Chapitre 4

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Une fois arrivée dehors, je m'arrête, ferme les yeux et me penche en avant en posant mes mains sur mes genoux. Mon cœur bat à un rythme endiablé. Si je fais un pas de plus je risque la crise cardiaque ce qui de toute évidence serait ironique vu que la blonde vient tout juste d'essayer de me faire mourir de honte. Il ne faudrait pas que ça soit mon cœur qui lâche.

Là, j'ai les larmes au bord des yeux ainsi qu'un sale goût dans la bouche ce qui signifie que je suis sûrement à deux doigts de vomir. Je force mon corps à accepter cet air en inspirant et expirant profondément tout en enfonçant mes ongles dans ma paume de main, espérant que la douleur intense joue son rôle et ainsi me permette de me ressaisir. Ravie de voir qu'au bout de quelques minutes ça fonctionne, je bouge de sorte à ne pas rester devant les portes, au risque de voir débouler n'importe lequel des élèves avec une remarque bien acérée ou encore pire, ce que je ne pourrais pas supporter. Je préfère m'éloigner pendant que je le peux encore.

Je marche donc vers le banc qui est devenu mon seul ami, tout en vérifiant le contenu de mon sac. Je suis soulagée quand je réalise que tout y est car je n'avais aucune envie de retourner dans cette salle après ce désastre. Je déteste les ennuis et Morgane est une vraie source à emmerdes. Ça se voit comme le nez au milieu de la figure.

Je soupire un grand coup lorsque j'aperçois le banc et qu'en plus il est libre. Finalement, je me dis qu'on se ressemble, deux âmes solitaires. Je trouve ça tellement triste.

Je m'assois sur le dossier à la manière des gens de mon âge qui squattent le banc du parc devant chez moi et pense qu'au moins lui n'est plus tout seul. On partage maintenant nos malheurs ensemble. Je sens qu'une larme réussie à franchir le mur que je tente d'ériger tout autour de mon cœur et l'essuie vite pour que personne ne puisse voir cette marque de faiblesse. J'estime m'être suffisamment dévoilée. Puis, je commence à compter jusqu'à soixante. Quand j'arrive au bout, je recommence et ainsi de suite jusqu'à ce que je finisse par retrouver mon calme. Je redoute tant le moment où je vais devoir reparler à quelqu'un. L'instant avant de ne plus réussir à tenir mon mur érigé et à rester debout malgré tous mes efforts. Vu le soutien que j'ai eu, je sais qu'il y a de forte chance pour que ça se produise mais je veux faire mon maximum pour l'éviter.

C'est pour cela que là je n'ai plus envie de faire la conversation à qui que ce soit. Je suis tellement blessée qu'il va me falloir un petit moment pour oublier toute cette mésaventure. Le rejet est au final aussi difficile à accepter que la solitude.

Je continue mes comptages mentaux jusqu'à ce que je la voie à nouveau. Même d'ici, cette nana arrive encore à me faire encore flipper. J'arrive à distinguer qu'elle s'appuie sur son chien de garde, le chauffeur de salle et j'en déduis qu'elle a dû se faire mal. Malgré ce qu'elle m'a fait, je ne souhaitai pas ça. Je crains d'avoir fait empirer ma situation. Elle semble encore plus énervée mais maintenant je croise mentalement tout ce que je peux pourqu'elle ne me rejoigne pas. J'ai peur qu'elle ne déverse de nouveau sa rage sur moi.

Je dois me maîtriser. J'entends par-là gérer mon problème d'hyper-sensibilité. Je n'ai que trop conscience qu'il peut me desservir dans mon intégration sociale même si je ne veux plus me laisser intimider par des gens comme elle. J'ai trop souvent laissé ma colère tout faire foirer ses deux dernières années.

Je sais que je ne suis plus celle que j'étais, si confiante et si forte et que je peux être bien plus agressive, parce que devenue trop fragile. Je ne souhaite pas du tout en arriver là. En vrai, si elle s'était montrée plus cordiale, elle aurait su que je ne suis pas méchante et que si on gratte à la surface, il est facile de d'obtenir mon amitié. Ils ont tous choisi une autre voix alors c'est sa faute si on en est là.

J'arrête de l'épier comme si elle allait me sauter dessus d'une seconde à l'autre et remet mes écouteurs dans mes oreilles en tentant d'afficher une mine la plus normale possible, histoire de continuer à tromper à mon monde.

Je vais bien, tout va bien et s'il vous plaît, faites que les heures passent vite, c'est ce que je me répète tel un mantra.

Je fixe mes baskets en luttant contre mon estomac qui me rappelle que je n'ai rien mangé depuis ce matin. Le son ne me remplit pas le ventre mais calme petit à petit mon esprit et me permet de patienter jusqu'à la reprise des cours. Je m'immerge plus que de raison dans ma musique et me désintéresse de tout ce qui m'entoure.

« Bringon your bows and arrows
Bring on your plagues and pharaohs
Cause if youget lost in the shadows
There's a fire inside you »*

Je refais surface quand je sens une main tapoter sur mon épaule. Je crois d'abord halluciner avant de voir une autre paire de baskets que les miennes sous mes yeux mais tournées dans l'autre sens. Quelqu'un est debout devant moi. Alors que mon cerveau turbine à plein régime, jeressens une autre petite tape. Résignée à devoir répondre, jefinis par relever la tête.

Un petit mec à la peau halée se tient debout devant moi. Il ne m'impressionne pas le moins du monde. Il a un visage pointu et des cheveux noir ébène. Il m'adresse un sourire et fini par me parler. Je fixe sa bouche mais ne comprends aucun des mots qui en sortent, je fronce les sourcils. Il parait apprécier la situation et la raison qui fait qu'il reste planté là debout devant moi. Je me vois donc contrainte de baisser le volume de ma musique.

—Excuse-moi tu disais ? Dis-je en sentant mes mains devenir totalement moites.
—Quoi ? T'as rien écouté de ce que je dis depuis 5 minutes ?
Il semble surpris mais souris de plus belle.
—Pas grave, j'ai ça pour toi.
Il me tend une lettre.
—C'est de la part du mec là-bas,ajoute-t-il en pointant du doigt le gars au milieu du groupe de Morgane.
Oh mon dieu non, c'est quoi encore cette merde ?
—Tu te fous de ma gueule parce que si c'est le cas, c'est n'est absolument pas drôle ?
—C'est plus que sérieux tu peux me croire. Il a craqué sur toi alors répond lui, et vite!
Il se retourne dans leur direction, en me déposant la lettre dans la main, puis s'en va me laissant interdite.
—Et pourquoi je ferai ça? lui criais-je presque. Il m'a jetée dans la fosse aux lions tout à l'heure!
Il ne fait pas demi-tour mais me répond tout de même.
—Je te garantis que toutes les filles du bahut aimerai recevoir une lettre du beau Sean, alors fais ce qu'il faut!

*Apporte tes arcs et tes flèches
Apporte tes fléaux et tes pharaons
Parce que si tu te perds dans les ténèbres
Au fond de toi, il y a une flamme

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