Les Petites Filles Modèles

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Notes sur Lily D. (cas n°456).


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Lily D., quatre ans, nous a été confiée sur demande de ses parents. Ils s’inquiètent de son comportement : des dessins dérangeants et déjà un regard bien affûté sur le monde, incompatible avec la société. Bien qu’elle soit sage, ils ont peur qu’elle devienne autre chose que la fille qu’ils désirent tant.


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Nous avons décidé de supprimer papier et crayons de sorte que Lily ne puisse plus exprimer sa créativité. Le test de QI nous révèle une intelligence de 115, ce qui est préoccupant. Le psychologue confirme un développement normal des capacités cognitives et une inclination vers des domaines peu pragmatiques (arts). Des mesures doivent être prises.


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Au réfectoire, Lily dessine dans son assiette, ce qui perturbe les autres petites filles. Ces dernières l’imitent et se mettent à jouer avec la nourriture au lieu de manger. Nous allons l’isoler pendant les repas. Elle ne mangera que des soupes.


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Devant le Disney du soir, Lily ne cesse de soupirer et montre des signes d’agitation. Nous lui avons posé un bracelet (modèle TD8) qui lui envoie une petite décharge électrique si une réaction négative est détectée.


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Lily regarde désormais les films Disney de la Sélection avec un grand intérêt, même les rediffusions qui l’agaçaient tant. On envisage de l’insérer dans un groupe de jeunes filles d’une même origine ethnique afin qu’elle pratique des activités féminines (couture, ménage, cuisine).


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Lily vient d’avoir neuf ans. Elle a commencé ses premières leçons pour apprendre à lire et à écrire. Comme le redoute l’équipe éducative, elle avance très vite, du coup, nous envisageons de ralentir l’enseignement en l’isolant de son groupe scolaire, qu’elle perturbe par ses capacités.


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Nous avons fourni à Lily de faux manuels de grammaire et conjugaison pour réduire son niveau en Français. De même, nous avons supprimé les matières telles que l’Histoire, la Géographie afin qu’elle se concentre sur l’essentiel. En lecture, Lily n’a désormais accès qu’aux nouvelles versions des contes de Grimm et Perrault, qui n’ont plus de sous-texte. Son cas fait débat : certains pensent qu’il faut l’équiper du TD8 en permanence, d’autres se contenter d’annihiler sa curiosité. C’est cette seconde solution que nous avons adoptée, après un vote à la réunion pédagogique du 20 mai.


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Lily montre de grands signes de dépression. Sur l’avis unanime de nos psychologues, ses parents ne doivent plus lui rendre visite jusqu’à ce que tout aille mieux. Il semblerait que Lily soit entrée dans une phase taciturne comme la patiente n°309 (haut potentiel). Le psychiatre lui a prescrit une prise d’anxiolytiques (Milexo - 24 mg) et l’installation d’une télévision dans sa chambre. Elle a accès à tous les films Disney, ainsi qu’à d’autres dessins animés, validés par l’équipe. Ils s’enchaînent selon une programmation à définir chaque semaine.


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Nous nous sommes rendus compte que Lily recrachait le Milexo. Dorénavant, nous le dissimulons dans ses repas. Quant à son penchant à éteindre la télévision, nous nous sommes arrangés pour que ce ne soit plus possible. Nous avons installé une caméra dans sa chambre pour observer ses réactions.


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Lily a tendance à se réfugier sous la couette et se boucher les oreilles. Nous avons donc décidé de l’attacher face au poste de télévision. Si elle ferme les yeux ou détourne le regard, le bracelet TX9, le dernier modèle en date, lui envoie une décharge violente. Nous avons eu recours à la sonde urinaire pour plus de commodité. Son cas divise l’équipe éducative, mais nous attendons de bons résultats malgré ces contretemps. Jusqu’ici, nous avons 100% de réussite dans notre programme.


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La première phase d’éducation de Lily est un succès, malgré une adaptabilité laborieuse. Nos deux psychologues valident son cas, tests à l’appui : nous avons fait de nets progrès ! Les anxiolytiques ne sont plus nécessaires. Ses parents veulent la voir. La visite annuelle est désormais envisageable.


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Lily a onze ans, elle est prête à être confrontée aux garçons. Dès demain, nous lui présenterons Joachim : un adolescent têtu, d’un QI de 83, plutôt laid, sans compétence ni talent particulier.


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Le premier contact avec Joachim ne s’est pas passé comme prévu. Nous avons reprogrammé la télévision : désormais, Lily n’a accès qu’à deux films en version alternative : La Belle et la Bête (la bête ne devient pas prince), Le Bossu de Notre Dame (avec Quasimodo comme promis). L’équipe éducative attend les résultats avec impatience.


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Nous avons enfin réussi à faire en sorte que Lily tombe amoureuse de Joachim. Le carnet que nous lui avions confié voici quelques jours (note 3116) lui sert de journal intime. Il témoigne de notre succès :

J’ème jauakim, je veu me marié avek et avoire dès enfans com dans les compte.

Les psychologues sont rassurés.


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La dernière étape de l’éducation de Lily est en marche. Sur nos recommandations, Joachim est de plus en plus détestable avec elle. Pour se faire pardonner de sa méchanceté, il lui offrira les cadeaux que nous avons prévus : des fleurs, des bijoux, des vêtements. Nous observerons les réactions de Lily attentivement derrière une vitre sans tain.


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Joachim parvient enfin à convaincre Lily avec des cadeaux. Le processus a été long ! C’est une réelle victoire pour l’équipe.


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L’attitude de Lily est de plus en plus positive ! Joachim peut dire et faire ce qu’il souhaite : l’humilier, la frapper, fricoter avec d’autres petites filles devant elle, elle lui pardonne tout, de plus en plus vite.

Dans le même temps, les Disney ayant fait leur effet, Lily visualise en boucle des documentaires qui l’instruisent du rôle de la femme dans son foyer (microcosme) et dans la société (macrocosme).


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La mission de Joachim s’est terminée aujourd’hui. Lily est dévastée à l’idée de ne plus le voir. La possibilité d’écrire un journal intime lui a été retirée. De nouveaux films sont programmés dans le téléviseur afin qu’elle l’oublie et puisse accueillir d’ici quelques semaines Jérôme. C’est un jeune homme encore plus médiocre que Joachim, d’un QI de 79, avec qui elle aura sa première relation sexuelle qu’elle le veuille ou non. Tout fonctionne comme prévu à ce stade.


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Lily a dix-huit ans. Docile, formatée comme il se doit aux exigences de la société, elle est enfin prête à rejoindre la foire aux femmes, trouver un mari et prendre part à la marche de la collectivité.


*


1

L’ancienne patiente n°456, Lily K., nous confie son garçon de 3 ans, Matéo (n°39478). D’après ses observations, le jeune garçon ne réagit pas aux petites filles et semble ne regarder que les individus du même sexe.

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