Si je n'étais pas...

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 Si je n'étais pas un loup affamé, je serais un dauphin, suivant, avec intelligence mais simplicité, les déclinaisons de la mer et du ciel, et des fascinantes barques des Homo Sapiens, loin, bien loin du chant rauque du corbeau - jamais plus !

 Si je n'étais pas une feuille morte, je serais une rose rouge passionnée dont les effluves sauraient entrouvrir des lippes brûlantes et tout irriguées au dedans...

 Si je n'étais pas le pays perdu de l'imaginaire, je serais cette lisse lande si mystérieuse, où, ainsi qu'un explorateur de Jupiter, le voyageur, sur une barque perdue entre ciel et terre, attiré par les notes inexplicables de Sigur Ros doit passer par un chemin opaque, où des voiles de drakars et des brouillards vikings recouvrent la source de ce chant...

 Si je n'étais pas une spéléologie égarée dans les tréfonds inutiles d'une âme superflue, je serais un alpinisme autrement plus élevé, et autrement plus victorieux !

 Si je n'étais pas mille musiques, je serais, peut-être, Looking for the summer, et même je trouverais l'été...

 Si je n'étais pas le s à demi effacé de mon clavier usé, je serais un glorieux R rieur et charmeur !

 Si je n'étais pas une poche trouée comme par l'idée d'une Dana oubliée, manque indéfini creusé profond dans ma peau, je serais un long manteau vert foncé, honorable, dont la superbe se déploierait au vent façon Lelouch.

 Si je n'étais pas une plume déjà usée, éraflée, piétinée, je serais un livre qui passerait les âges, comme un grimoire pris dans la glace qui, réchauffé auprès d'une âtre anonyme, éclabousserait les hommes de sa sagesse et sa magie, dans la poussière de son enchantement antique - et signé Rêveur...

 Si je n'étais pas un gris asphalte si légèrement inspiré de vert, je serais un violet sombre mais brillant comme un éclat d'améthyste qui tacherait le ciel d'horreurs mystiques.

 Si je n'étais pas ce radeau enseveli sous des flots ultraterrestres, que je gare au port, tout penaud, pour 3 Schillings, je serais un vaisseau incomparable qui naviguerait de l'océan à l'espace, et jamais ils n'oublieraient mon nom !

 Si je n'étais pas une armoire enténébrée où pourrissent des cauchemars spectraux de films d'horreur, je serais un lit simple mais doux, amoureusement planté face à une lucarne qui lui sussurerait les passages du jour à la nuit, et de la nuit au jour, et où l'on verrait, pour se reposer enfin et s'abandonner à un rêve heureux, tout entre les nuages, un corps, ou bien peut-être deux...

 Si je n'étais pas Rêveur, je serais Rêveur.

 Si je n'étais pas un rare point-virgule, discret, toujours prêt à défendre son rôle, je serais une virgule légère et subtile qui irait partout insuffler des virages heureux aux phrases, en toute liberté, comme afin de lier tout l'uni-vers du monde littéraire.

 Si je n'étais pas un tartare indigérable et si maladroitement recouvert d'herbes parfumées comme en un essai de bouquet, je serais un mi-cuit au chocolat, fondant et fumant, recélant en mon sein un noir, noir secret, un noir, noir espoir, embrumé dans un hammam cacaoté, dont je sortirais ma tête brunie pour aller batifoler harmonieusement et - romantiquement - parmi la douceur blanche d'une crème anglaise, et mêler nos deux saveurs, si chaudement, jusqu'à être enviés de toutes les bouches !...

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