Ma vie réelle

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Je suis réveillée par une main qui me caresse le visage. J'ouvre les yeux lentement, et aperçois le visage de ma mère, face à moi. Ses yeux sont rouges et gonflés, et elle affiche un air triste. Je pose alors une main sur son bras, et lui souris :

 - Maman... tu as encore pleurée ? lui dis-je, voix basse.

Elle soupire, et caresse ma tête :

 - Comment tu vas, ce matin ? Le docteur m'a dit que tu avais fait une crise de panique... c'est encore ton traitement que tu ne supportes pas ?

Je lui caresse la main, tendrement. Je suis très affaiblie, et il est difficile pour moi de bouger mon bras. Je lui souris de plus belle, et tente de la rassurer, malgré mon triste état :

 - J'avais encore fait un rêve... depuis que je suis sous traitement, je fais toujours ce rêve, je suis à terre, gravement blessée, et un homme soigne ma blessure...

Une larme coule sous ses yeux, et elle l'essuie rapidement. Elle soupire, et reprend :

 - C'est peut-être les effets secondaires du médicament... le médecin m'a dit que pour le moment, tu devais continuer à le prendre. Si ta santé s'améliore, on pourra alors réduire progressivement la dose...

La porte s'ouvre soudainement, et mon petit frère s'approche de moi. Il affiche un air triste, lui aussi. Il m'a apporté quelques livres, et les pose sur la table de chevet, à côté de moi. Je le regarde, sourire aux lèvres.

Mon petit frère, je l'aime énormément. Il a eu dix-huit ans hier, et au lieu de fêter son anniversaire avec ses amis, il a passé la journée à flâner dans des librairies, pour trouver des livres que je voulais absolument. Il passe me voir tous les jours, et d'un côté, ça me fait mal au cœur de le priver de sa jeunesse. Il devrait sortir, voir ses amis, trouver une petite amie... au lieu de ça, je le monopolise, à cause de mon cancer...

Il pose sa main sur mon front, pour prendre ma température, et m'y donne un baiser. Il me prend la main, et me voici encerclée des gens que j'aime le plus au monde.

 - Ça va, sœurette ? Tu vas être contente, j'ai trouvé des livres sur l'histoire du Japon, du temps des samouraïs, comme tu me l'avais demandé. Ça n'a pas été facile, mais pour toi, je pourrais même attraper une étoile !

Je décroche un rire, et lui baise la main :

 - Merci beaucoup, c'est très gentil... au fait, demain je ne veux pas te voir traîner ici, d'accord ? Hier c'était ton anniversaire, et je voudrais que tu puisses le fêter. Tu as besoin de changer d'air, et moi j'ai besoin que mon petit Aaron s'amuse. Compris ?

Il fronce les sourcils :

 - Tu plaisantes ? Je n'ai vraiment pas envie de m'amuser en ce moment...

Je le regarde, en faisant la moue :

 - Je ne vais pas disparaître du jour au lendemain... s'il te plaît... fais ça pour ta grande sœur...

Il hausse les épaules, et regarde ma mère, qui me fait un léger sourire.

Je me tourne en direction des livres, et tente d'en attraper un, difficilement. Mon frère le prend, et le pose sur mes jambes. Je regarde la couverture, et reconnais cet uniforme de guerre, que je revois constamment, sur l'homme qui noue un ruban autour de ma plaie. Je lève les yeux sur Aaron, et lui souris :

 - Je vais avoir de quoi m'occuper aujourd'hui, c'est super ! Et maman, toi aussi tu devrais te reposer demain. D'accord ? Je vais étudier ces livres, tout ira bien. Je vous appellerai en soirée, pour vous donner des nouvelles, pour vous rassurer.

 - Tu es sûr ? Je n'ai pas envie de te laisser seule...

 - Maman, ne t'en fais pas. Si je le demande, c'est que je peux gérer une journée seule, j'ai vingt-cinq ans après tout...

La porte s'ouvre, et un infirmier vient à moi, avec une table roulante. Mon frère et ma mère se tournent, et me donnent un baiser, chacun leur tour, pour me laisser recevoir mes soins journaliers.

 - Nous allons prendre un peu l'air, moi et Aaron. Nous reviendrons dans la soirée, d'accord ? Repose-toi, si tu as besoin de quoi que se soit, tu m'appelles...

Je fais un large sourire à ma mère, pendant que l'infirmier prend ma tension :

 - Oui, maman ! Promis !

Ils me regardent une dernière fois, puis passent la porte d'un pas lent.

L'infirmier me fait un sourire, et prend la parole :

 - Tu as bien dormi ? Ta tension est un peu faible ce matin...

 - Ça va...

Il me regarde, et passe un thermomètre dans mon oreille pour prendre ma température, avant de contrôler mes perfusions :

 - Tu as encore fait ce rêve ? L'infirmière de nuit m'en a parlé quand j'ai repris le service. C'est sûrement dû au traitement.. ça devrait aller mieux dans quelques temps...

Je lui souris :

 - En fait... ce rêve est assez étrange. Il est tellement réaliste... je ressens vraiment les choses...

Il pose une main sur mon bonnet, et range son matériel, après avoir fini mes soins:

 - Je vais te laisser te reposer... si tu as besoin de quelque chose, tu appelles. Je viendrai rapidement.

 - Merci Baptiste !

Il prend soin de poser les livres à côté de moi, pour que je puisse les prendre sans trop d'efforts, me fait un dernier sourire, et passe la porte, qu'il referme doucement.

Me voilà seule, avec la montagne de livres que mon petit frère m'a ramenée. Il n'a pas plaisanté...

Je reprends le livre que je tenais tout à l'heure, et commence à lire la première page. Les samouraïs, sont des figures emblématiques de la culture japonaise. Ils étaient totalement voués à leur maître, dans une éthique vraiment stricte. L'homme qui s'occupe de moi, dans mon rêve, est donc un homme dont la vie devait ne tenir qu'à un fil, s'il ne se soumettait pas aux ordres qu'on lui imposait. Soigner ma blessure, me semble assez dérisoire, face à ce que je lis. Je voudrais pouvoir trouver une signification à ce songe régulier, et commence une longue lecture, pour en apprendre d'avantage. Je ne connais pas vraiment la culture japonaise, et faire continuellement ce rêve m'interpelle d'autant plus.

Je passe alors la matinée à m’interroger, à en apprendre plus sur l'histoire de ce pays, mais manquant de sommeil et de force, je finis par m'endormir, le livre posé sur mes jambes.

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