6 Juillet 1940

2 minutes de lecture

Maman a su qu'il y avait une livraison de chocolat et de café à l'épicerie. Alors évidemment, elle m'a donné pour mission d'aller les chercher. Ça tombe bien, je n'avais pas vraiment envie de laver le poulailler. J'aime beaucoup aller au village car j'ai le temps de flâner sur le chemin. Cela me permet de réfléchir et de sortir de cette pression constante qu'est devenue la maison.

J'espérais voir Clara, mais finalement je suis tombée sur Thomas.

Je faisais la queue pour l'épicerie de Mr Mathieu. Il m'a rejoint en se faufilant parmi les autres. Je n'aurai pas du faire ça, mais je l'ai jugé et jaugé de tout son haut quand il est arrivé à côté de moi. J'ai toujours ce goût amer dans la gorge. Thomas paraissait gêné. Il n'a pas fallu bien longtemps avant qu'il ne révèle son mal-être. Il m'a demandée comment se passait l'arrivée des allemands. Ah, le fils du maire s'inquiète que j'ai des envahisseurs à la maison maintenant ?

- Tu t'inquiètes pour moi ?

- Un peu.

Tiens, cet aveu n'était pas prévu. Je n'ai pas manquer de lui rappeler que je ne l'ai pas voulu et que c'est son père qui nous les a imposé. Il s'est tu. En même temps, je l'ai attaqué mais je sais qu'il n'y ait pour rien. Très vite, j'ai changé de sujet car sinon la discussion serait devenue stérile. On s'est raconté les dernières nouvelles. Il en sait beaucoup plus que moi. La vie de village a ses avantages, mais celle hors de celui-ci aussi. Moins de ragots de mon côté. Mais j'avoue que j'en suis friande...

A un moment, il s'est raclé la gorge. Un frisson parcourut tout le long de mon dos. Ce n'est jamais annonciateur de bonnes nouvelles. Et d'un coup, j'ai compris ce qu'il allait me demander. Intérieurement je me suis dit « oh non, il va me le demander ! Mais pourtant il sait que je n'aime pas ça ! ». Il a glissé subtilement que le bal du 15 août va bientôt avoir lieu. J'ai fait mine de ne rien entendre d'abord et puis, il a lâché la bombe :

- Veux-tu bien y aller avec moi ?

C'est la première fois qu'il ose m'inviter. Les autres années, on se retrouve là-bas et il essaie maladroitement de m'inviter à danser. J'en suis restée interdite. Devrais-je lui dire oui ? Au moins, pour l'effort fourni. Mon tour avec Mr Mathieu est arrivé et j'ai réussi à m'extraire de cette situation gênante en lui disant que j'y réfléchirais. J'ai repris le chemin de la maison avec un pas un peu soutenu. Je suis arrivée à la maison essoufflée. Maman m'a demandée paniquée si j'avais eu des ennuis avec des allemands. J'ai pas compris d'où elle sortait cette supposition tellement j'étais encore sous le choc de la demande de Thomas. Pour me changer les idées, j'ai fait de la pâte à crêpes pour ce soir. Avec du chocolat fondu, ce sera délicieux ! J'ai hâte de les goûter.

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