Chapitre 23

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La douleur à ma poitrine était intenable. On m’avait recousu laborieusement avec du gros fil. La plaie n’était pas belle à voir.

Mais mon état n’était pas le plus préoccupant.

Dans le coin de la petite pièce plongée dans le noir était allongé quelqu’un. Sa respiration était laborieuse. On avait recousu ses blessures de la même manière que la mienne, mal.

J’étais réveillé depuis plusieurs heures maintenant mais personne n’était encore venu. Allait-on laisser mon colocataire mourir sans rien faire ?

Malgré la douleur, je finissais par m’endormir, à moins que je ne perdais connaissance.

J'enchainais cauchemar sur cauchemar lorsque je me réveillais enfin en sursaut. Quelque chose clochait. Tout était trop silencieux. Après quelques instants, je me rendais compte que c’était la respiration de mon colocataire que je n’entendais plus.

Je me jetais vers lui en panique. Il ne devait pas mourir.

Je plaquais mon oreille près de sa bouche, aucun souffle n’en sortait. Les mains plaquées contre son torse, je commençais un massage cardiaque. Je sentais mes points de sutures tirer sous l'effort mais je persistais.

— Un ! Deux ! Trois !

Je prenais un maximum d’oxygène dans mes poumons et collais mes lèvres contre les siennes. Son torse se souleva puis redescendit. Il ne remonta pas. Je reprenais le massage.

— Un ! Deux ! Trois !

Je répétais plusieurs fois la manœuvre sans succès. De plus en plus paniqué, je me mis à hurler :

— A l’aide ! Il ne respire plus !

Je continuais à masser avec l’énergie du désespoir.

— Reviens, murmurais-je avant de hurler de nouveau. Venez m’aider ! Vous ne pouvez pas le laisser mourir !

J’entendais enfin des pas se diriger vers nous. Ils s’arrêtèrent derrière la porte.

— Aidez-moi ! Mon frère va mourir !

Je me figeais, qu’avais-je dit ? Je me tournais vers le visage du jeune homme inconscient. San. Comment n’avais-je pas pu le reconnaître ?

La porte grinça sur ses gonds. Je ne distinguais pas qui se tenait dans l’encadrement. On me repoussa contre l’un des murs, m’éloignant le plus possible de San. On attrapa ce dernier par les pieds pour le traîner vers la sortie.

— Ne le laissez pas mourir ! Je vous en supplie…

Des larmes coulaient de mes yeux, brouillant mon champ de vision.

La porte claqua…

— AAAAAAAAH, hurlais-je en me débattant dans mes couvertures.

Quelqu’un me plaqua une main sur la bouche et murmura :

— Chut, tu vas les attirer ici.

— Allumes la lumière, la pressais-je le cœur battant à tout rompre.

C’était une habitude que j’avais prise lorsque je faisais des terreurs nocturnes. Seule la lumière pouvait me rassurer et me convaincre que je ne rêvais plus.

— Tu sais bien que c’est impossible, Oswin.

— Kendra ? demandais-je entre deux sanglots.

— Oui, c’est moi. Est-ce que ça va ? chuchota-t-elle en essuyant mes larmes avec son pouce.

— San est mort, je l’ai vu mourir. Je lui ai fait un massage cardiaque mais il ne respirait plus, lâchais-je en un souffle. Puis ils l’ont emmené.

— Ce n’était qu’un cauchemar, m’assura-t-elle.

L’esprit encore embrumé, je refusais de la croire. Tout avait été si réaliste, même la douleur était là. Je tâtais ma poitrine mais ne trouvais pas de blessure similaire à celle que j’avais dans mon rêve. C’est alors que je comprenais.

— Je voyais par les yeux de Kaleb, marmonnais-je à moi-même.

— Qu’est-ce que tu racontes ?

— Kendra, je sais que tu vas trouver ça fou, mais je crois que j’ai vu par les yeux de Kaleb.

— Tu as raison, je trouve ça fou, rigola la brune.

Je fronçais les sourcils, vexé. Je la repoussais et me rallongeais.

L’autre souffla avant de prendre la parole toujours à voix basse :

— Oz, tu l’as dit toi-même c’est complètement insensé. Tu ne peux pas m’en vouloir de ne pas y croire.

Elle avait raison, pourtant je savais ce que j’avais vu.

— Il va bientôt faire jour, changea de sujet la jeune femme. La torture n’a pas l’air de marcher.

— Que veux-tu faire d’autre ? demandais-je toujours enroulé dans mes couvertures.

J’entendais Isis remuer, j’avais dû la réveiller elle aussi.

— Nous ne tirerons rien de l’ange, et l’homme…

— Il nous faudrait beaucoup trop de temps pour le faire parler.

— Nous n’avons pas de temps à perdre. Chaque jour diminue nos chances de les retrouver vivants.

— Je sais. Et il le sait aussi.

Isis avait dû attirer l’attention de Kendra car elle dit :

— Peut-être que ça pourrait marcher.

Je me redressais, je ne pourrais clairement pas me rendormir.

— Qu’y a-t-il ? demandais-je.

— Isis propose de les relâcher.

— Pour pouvoir les suivre ensuite ?

— Exactement.

§

Marcus s'extrayait avec méfiance du bâtiment, derrière l’ange était encore plus mal au point que l’homme. Une fois dehors, le volatile abandonna son codétenu sans un regard en arrière.

Nous observâmes la scène depuis le temps de l’immeuble d’en face. L’ange avait décollé avec difficulté et le reste de son vol avait été tout aussi désastreux.

Comme le plan le prévoyait, Kendra se mit à suivre l’ange tandis que Isis et moi attendions que Marcus se décide à bouger. Ce qu’il fit enfin après avoir gracieusement arrosé le palier de son urine. Décidément, cet homme me dégoûtait au plus haut point.

Il avait du mal à marcher, peut-être que nous y étions allés un peu fort. Mais cela nous permettait de le suivre bien plus facilement. Il marchait au milieu de la route, à la vue de tous, après tout, il était sous les ordres des anges. Je me demandais d’ailleurs comment les anges savaient qu’il ne fallait pas tuer cet homme en particulier.

Avaient-ils tous vu sa photo ? J’en doutais. Marcus devait surement avoir une sorte de laissez passer.

L’homme marcha ainsi pendant des heures, on aurait dit qu’il se promenait. A moins qu’il ne nous promenâmes nous. Au moins, il ne marchait pas vite et semblait aller dans la même direction que l’ange.

Il fit halte pour la nuit dans un parc, nous l’imitâmes et installâmes un tour de garde pour éviter de manquer son départ. Pourtant, il dormit jusqu’à presque midi le lendemain. Il n’avait clairement peur de rien. On ne pouvait pas dire non plus qu’il essayait de nous semer, dans l’éventualité où il nous ait remarquées.

Nous le suivâmes ainsi pendant plusieurs jours. Il ne faisait rien de spécial, errant d’un bâtiment à l’autre, pourtant sa direction générale ne changeait pas. Il nous faisait clairement traverser tout Paris.

Isis et moi commencions à croire qu’il n’avait pas vraiment de but lorsque les anges commencèrent à se faire de plus en plus nombreux au-dessus de nous. Nous devions faire très attention à ne pas nous faire repérer, contrairement à Marcus qui avançait tranquillement au milieu des grandes avenues.

Nous nous étions arrêtés, observant notre homme s’engager sur le périphérique lorsqu’un ange descendit vers lui.

Ils semblaient discuter et l’ange ne semblait pas content de ce qu’il entendait. Il l’attrapa pourtant par le bras et décolla avec lui. Marcus, pendouillant par le bras, nous fit signe de sa main libre. Il savait donc que nous étions là.

Je serrais le poing et le regardais s’éloigner dans les airs.

Isis se tourna vers moi et articula :

— Que fait-on maintenant ?

— On retrouve Kendra, en espérant que son ange l’ai amené près d’ici.

— D’ailleurs, où sommes-nous ?

— Près du Parc des Princes.

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