Chapitre 36 – des vagues à affronter

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Les mains crispées sur son bureau, Atkins attendait que l’immense crise d’angoisse qui s’abattait quotidiennement sur lui ne passe. C’était comme une vague qui le submergeait tout entier, le laissant haletant, choqué, incapable d’agir. Il fallait simplement la laisser s’amoindrir, refluer et finalement s’éloigner... jusqu’à la prochaine vague. Toute cette situation devenait ingérable pour lui, les modifications de la société lui semblaient honteuses et dangereuses.

Depuis qu’on lui avait retiré Perte, la discipline était moins évidente à faire appliquer au sein de la zone commune mais il avait trouvé des parades. Puis, un comité dédié au bien-être c’était formé et pleins de petites mesures étaient venues, les unes après les autres, modifier le quotidien des alphas. Tout n’avait pas été bouleversé, mais à présent, il n’y avait plus d’alphas restant à tout jamais en zone commune après un certain nombre de retour. Ils étaient tous présentés de nouveau dans des sessions très particulières où l’alpha choisissait si l’oméga face à lui était plaisant ou pas. Une hérésie à ses yeux.

Replacer Merwan était une erreur, il en était certain. Peu importait ce que pensait Leyn, tôt ou tard, il l’attaquerait, lui ou un autre et ferait, à nouveau, des blessés. Mais dans les dossiers du jour dont il devait s’occuper, il y avait Lidseï, un alpha bagarreur qui ne se maîtrisait ni face aux bêtas, ni face aux alphas et à peine face aux omégas. Il était normalement en isolement complet et ces idiots parlaient de le renvoyer auprès d’un oméga ? Ils ne se rendaient pas compte. Ils se laissaient amadouer par sa faiblesse apparente, mais ça, c’était lui Atkins, qui l’avait construit et s’ils l’enlevaient à son contrôle, l’alpha réapparaitrait tôt ou tard… et ce serait catastrophique. Sous ce dossier épineux, il y avait celui de Sorg, un vieil alpha d’une cinquantaine d’année qui avait fait énormément de dégât à son époque. Pensaient-ils qu’il avait changé ? Ce n’était pas le cas. Et la pile se poursuivait ainsi sur une dizaine de dossier...

Distraitement il posa les yeux sur la seule autre personne de la pièce, agenouillé dans un angle, lui tournant le dos. Kavri portait une muselière épaisse intégrée dans une cagoule et différents moyens de contentions sur le corps, tous reliés à des attaches fixées au mur. Il tremblait. Depuis quand était-il là ? Atkins réfléchit un instant avant de balayer la question d’un revers de main. Peu importe. Cet alpha était officiellement le sien, ça en ferait au moins un qui resterait hors d’état de nuire.

L’autre morceau du programme détestable qu’il n’était pas censé fuir était de trouver des activités ludiques les rendant heureux. Comment rendre heureux un alpha ? Frapper des omégas. Violer des omégas. Tuer des omégas. Hum… Ces gens n’avaient sans doute pas ça en tête, mais malheureusement, c’était la réalité, se disait-il. Régulièrement, il hésitait à abandonner son poste, les nouvelles propositions étaient justes intenables, elles ne permettaient aucune forme de compromis avec la discipline qu’il savait nécessaire. C’était la peur que tous ces alphas finissent hors de contrôle qui le bloquait, l’attachant à son rôle.

Il soupira la crise était en train de passer mais il était toujours aussi impuissant. C’était toute la société qui allait être impactée par ces changements et il ne pouvait rien, absolument rien, faire contre ça. L’action de Merwan était désastreuse et il pensait qu’il faudrait sans doute des années pour renverser la vapeur.

Pour le moment, les zones communes et leurs fonctionnements étaient la partie la plus évaluées mais suivant comment ça évoluerait, on leur demanderait peut-être des comptes sur leurs propres alphas ? Atkins rejeta un coup d’œil à Kavri. Ses muscles, symbole de sa puissance servant à rappeler aux omégas à quel point c’étaient des brutes épaisses, ses muscles avaient fondu sous l’inaction. Atkins n’avait pas besoin de rappel, il savait. La vue de cet alpha maigre, frêle et ainsi lié les horrifierait sans doute parce qu’ils ne comprenaient pas le potentiel destructeur de ces bêtes. Malheureusement, en leur offrant un peu plus de liberté, un peu plus de bonheur, tous ces omégas allaient souffrir et apprendre.

Heureusement, il n’était pas le seul à lutter. Plusieurs dirigeants de zones communes avaient fait connaître leurs craintes, leurs angoisses et leurs certitudes. Ils demandaient l’évaluation des risques, une sécurité renforcée et à ce que les dossiers des alphas malchanceux ou relativement assagis -autant qu’un alpha puisse l’être- ne soient pas confondus ou mélangés avec ceux des alphas les plus dangereux. Ils tentaient d’apporter un axe sécuritaire et historique au débat qui secouait peu à peu l’intégralité de leur société.

Malheureusement, les rapports montrant que les alphas étaient en réalité sensibles à la douleur, même si c’était dans une moindre mesure par rapport à eux, avaient remis en cause de très nombreuses pratiques et les omégas qui se présentaient à leurs portes pour recevoir l’aide nécessaire à leurs coïts s’inquiétaient maintenant de leurs partenaires. C’était comme si tout s’effondrait. En soupirant, il repoussa les dossiers. Il avait demandé à ce qu’un entretien ou plusieurs soient faits avec Lidseï avant tout autre chose. Ce compromis avait été accepté et lui, il devait continuer sa tâche.

Il sortit du bureau, oubliant totalement Kavri derrière lui puisqu’il n’était pas important. Il descendit jusqu’aux bureaux de surveillance, s’assura que tout se passait bien et retourna au petit bureau qu’il avait fait construire en urgence. Là, il recevait les omégas inquiets de faire du mal à ces brutes épaisses pour les rassurer. Les omégas ne mentant jamais, ce n’était pas le plus difficile.

Devant lui, l’oméga était très jeune, il avait des chaleurs depuis un certain temps déjà mais il n’avait pas encore eu à subir la présentation d’un alpha. Il tirait sur ses doigts comme pour essayer de chasser l’angoisse dans une attitude qu’Atkins trouva adorable.

Lentement, avec un ton rassurant et des gestes apaisants, il fit de son mieux pour lui expliquer :

- Tout les alphas qui rentrent dans cette zone sont évalués à un nombre de coït qui leur permet de trouver l’apaisement. Une fois ce nombre atteint, ils sont calmes, relativement détendus pour des alphas et ils peuvent dormir.

Il chercha le regard du jeune et lui fit un sourire encourageant avant de prendre un ton, légèrement plus triste.

- Si nous en proposons moins, ils peuvent se faire du mal ou faire du mal à d’autres. Alors vraiment, il n’y a aucune raison de culpabiliser.
- Mais… les alphas ressentent la douleur ?
- Très peu et surtout, vous n’allez pas leur faire mal. Vous allez leur faire du bien. Vous êtes en chaleur. Si vous voulez, je peux vous proposer une pièce où l’alpha cherchera de lui-même le contact. Ce n’est pas la façon la plus douce de procéder mais ça peut vous montrer à quel point ils en ont envies. Est-ce que ça vous conviendrait ?
- Oui, oui. Je crois que je préférerais.
- Parfait alors.

Il le conduisit tranquillement jusqu’à la pièce en question et posa les yeux sur le corps lié de Duir. Ses bras étaient enfermés l’un contre l’autre dans son dos, tirant sur ses épaules. Il portait un masque complet qui l’empêchait de voir et plusieurs chaines le liaient de toute part, offrant juste assez de mou pour qu’il puisse tirer dessus pour s’approcher de lui.

- Voulez-vous un accompagnement ?
- Oui, volontiers.

Le petit lui offrit un sourire et Atkins lui caressa la joue avec tendresse. Il l’aida à se déshabiller, dévoilant un corps trop fin pour résister aux assauts brutaux d’un alpha. Doucement, toujours en le caressant pour l’aider à se détendre, Atkins expliqua :

- S’il était libre, il irait entre vos jambes pour vérifier vos chaleurs. Comme il ne peut pas, on pourrait croire qu’il n’est pas vraiment enjoué, mais il y a une façon toute simple de lui permettre d’accéder à l’information qu’il désire.

Atkins s’approcha d’une fente dans le mur où il avait entreposé tout l’équipement nécessaire. Les omégas en chaleur n’avaient heureusement rien de pudique et ce type d’accompagnement, fait par un autre oméga, les rassuraient toujours énormément.

- Je vous laisse frotter votre intimité avec cette compresse ? Ainsi il aura l’odeur de vos chaleurs.

Le jeune obéit rapidement, gémissant de luxure lorsque le coton doux appuya sur la zone avide de pénétration de son anatomie. Il en avait besoin. Cela faisait plusieurs jours qu’il reportait sa venue et c’était en train de devenir beaucoup trop intense. Seule une petite partie consciente dans son esprit parvenait à le retenir. Il observa Atkins récupérer la compresse, puis ouvrir une partie de la cagoule pour l’enfiler à l’intérieur tout contre le nez de l’alpha et la réaction ne se fit pas attendre. L’alpha se jeta en avant le faisant reculer et il poussa un cri étouffé par le bâillon.

- Hum… Vous voyez ? Ça lui plait vraiment beaucoup.

Entre les jambes de l’alpha son sexe gonflait de plus en plus, l’appelant et Atkins n’hésita pas à l’aider à se placer.

- Le secret pour voir exactement ce qu’il veut, c’est de se pencher à la limite de la position.

Il installa le garçon de manière à ce que son anus palpitant vienne effleurer le gland.

- Et l’alpha décide…

Diur se jeta en avant, enfonçant son sexe brulant dans l’antre toute aussi chaude de l’oméga. Contre son nez, l’odeur des chaleurs le rendait fou et il se mit aussitôt à remuer, inconscient qu’Atkins rassurait toujours l’oméga sur sa bonne volonté. Pourtant il n’y avait aucune forme de volonté là-dedans, juste un corps remuant sous l’afflux d’une odeur incontrôlable.

Satisfait, Atkins caressa le dos de l’oméga et lui demanda s’il se sentait de rester seul tout en lui rappelant qu’un grand nombre de caméra était posée pour assurer leur sécurité. Il accepta et le gérant put repartir. Ce genre d’aide se faisait de manière très régulière à présent, mais il arrivait encore à rassurer et à trouver assez d’omégas pour assurer le minimum de coït nécessaire à la bonne tenue de son établissement. Si les choses empiraient encore, ce ne serait peut-être plus le cas et alors il devrait admettre son incapacité à gérer les choses avant que ça ne devienne vraiment trop dangereux. Pour le bien-être de tous, il espérait de tout cœur ne jamais en arriver-là.

Ils étaient nombreux à penser qu’ils observaient une société idyllique, une véritable utopie, en train de s’effondrer et ils étaient nombreux à lutter contre ça que ce soit à travers de nouvelles études, de nouveaux tests et à travers la recherche de compromis. Chaque jour, Merwan découvrait ces nouvelles barrières, ces nouveaux freins, mais contrairement à Atkins, il n’était pas angoissé par l’avenir. Il y portait de plus en plus d’espoirs. Les omégas ne voulaient pas mal faire. Ils ne savaient juste pas certaines choses et lorsqu’ils l’auraient compris, alors la société ne deviendrait ni parfaite, ni idéale, mais elle évoluerait positivement pour limiter l’horreur. L’alpha en était persuadé.

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