« Pk ?

Vous

Pas le temps de t’expliquer

On est là dans 5min

Bouge pas

Jean Moula

Te fais pas repérer mec sinon tu vas te faire buter

Dimi3

Zetes chelous les gars mdrrr

Jcapte pas votre delire

Jean Moula

C’est toi qui es chelou !

Vous

Vraiment fais-moi confiance

L’ecole est envahie par des tueurs

C dur à croire mais c vrai

Jean Moula

Cet homme dit vrai

Dimi3

Zavez trop maté de films les gars mdrrr

Vous

Dans le doute ne bouge pas d’où tu es

Dimi3

GT sur le point de rentrer chez oim

Vous

T’es devant la grille là ?

Dimi3

Vous

Planque-toi derrière le petit muret alors et ne fais plus de bruit

Dimi3

Ok jcommence à flipper là

Pk personne d’autre répond ????

Jean Moula

Fais nous confiance si tu veux vivre bro

Dimi3

Vazi jfais ça »


 Ils rangèrent leurs téléphones dans leurs poches. Gabin demanda à Jean à ce qu’il sorte son pistolet de son sac, prêt à tirer. C’est alors que Katherine murmura :

 — Là-bas. Il y en a un.

 Jean plissa des yeux et vit une silhouette déambuler de l’autre côté de la rue.

 — Planquons-nous derrière une voiture, proposa-t-il.

 — Pas bête, pour une fois, complimenta Gabin.

 — Je sais, je sais. C’est une dame que j’ai croisé qui m’a dit de faire ça.

 — Tout s’explique, ce n’était pas ton idée.

 — Taisez-vous, chuchota vivement Katherine. Il pourrait nous entendre.

 — Il aurait déjà dû nous voir là pourtant, constata Gabin. Il est aveugle ?

 — Quand nous n’avons pas absorbé de vie depuis longtemps, expliqua Katherine, nos sens s’amenuisent. Impossible de savoir à quel point par contre, donc restons prudents.


 Ils s’abaissèrent derrière une grosse BMW noire. Ils remarquèrent alors un second homme en costard qui s’approchait en sens inverse sur le trottoir d’en face. Gabin analysa rapidement la situation. Les deux zombies se croiseraient approximativement au niveau de la BMW. Cela ne signifiait qu’une chose ; s’ils restaient cachés derrière, ils se feraient obligatoirement repérer.





 … Je dois avouer que je ne sais pas trop ce qu’il se passe avec cette histoire. Ça me dépasse complètement. Je n’ai plus le contrôle sur rien.

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