Chapitre 2 - L'été

5 minutes de lecture

Les mois qui suivirent cette étrange expérience, je décidai de me reprendre en main, je cessai d'être une peste insolente. Durant l’été précédent mon entrée au lycée, je remisais mes vêtements informes et je sélectionnais avec une attention toute particulière de nouveaux habits à la féminité affirmée. Jupes et robes échancrées, bottes et belles chaussures, chemisiers et hauts cintrés. Je me coiffais avec attention, et je me maquillais légèrement.

  Je passais un été étrange où mes efforts coïncidèrent avec une véritable transformation de mon corps, mes hanches s'affirmèrent, mes seins s’arrondirent, et mes fesses s'affermirent. Tout mon corps s'épanouit pour atteindre un parangon de beauté féminine. J'étais toujours aussi grande mais cette hauteur était devenu un autel exhibant fièrement la volupté de mon apparence. Mon visage lui aussi changea, mes lèvres qui autrefois n'étaient que deux traits fins s’ourlèrent pour devenir une bouche pourpre et pulpeuse, mes joues creuses se lisèrent laissant deviner de belles pommettes. Même mes yeux verdoyants prirent un éclat nouveau, ils brillaient comme deux magnifiques turquoises.

L'été éblouissant

la fleur s’épanouit

et la beauté naquit

un visage ravissant

et un corps séduisant

Lors de la rentrée au lycée, les garçons restèrent la mâchoire pendante en me découvrant. J'eus un succès foudroyant auprès de la gente masculine alors que les filles me vouèrent rapidement une intense haine. Mais je l’avoue être l’objet de toutes les attentions, de l’envie et de la jalousie, m’enchantait. Malheureusement mon ancienne amie pris ses distances, je ni prêtais pas grande attention, pensant qu'elle était sans doute jalouse, comme toutes les autres.

Je traversais mes années lycées à la vitesse d'une étoile filante. J'avais pu découvrir le pouvoir de la séduction et j'en usais et en abusais aussi bien auprès de mes camarades que des professeurs. Je réussis de justesse mon baccalauréat grâce à mes charmes et à l'avance que j'avais prise au collège. Car il faut le dire je ne travaillais plus comme avant, je ne me terrais plus dans cette chambre, cette obscure caverne devenue trop petite pour moi. Les livres n'avaient plus pour moi le même parfum, maintenant que j'avais goûté à une vie épanouie bien réelle. J'avais un succès fou et j'étais toujours invitée à des soirées, tantôt à des fêtes, tantôt au cinéma et parfois au restaurant.

***

Après le lycée mes parents m'avait pressé de m'inscrire en littérature à l'université de La Sorbonne, j'avais cédé en espérant pouvoir profiter des avantages de Paris. Après des recherches frustrantes, je finissais par trouver un modeste appartement rue des Gobelins et je m'installais enfin dans la ville lumière. Durant ces années parisiennes, j'étudiais assidûment... les boites de nuits, les magasins et les plaisirs des sens. Je récitais toutes... les chansons à la mode ; et je faisais des recherches dans... toutes les discothèques et tous les bars branchés.

Je me faisais rapidement un nom dans la société noctambule, j'étais devenue une héroïne de la vie nocturne parisienne. Lorsque j'arrivais, les hommes me déshabillaient des yeux et les femmes me lançaient des regards tantôt vindicatifs, tantôt plein d'envies. J'étais désirée et admirée, rien d'autre n'avait plus d'importance. Mes études n'étaient qu'une excuse, un alibi à ma venue dans cette ville qui n'avait attendu que moi ! Mais j'étais maintenant là ! Moi, une nouvelle étoile éclairant un peu plus la ville lumière. Je passais mes matinées à dormir, mes après-midi dans les grands magasins, et mes soirées à danser, rire, boire et draguer. J'avais trois amants réguliers et de nombreuses aventures sans lendemain.

L'un de mes hommes régulier était un Trader, un flamboyant courtier aux cheveux bruns qui m'offrait de nombreux cadeaux coûteux. Après une année de relation, nous nous fiancions en gardant nos mœurs libres de noctambules. Nous allions à deux dans les établissements de débauches pour en sortir parfois au bras d'une autre personne.

 Peu de temps après je me faisais repérer par une agence de mannequins et j'offrais mes formes sensuelles pour exposer de la lingerie aux yeux du monde entier. Tout allait pour le mieux et, j'abandonnais officiellement mes études après ces quelques années d'ascension vertigineuse. Mais je savais que je pouvais faire mieux, je pouvais atteindre des sommets, aller plus haut, plus loin. J'avais pour objectif de faire du cinéma et de chanter.

***

Nous allions régulièrement aux Bains, lieu de rendez-vous de la jet-set parisienne, des célébrités, acteurs et chanteuses. Un de ces soirs là, dès notre entrée en piste nous nous séparâmes comme à notre habitude pour vivre chacun de notre coté nos plaisirs des sens. J'étais rapidement assaillie par des hommes et des femmes avides de me connaître dans les moindres recoins. Je les chassai sans leur prêter la moindre attention, comme les insectes insignifiants qu'il étaient. Car je fixai mon attention sur un jeune acteur dont j’appréciais particulièrement les qualités esthétiques et dont j’espérais découvrir les performances… artistiques.

 La poitrine orgueilleuse, un sensuel déhanché à chaque pas, l’œil coquin, un sourire aguicheur aux lèvres, je montai en scène. Le premier contact était des plus prometteurs, ses yeux se figèrent sur mon décolleté, ses paroles se firent séductrices et engageantes. Mais alors que je parlais, il haussa un sourcil et fit une moue dégouttée, il s'excusa et battit en retraite. J'étais ébahie, jamais on ne m’avait traitée ainsi, moi la plus belle, la plus désirée des femmes de la capitale, comment osait-il m'humilier en public, ce petit saltimbanque. J'étais furieuse et je me promettais de lui faire payer cet affront plus tard, pour l'instant il y avait encore tant de plaisirs auquel je pouvais goûter.

Je buvais et je m'approchais d'autres hommes, mais la chasse était plus dure que d'habitude, les proies se faisaient plus rétives qu'à l'accoutumée. Je finis par me rabattre sur une jolie jeune femme au visage angélique, le portrait de la naïveté. Elle semblait perdue, elle regardait de toute part, démunie, je l'approchais bien décidée à ne pas finir seule la nuit. Alors que je lui parlai, elle me fixa et elle m’interrompit en pleine phrase pour m’indiquer que mon maquillage coulait. J'étais étonnée car je n'utilisais presque aucun de ces artifices nécessaires aux femmes banales. Je m'excusais auprès d'elle, en insistant sur le fait que j'allais revenir, et je partais faire un tour aux toilettes.

Le miroir me renvoya une image effrayante, de lourdes poches flasques pendaient sous mes yeux, j'avais le teint crayeux et mes yeux avaient l'éclat terne d'un soleil mourant. Je tremblais horrifiée, sans comprendre, jamais durant ces années je n'avais eu une mine si affreuse. Je réfléchis et me persuadai que j'avais dû trop tirer sur la corde, c’était sans aucun doute le contre-coup de ces dernières semaines durant lesquelles je n'avais que peu dormi. Je pris de l'eau dans mes mains et je me rafraîchissis le visage en prenant garde de ne pas faire couler le peu de maquillage que j'utilisais. Je me regardai vexée et je m'interrogeai pour trouver un moyen de quitter les lieux en toute discrétion. Je tirai mon mobile rutilant de mon sac à main de luxe, des objets des marques les plus en vogue, j'appelai mon fiancé et je lui indiquai que j'étais fatiguée, que je rentrais.

 Je traversai la boite de nuit rapidement en regardant mes pieds sans répondre aux quelques paroles qui me furent destinées. Je pris un taxi pour rentrer sans mon fiancé dans notre bel appartement de la rue Daru, dans le 8eme arrondissement. Un véritable petit palais étincelant d'objets chics et strass. Je pris une douche chaude et après m’être essuyée délicatement le corps j'allai m'affaler sur notre immense lit aux doux draps de soie et aux subtiles motifs asiatiques.

Annotations

Vous aimez lire Guillaume Etuy ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0