28. Le Bon, la Brute et l'Espion

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Nous vous présentons nos excuses pour le retard de parution, mais il se trouve que nous sommes actuellement en phase de recherche active d'informations pour notre prochain récit (ou pas... On se prenait peut-être juste un verre en terrasse). Toujours est-il que mon co-auteur est en séjour dans mon coin et que nous en profitons pour nous voir et papoter.


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Arthur

- Mais, qu’est-ce que vous avez fait ?

Je regarde la scène qui se déroule devant mes yeux sans vraiment comprendre ce qu’il se passe. En effet, ils sont tous là, réunis comme s’ils allaient se faire fusiller, les bras levés et les mains sur la nuque, entourés par un groupe de militaires dirigés par Collins. Enfin, quand je dis tous, ce sont tous les hommes Silvaniens du campement. Les soldats ont tous leurs armes sorties et maintiennent dans leur ligne de mire le groupe de réfugiés qui restent silencieux mais jettent des regards meurtriers vers les militaires. Je me demande où est Snow et pourquoi il laisse faire ça. En son absence, je prends mes responsabilités et m’approche de Collins.

- Qu’est-ce qu’ils ont fait qui mérite une telle humiliation ? Vous voulez créer une révolte ? Vous êtes fou ou quoi ?

- Quelqu’un a fouillé dans les affaires du Sergent Snow et dans la chambre du Lieutenant. On a rassemblé tous les hommes du camp pour les faire parler et les faire avouer.

- C’est le Sergent qui vous a demandé ça ?

- Non, le Sergent est en communication avec le Colonel, mais on a agi avant qu’ils puissent faire disparaître les preuves. On réfléchit, nous, Zrinkak, on n’est pas des imbéciles.

Je le regarde, incrédule. Il croit vraiment que ce qu’il est en train de faire est intelligent. Le con. Je vois le regard plein de colère des hommes qui sont ainsi parqués entre les militaires. Je n’ai aucun pouvoir pour les faire libérer à part aller chercher Snow. Même si l’espion du Gouvernement est parmi eux, ils sont bien trop fiers pour l’avouer. Cette mise en scène est inutile et dangereuse.

Je me retourne vers les Silvaniens et leur dis dans notre langue que je reviens vite et que je vais gérer l’affaire. Ils me lancent des regards reconnaissants et je me précipite à l’étage dans la salle des opérations où je retrouve le soldat Morin qui a l’air bien affolé et qui prend des notes et Snow en train d’échanger avec le Colonel.

- Snow, il faut venir, tout de suite. Collins a fait une grosse connerie.

- Je suis occupé, là, Arthur. Qu’est-ce qu’il a fait encore ? Tu m’étonnerais davantage si tu me disais qu’il a fait quelque chose de bien.

- Il est prêt à fusiller tous les hommes du campement pour trouver qui a fouillé dans tes affaires et celles de la Lieutenant ! Il est fou, il faut l’arrêter avant que ça ne dégénère !

- Bordel, je vous rappelle, Mon Colonel. Toutes mes excuses, bougonne le Sergent en se passant la main sur le visage tout en fermant l’ordinateur sans attendre la réponse de son supérieur. Faut toujours que Ju soit absente quand c’est la merde. On y va.

- Peut-être que c’est Julia qui empêche que la merde arrive, dis-je, vraiment énervé contre Collins et tous ces soldats qui, dès qu’ils le peuvent et qu’on leur lâche la bride, se transforment en brutes sans cerveau.

- Ils pensent bien faire et suivent les ordres. Et puis, quelqu’un nous a trahis, fouille dans nos affaires, c’est pas un vol de rations je te rappelle. Je déteste quand on chie dans nos bottes. Morin, sors-nous la liste des réfugiés et prépare la salle pour les interrogatoires.

- C’est toi qui leur as donné les ordres de rassembler tout le monde à la pointe de fusil ? Mais tu es aussi con que Collins ou quoi ? Comment tu crois qu’ils puissent faire ça alors que pas un Silvanien ne vient par ici ?

- Non, je n’ai pas donné cet ordre, évidemment que non, rétorque-t-il brusquement en me fusillant du regard. Me compare pas à cet abruti sinon ça va barder pour ton matricule. Je n’ai pas donné cet ordre, mais tu comprends bien que je ne peux pas imaginer que l’un de nos homme nous ait trahis. Je donnerais ma vie pour chacun d’eux, et l’inverse vaut aussi.

- Tu dis qu’ils suivent les ordres, les ordres de qui alors ? Et si c’est l’un d’eux, il a fait comment pour venir jusqu’à la chambre de Julia ? C’est pas possible, Snow. Ou alors, c’est que tu penses que c’est moi qui ai fait ça. Je suis le seul à venir ici depuis le reste du camp. Réfléchis, bordel. Et libère les mecs qui sont en train d’être parqués sous les fusils de tes hommes sinon on court à la catastrophe !

- Ils suivent les ordres de Collins. T’es con ou tu le fais exprès ? Tout est possible ici, l’un d’eux a pu passer discrètement, on n’est pas beaucoup pour assurer la sécurité de ce côté là du camp, marmonne-t-il.

- Il faut mettre fin à ce cirque, Snow. Tout de suite avant qu’ils ne se battent entre eux. Tu ne peux pas laisser faire cette mise en scène, on se croirait dans un film où les nazis prennent des otages pour les faire parler. Tu te rends compte de la violence du truc ?

- C’est bon, c’est bon, je descends calmer le jeu, mais ça ne m’empêchera pas de leur poser des questions, Arthur. Il faut qu’on trouve celui qui a fait ça, on ne peut pas se permettre de laisser un traître se balader ici comme si de rien n’était. Crois-moi, je vais m’arrêter au grade de sergent, je déteste devoir gérer ce genre de choses, soupire-t-il.

Je le précède dans les escaliers et Morin nous suit également. Quand nous débarquons tous les trois dans la cour, j’entends Collins gueuler en français sur les réfugiés.

- C’est qui le salaud qui use sa grande gueule pour nous mettre en danger ? Faites pas semblant de pas me comprendre, sinon c’est mon fusil qui va vous faire parler !

- Wow, Collins, on se détend, là ! vocifère Snow en se plaçant entre le soldat et les réfugiés. Baissez vos armes immédiatement ! Ça va pas la tête ? Depuis quand on maltraite les gens qu’on protège ?

- Depuis qu’ils nous mettent en danger Sergent. Il faut les faire parler, ces cons. Sinon, demain, on se fait encore bombarder !

Sur ces paroles, c’est ma mère qui débarque et qui vient mettre son grain de sel en sortant elle aussi son arme et en visant directement Collins.

- Vous avez quinze secondes pour arrêter cette mascarade ou je vous mets une balle entre les deux yeux, soldat. Réfléchissez vite.

En un quart de seconde, tous les militaires présents ont pointé leur arme en direction de la Gitane. Je me précipite vers elle et me mets devant son arme dressée, sous les yeux ahuris de tous les participants à cette scène toute droit sortie d’un mauvais film de guerre.

- Arrête, Maman. On est en train de régler les choses.

- En nous menaçant avec vos armes ? C’est ça être soldat de l’armée française ? C’est ça être ici sous un drapeau de l’ONU ?

- Bon, ça suffit maintenant ! Tout le monde baisse son arme illico ou je vous promets que je vais me faire un malin plaisir de vous trouver les tâches les plus ingrates imaginables sur ce camp ! On va respirer un coup et se calmer ! s’égosille un Snow beaucoup moins à l’aise que d’ordinaire alors que les hommes baissent lentement leurs armes. Arthur, j’ai besoin de toi pour expliquer aux Silvaniens la situation, maintenant.

- Tu veux que je leur explique quoi ? Qu’ils sont suspectés de trahison ? Que l’armée n’est même pas capable de défendre ses propres quartiers ?

- T’y mets pas toi aussi, bordel ! Tu crois que j’ai besoin de ça, là ? Bordel de merde, je jure que… Ah, Julia va m’entendre quand elle va rentrer, putain, bougonne-t-il avant de souffler lourdement. Dis-leur qu’on a besoin de leur aide, que nous pensons que quelqu’un cherche à divulguer des informations à l’armée silvanienne et qu’on va leur poser quelques questions pour savoir s’ils savent ou ont vu des choses, c’est tout. Clair ?

- Sergent, dit alors en Silvanien une voix féminine dans la foule qui s’est amassée autour de la scène. Il faut poser des questions à ce soldat-là, il était ce matin près de l’enclos des vaches à écrire en cachette.

Tous les regards se portent sur la voix de Lena, la jeune fermière qui pointe un doigt accusateur vers Morin qui, même s’il n’a pas compris ce qu’elle a dit, se décompose littéralement sous le regard qu’elle lui porte.

- Snow, elle dit que c’est Morin, l’espion, qu’elle l’a vu écrire en cachette près des vaches. Et que c’est à lui qu’il faut poser des questions.

- Morin ? demande Snow, totalement abasourdi avant de se tourner vers le soldat. Morin, vraiment ? C’est toi ? Qu’est-ce que tu foutais là-bas ? A qui tu écrivais ?

Tout de suite, Collins et plusieurs militaires pointent leurs armes vers lui et le mettent en joue. Il jette des regards affolés autour de lui, cherchant visiblement une voie de sortie mais, n’en trouvant aucune, il lève lentement les bras en l’air avant de s’effondrer, en pleurs, et de s’agenouiller à même le sol devant Snow. Le Sergent a l’air blessé et une froide colère s’empare de lui vu comment son corps se tend. J’ai l’impression qu’il va sortir son arme et fusiller directement Morin sous les yeux de tout le monde.

- Snow, arrêtons le spectacle. Fais-le emmener dans la salle des opérations sous bonne garde, on va l’interroger. Et renvoyons tous les autres à leurs occupations, tu ne crois pas ?

- Oui… Présente-leur mes excuses pour cette situation que je n’ai pas voulue, tu veux ? dit-il avant de se tourner vers les soldats. Collins, emmène Morin dans la salle des opé, j’arrive. Que tout le monde retourne bosser !

- Je viens avec vous, intervient ma mère, sans laisser le choix à Snow. J’ai besoin de savoir pourquoi il a fait ça et ce qu’il a dit. J’ai pas envie que mes troupes soient en difficulté à cause de lui.

Snow soupire et acquiesce en suivant les soldats qui font avancer Morin sans ménagement vers le bâtiment. J’explique en Silvanien que Snow présente ses excuses et que je reverrai la situation avec Julia à son retour pour que ça ne se reproduise plus. Plusieurs voix s’élèvent pour demander le départ de Collins, notamment celle du Commandant qui le traite d’incompétent dangereux pour lui et les autres. Je promets de faire le maximum pour le faire partir du camp et les invite à regagner leurs tentes et leurs occupations. Lorsque je rejoins la salle des opérations, j’y retrouve Morin, menotté, au centre de la pièce, avec Collins qui le surveille et Snow, visiblement toujours sous le choc de la révélation, assis en face de lui. Ma mère est un peu à l’écart mais observe elle-aussi la scène.

- Je vais tout vous expliquer.

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