Semaine 3 - Dirty Ducky

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Encore une semaine de tracas pour Ducky. Entre sa Librebox qui déconnait suite à l'arrivée de la fibre chez lui et d'une flopée d'appels infructueux vers le service client, notre petit canard se convainquit qu'il y avait trop de nullités sur la planète. Il se fixa une tâche : faire du ménage. Comment ? En devenant un tueur à gages discount ! (Car ça coûte cher un tueur à gages, voyons !).

Il attrapa un papier, un stylo et lista ce qu'il lui fallait pour atteindre son but :

- costard classe (pour avoir de l'allure, mais... trop cher, on piquera celui de papy)

- lunettes noires classes (trop cher aussi, les contrefaçons à la sortie du métro feront l'affaire)

- un surnom cool (ça y est, trouvé : Dirty Ducky !)

- un look cool (genre crâne rasé comme Jason Stathquack ? non... il tenait à ses plumes)

- un flingue (trop cher : penser à voler celui d'un flic)

Voilà ! Il vérifia sa liste, fier de lui. Pas mal comme résultat ! Soudain, il eut un éclair de sagesse et comprit que posséder une arme ne suffirait pas, il devait savoir s'en servir. À cet instant, il trouva à côté de son bloc-notes un bon d'achat pour une activité sportive, dédommagement de Librebox. Ducky se dit que ce serait une bonne manière de l'utiliser.

Il se renseigna sur le club de tir le plus proche. Fallait pas tomber sur celui vu l'autre jour, où soi-disant on tirait sur des canards ! Décidé à commencer rapidement, il piqua le chéquier de maman Coincoin, prit sa tronche au Photomaton, puis se présenta au guichet et remplit le dossier qu'une taupe à lunettes en cul de bouteille lui tendit.

— Dossier complet... OK... photos... OK... cotisation... ok, lisait attentivement le type au guichet d'une voix cérémonieuse. Il ne vous manque plus que l'extrait de casier judiciaire...

— Le QUOI ? s'exclama Ducky.

— L'extrait de casier judiciaire... vierge, ponctua la taupe. Vous croyez qu'on va laisser des fous furieux faire joujou avec des armes au risque de devenir des tueurs à gages ?

Une petite explosion eut lieu dans la tête de Ducky. Avait-il des choses à se reprocher ? Est-ce que les vols de bonbons à la boulangerie seraient pris en compte là-dedans ? Ou les nombreuses fois où maman Coincoin avait menacé de dire aux policiers qu'il était un vilain petit canard qui ne rangeait pas sa chambre ? Zut ! Zut ! Zut ! Son avenir, mort dans l’œuf !

Il y retourna avec un petit papier trafiqué que la taupe accepta sans émettre le moindre doute. Ducky se frottait déjà les mains – pardon, les plumes. Enfin ! Enfin, il allait tenir un vrai flingue, se réjouissait-il en attendant que le bigleux revienne avec une arme d'emprunt.

— C'est quoi ce machin ? demanda-t-il, déçu.

— C'est un pistolet de tir sportif à air comprimé, signala la taupe.

Perplexe, Ducky contempla ce bout de bois collé à un double cylindre. Bof ! Même ses pistolets à eau NERF lui paraissaient plus cool.

— Mouais, grommela le petit canard pendant que la taupe lui expliquait des règles de sécurité auxquelles il ne s'intéressait pas.

Puis Ducky se rendit au pas de tir, en sursautant à chaque fois qu'un "PAM" tonnait.

Un imposant et ténébreux loup gris le reçut. Ducky bondit à nouveau, mais pas à cause des tirs.

— Bonjour, je serai votre instructeur, annonça-t-il d'un ton mielleux qui ne collait pas au personnage. Je vous rassure, vous n'allez pas tirer sur vos congénères, quel dommage, non ? conclut-il d'un sourire carnassier.

Ducky ne comprit pas le sarcasme et acquiesça bêtement.

— Bon, maintenant les règles de sécurité. On ne pointe pas l'arme vers quelqu'un. Comme ça, reprit l'instructeur en pointant le canon pile entre les deux yeux de Ducky.

— Gloups !

* PAM ! *

Notre canard déglutit et sursauta d'un même mouvement. Sur le pas de tir, un hibou grand-duc s'entraînait.

— Vous n'allez pas sursauter à chaque tir, non ? questionna l'instructeur, d'un ton quasi menaçant.

* PAM ! *

Sursaut.

— Euh ! Non, ça va passer, répondit Ducky.

Le loup gris planta ses yeux ozone sur le petit canard, qui déglutit, nerveux, à nouveau. Il lui expliqua les différentes parties de l'arme, comment la charger et plein d'autres informations que Ducky n'écouta pas, trop pressé de tirer et trop secoué par les tirs du hibou. Puis, il ne comprenait pas grand-chose à ce charabia mêlant des chiens, des mouches, et même des chambres. Que diable ! Il voulait seulement T-I-R-E-R.

* PAM ! *

Sursaut. Soupir d'agacement de l'instructeur.

— Bon, maintenant, vous allez tirer.

Ducky sautilla de bonheur. En plus le hibou venait de ranger son pistolet. Ouf ! Il pouvait respirer en paix. Aussitôt le hibou partit, un bouledogue, une gazelle et une lapine arrivèrent pour pratiquer et firent un boucan d'enfer.

Le loup poursuivait sa leçon :

— Vous devez vous placer comme ça de profil, pieds... ahem, palmes parallèles sur la ligne de tir, droit, équilibré. Puis vous levez le bras, comme ça : en axant le poignet et on se place au-dessus de la cible pour trouver la ligne de mire.

Le petit canard, équipé cette fois d'une protection pour ses fragiles oreilles, observa attentivement le positionnement du loup, son allure. Wow ! il avait hâte d'avoir l'air aussi pro et intimidant. Mais que racontait-il au juste ? On vise et on retient sa respiration où on retient sa respiration et on vise ?

— Avez-vous compris ? demanda le loup d'une voix glaciale.

Ducky acquiesça tout sourire. Prit le pistolet, le chargea avec une petite bille en plomb, écarta ses palmes, se mit droit, empoigna l'arme et le leva vers la cible. Aussitôt son aile tremblota et retomba. Que c'était lourd !

— Il va falloir se muscler, ajouta le loup, sarcastique.

Notre petit canard ne se laissa pas abattre et releva le flingue de toutes ses forces pour rester bien en place.

— Ciblez...

Ducky tentait d'aligner le guidon dans le cran de mire, mais son poignet tremblait tellement qu'il n'y arrivait pas.

— Bon, laissez tomber, si vous touchez la plaque en plomb ce sera déjà un miracle, souffla le loup, dépité. Maintenant, vous allez apprendre le lâcher du tir. Pour cela, il faut sentir les...

*PAM !*

— AARHHGGGH ! C'est mon pied, imbécile ! hurla le loup.

Ducky, l'aile meurtrie, avait malencontreusement baissé le pistolet et ses plumes se mirent à caresser la queue de détente [1]... laquelle finit par lâcher.

— Ooops !

[1] La gâchette pour les non-initiés :P

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