Lui

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Quand le réveil sonne je l’écrase presque aussitôt de mon poing avant de me retourner dans mon lit. Je n’ai pas envie de me lever, pas envie d’affronter cette journée qui, je le sais, sera horrible. J’ai juste envie de m’ensevelir sous mes draps et d’oublier, d’oublier cette effroyable nuit. Elle avait pourtant bien commencé. Maïllis était venue me chercher pour une soirée entre étudiants dans une maison non loin d’ici. Je m’étais amusée comme une folle, dansant, discutant, buvant, et brusquement tout s’est effondré. La musique était devenus assourdissant quand je l'ai apperçus, Marc. Nous nous étions rencontré l'année dernière et ça avait tout de suite collé entre nous, depuis nous étions devenus très proche et inévitablement nous avions commencé à sortir ensemble.

Les larmes me montent aux yeux quand le souvenir de cette fille glissant sa main dans la sienne me revint comme une gifle. Ce bras qu’il passa autour de ces épaules, ce baiser discret aux coins de ses lèvres. Je n’avais pas pu en supporter plus et étais rentré me lamenter sur mon sort dans ma chambre. J’as sangloté toute la nuit…

Je me redresse finalement, la bouche pâteuse et les yeux gonflés d’avoir tant pleuré. Je baille largement et suis surprise de ma voix, si rauque qu’on dirait celle d’un homme; je passe la main sur mon visage et sursaute alors, mon visage me pique. Je repasse une seconde fois ma main dessus et de nouveau cette sensation étrange. Quand je baisse les yeux vers le bas de mon corps je lâche un cri terrifié face aux jambes poilus et grosses d’un homme. Je me redresse précipitamment et m’élance vers la salle de bain le cœur pulsant dans ma poitrine. Devant la glace je me mets à pâlir et un cri étranglé se coince dans ma gorge tandis que je me mets à reculer.

 Dans le miroir ce n’est pas moi, la fille pâle aux cheveux noirs et au yeux bleus, mais un homme qui me fait face. Je tâte le miroir du bout des doigts, quand la réalité s’encre enfin dans mon esprit je pousse gémissement en plaquant ma main sur ma bouche . Totalement paniquée je recule brusquement, cognant le mur derrière moi. Haletante je me mets à palper mon corps, qui n’est plus le mien, c’est celui d’un homme. Plus de poitrine, plus de hanches, plus rien… Je me mets alors à sangloter complétement dépassée par la situation, je me détourne alors subitement du miroir que je n’avais toujours pas lâché des yeux et me précipite dans ma chambre… J’ai peur… Tellement peur… Pourquoi suis-je dans le corps d’un homme ? Comment c’est possible ? Comment ça à pus m’arriver ?

Que dois-je faire ?

Je m’écroule sur le tapis au centre de la pièce en entourant ma tête de mes mains, ça ne peut pas être la réalité, ce doit être un rêve ! Mais le mal qui fait vibrer mon crâne à force que je tire sur mes cheveux ne peut mentir, ce qu’il se passe est vrai, je suis devenue… Un homme ! Je suis parcourue de spasmes qui accroit encore mes maux de tête et ma nausée. Mes pleurs redoublent et c’est fini, la pièce est emplie de ma peine et de mes peurs, j’enlace mes épaules et ne bouge plus, me contentant de sangloter…

 Je ne sais pas combien de temps je reste ainsi, petite chose inerte en train de geindre. Quand enfin les larmes se tarissent et que les tremblements de peur se calment je me traine jusque dans ma douche. Ll’eau chaude me m'apaise mais je n’ose ni toucher ni regarder ce corps qui, pour moi, n’est pas le mien. Enroulée dans une serviette j’évite intelligemment le miroir et fouille ma chambre du regard elle ressemble à celle d’un garçon, comme si j’avais toujours été un… Homme… J’enfile alors un caleçon, un pantalon, un t-shirt et des chaussettes, tentative absurde de cacher à ma vue ce corps. Prendre l’air serait peut-être un moyen de remettre de l’ordre dans mes pensées. Je lisse nerveusement mes cheveux et je sors dans le couloir de mon internat. Il est plein à craquer comme toujours, certains me saluent, des gens que je connais, qui me reconnaissent, qu’est-ce que ça veut dire ? Pourquoi les autres ne voient-ils pas la situation dans laquelle je me trouve ? Je marche jusque dans la cour centrale, celle où nous nous réunissons toujours pour réviser et déjeuner. Je m’installe sous un des arbres et quand la réalité me frappe de nouveau je frissonne, mais cachée dans l’étreinte de mes bras je me sens protégée.

 Le temps passe, doucement, puis le soleil se lève et réchauffe le haut de mon crâne. Quand je redresse la tête je ne suis plus seule, à côté de moi un garçon, blond, la peau bronzée et les bras couverts de taches de rousseur lit un livre dont la couverture m’est cachée par ses grandes mains. Il relève son regard noir vers moi. Il est beau, beau d’une étrange manière. C’est peut-être parce que ce qui fait de lui ce qu’il est, ne s’accorde pas bien.

Ses cheveux, la couleur de ses yeux, les taches de rousseurs, sa peau, tout cela s’accorde étrangement. Nous nous fixons pendant quelques instants avant qu’il ne me sourît, le genre de sourire un peu trop éclatant, le genre qui veut dire quelque chose mais que je n’arrive jamais à comprendre. Une vive chaleur irrade mon ventre tandis que je baisse les yeux, gênée, l’esprit encore trop embrouiller. Ma situation tourne encore dans ma tête et de nouveau une vague d'angoise déferle sur moi, éteingnant au passage cette agréable brûlur. Et encore une fois les mêmes peurs se mettent à tourbillonner dans mon esprit. Ce corps qui n’est pas le mien, la non réaction de mes amis, et maintenant ce garçon…

Je me redresse si vite que j’en perds presque l’équilibre, sans m’en rendre compte l’inconnu s’est aussi levé et il pose dans mon dos une main qui se veut bienveillante mais qui me brûle presque. Pas de manière désagréable mais c’est sans doute ça qui me fait peur et qui me pousse à partir en courant vers ma chambre. Le cocon de cette dernière me fait du bien et sans attendre je me glisse sous mes couettes et prie pour qu’à mon réveil tout redevienne comme avant. Que toute cette histoire ne soit qu'un cauchemars et que je retrouve ma vie. Mais quand le soleil fait un tour dans le ciel et que la nuit tombe sur moi, je suis toujours un homme, coincée dans ce corps que je n’aime pas. J’aurais presque envie de pleurer encore mais je l’ai déjà trop fait pour aujourd’hui. Je laissais mon esprit vagabondé quand on toque à ma porte me tirant de mes doutes et de mes peurs.

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