"J'ai rencontré un voyageur de retour d'une terre Antique..." 

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Il fût prit d’un dégoût romantique quand l’effleura la pensée qu’il était semblable à Marie Noëlle dans Desirada de Maryse Condé. À l’exception que, l’évènement qui lui avait été maintes et maintes fois conté n’était pas sa naissance, mais la mort de sa mère. La redondance de celle-ci était assurée tantôt par la colère, tantôt la frustration, tantôt la mélancolie de son père. En tout cas c’est de cette manière là qu’il se l’expliquait, car il ne voyait aucun autre moyen qui pourrait justifier la haine que son père avait pour la race blanche.

Le récit démarrait toujours de la même manière : une nuit chaude de Juillet, dévêtue de son nom de jeune fille, Adélaïde Ambroise, nouvellement mariée, une alliance de 130 $ au doigt, portait fièrement sur son passeport le nom de Marco Gerald Jones et dans ses entrailles le futur George Adélaïde Jones.

Marco, au volant d’un break de seconde main roulait sur une route très mal éclairée. Adie s’était bien dépensée, et dormait paisiblement sur la portière du côté passager. Maintes femmes l’avaient regardée de travers, trouvant cela indécent qu’une femme enceinte se déhanche de la sorte à une échéance aussi proche de sa grossesse. Marco ressentait une certaine honte lorsque Adie agissait de la sorte, transgressant les bonnes moeurs, se couvrant d’un voile amer de regards noir et de messes basses. Alors souvent il détournait le regard et écrasait le sujet à coup de boutades agressives lorsqu’un de ses collègues le faisait éclore dans la discussion.

Georgie Jones, plus tard âgé de 16 ans, après avoir recueilli des détails à chaque nouveau récit, conclura que Marco Jones aimait sa femme mais arrivait difficilement à l’assumer en public lorsque celle-ci était encore en vie. C’était un homme éduqué à la dure, qui connaissait la douleur des plaies laissées par la ceinture aussi bien que son étreinte lorsqu’il fallait la serrer. Il était tombée amoureux d’une jeune Haïtienne qui vivait de ses idéaux émancipateurs, des idéaux qui l’attiraient follement mais desquels il s’éloignait dans une hypocrisie orgueilleuse lorsqu’ils étaient au milieu d’autres gens. Et ce dilemme le hantait toujours, même lorsqu’elle ne fût plus en vie.

La route s’allongeait le paysage défilait, et il n’avait fallut qu’une seconde d’inattention de la part de Marco pour qu’il n'eût manqué d’écraser un coyote qui passait.

Il jurait par tous les saints l’avoir vu, à chaque fois. À chaque fois, il jurait que c’était à cause de lui qu’il avait fait une embardée en direction de la végétation. Essayant, aux regard de George de se convaincre encore et encore.

Heureusement, il avait su redresser le véhicule à temps, sans ce réflexe qui avait traversé les effets de l’alcool, ç’aurait été les tonneaux assurés. La cascade avait réveillé Adie en panique, elle avait posé un regard interrogé sur Marco et il put remarquer que du sang s’était écoulé d’un côté de son front et perlait d’une de ses tresses.

-Chéri, tu saignes ! Bon sang, il avait retiré sa chemise, et s’était mit à tapoter la plaie du bout d’une manche avec une application maladroite. Il avait observer ses yeux écarquillés se calmer. Marco avait une énorme main rugueuse comme la souche d’un arbre et Adélaïde avait bien vite fait de poser sa main délicate sur la sienne pour lui prendre le mouchoir et s’essuyer elle même.

Et là, plein de sarcasme, elle lui avait répondu :

-Laisse le rodéo au rednecks, chéri voyons ! Là, il lui avait expliqué comment il avait dû manoeuvrer son balourd de break pour éviter d’écraser ce pauvre coyote, chaque détail l’avaient chatouillé, lui tirant des gloussements moqueurs. À sa propre surprise, il avait sursauté lorsqu’elle avait laissé un cri fendre l’atmosphère amoureuse qui régnait jusque là dans le break. Il avait directement pensé « accouchement ! » à cet instant, et une anxiété pleine d’excitation l’avait saisi l’espace d’un instant. Mais en voyant le visage d’Adie, aussi interloqué que le sien et son regard se tourner vers la banquette arrière, Marco se rendit compte que ça n’était pas elle qui avait poussé ce cri et c’est en suivant son regard qu’il comprit qu’il ne se s’était pas agit d’un cri, mais bien d’une sirène de police.

Il se rendit compte qu’ils étaient en plein milieu de la route. Le véhicule fonction s’arrêta juste derrière et deux hommes en jaillirent d’un air solennel. À ce moment là le récit devenait brutalement détaillé entre les lèvres de Marco Jones, froid et amer, les paroles s’éparpillaient car il cherchait à s’en débarrasser le plus vite possible. George avait l’impression qu’à partir de ce moment, son père ne s’entendait plus raconter. Il n’était plus présent, avec son fils, mais à plat ventre couvert d’un sang brun, les poignets et le coeur entaillés par l'acier complice.

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