1er juin 1771

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Je n’ai guère eu le temps de souffler. Encore une chaude journée, épuisante aux côtés de mon épouse. Alors que je souhaite m’enfermer dans une bulle sécurisante pour écrire mes prochains poèmes, elle est venue me déranger en pleine écriture. Elle court, essoufflée et s’accroche aux accoudoirs de mon siège. Je fronce les sourcils, très contrarié.

"Ne vois-tu donc pas que j’essaye d’écrire ?"

"Il y a plus important que tes poèmes d’arbres et de fleurs, Axel."

Et elle me raconte à quel point il est difficile de prendre une décision pour l’emplacement d’un meuble dans la bâtisse. Fortement agacé, je réponds sèchement :

"Je ne vois pas en quoi c’est une tâche bien compliquée. Vous les femmes connaissez où se placent les éléments de la maison. Je ne suis pas une femme, je ne peux décider pour toi".

Outrée, elle m’indique que ses parents viennent pour l’aider.

Après le déjeuner, c’est un défilé de domestiques qui envahit la demeure pour combler les attentes de Madame. Par politesse, je viens les aider à décider de la couleur de la tapisserie, des fauteuils et de la matière des rideaux. Monsieur de la Cambrière me dévisage longuement.

"Il vous aurait apparemment échappé une parole très blessante à l’encontre de votre épouse. Que cela ne se reproduise plus. La tenue de la maison est une affaire d’homme puisque c’est à vous de mener les opérations. Que je n’aie pas à me répéter."

Je frissonne sous l’avertissement. Elisabeth se retourne avec un sourire, satisfaite de l’effet escompté.

Madame de la Cambrière semble plus agitée, son cadavre se balade de pièce en pièce, elle vient même à rire avec sa fille. Une comparaison si flagrante entre cette femme bientôt enterrée et une jeune fille joyeuse et naïve. Elle l’envie. Deux heures de déménagement finissent par avoir raison de ma patience. Elisabeth convie ses parents à dîner au domaine, prétextant ne pas pouvoir leur payer un restaurent digne de ce nom. Elle fait référence aux caisses désespérément vides du palais.

Je peux enfin m’échapper. Dans l’après-midi, je réussis à m’évader dans les jardins du domaine. Je respire les odeurs, les parfums, observe les couleurs, le soleil déjà haut dans le ciel. Si les beaux-parents n’étaient pas encore là, j’aurais volontiers pris le temps de m’allonger dans l’herbe. Je n’arrive pas à respirer, à m’inspirer de cette nature pourtant si féconde. Que se passe-t-il ? Pourquoi n’ai-je tout d’un coup plus d’espoir en la vie ?

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