Trois destins 1 : Baby

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— Arrête de faire la gueule ! intima Gibraltar.

— Tu as vu comment on est fagotés ?

 Gibraltar portait un pantalon moulant taille basse d'un bleu clair et une liquette en organdi de soie courte qui montrait son nombril. Matéo, quant à lui, se parait d'un pantalon blanc très près du corps ainsi que d'une chemise translucide en organza mauve suggestive à souhait.

— Si tu veux l'appâter, il faut ce qu'il faut. Souris un peu et fais au moins semblant d'être content. On arrive au Bar.

 Un vigile d'un mètre de large et deux de haut les toisa sans état d'âme.

— Salut, commença Gilbraltar tout sourire en jetant un œil à l'intérieur. Il y a du monde ?

— Non, c'est encore assez vide, répondit le colosse.

 Après avoir examiné leur style vestimentaire conforme à celui de la clientère, il les laissa passer.

 L'ambiance feutrée et sensuelle favorisait les rencontres et les conversations. Des box avec quatre larges fauteuils moelleux étaient dispersés autour de la piste de danse déserte pendant la journée, mais qui se remplissait à mesure que la nuit approchait. Des lumières fluo bleues et rouges coloraient les murs beiges dans l'intention assumée de favoriser les tête-à-tête intimes.

 Gibraltar choisit un box pas trop éloigné du bar. Un blondinet musclé vint prendre la commande.

— Tiens ! Ça te dit un sadomaso ?

 Son compagnon haussa les épaules.

— Un sadomaso. Moi, je prendrai un séminaire.

 Quelques minutes plus tard, le serveur déposa la commande.

— Maintenant, qu'est-ce qu'on fait, s'enquit Matéo, toujours mal à l'aise dans ses nippes.

— On attend notre petit chéri. Tiens ! Le voilà ! Regarde-moi et souris !

 Il posa la main sur la sienne et se mit à la caresser du bout du doigt.

— Ne réagis pas, tu vas tout faire rater, commenta Gilbraltar. Il faut qu'il nous remarque.

 Le jeune homme continua à parler à Matéo comme s'il lui débitait des mots doux.

— Ce salaud aime bien les enfants, mais de temps en temps il ne dédaigne pas des petits jeunes comme nous. Laisse-toi faire et continue à sourire.

 Gibraltar lui passa le dos de la main sur la joue.

— Fais au moins semblant d'apprécier !

 Matéo émit un sourire quelque peu crispé.

— Et bien voilà ! C'est bien mon minou, continue comme ça.

— Oui bon ça va !

 Gibraltar détourna le regard vers le bar. Il croisa celui de Lanista qui devait les examiner depuis un moment sans interrompre la conversation avec son interlocuteur. Le pédophile lui sourit. Il répondit d'un mouvement de tête et se tourna vers Matéo.

— Ça y est ! Je l'ai ferré. Normalement, il devrait nous proposer un verre. Si on accepte, on est consentant. Tourne la tête et fais lui ton plus doux sourire. Pas comme ça ! Tu ne peux pas faire mieux ? C'est pas un sourire, c'est une grimace. C'est pas vrai ! Ce que tu peux être empoté parfois !

 Lanista lui renvoya son sourire. Ces échanges le rassurèrent sur les éventuelles jalousies et complications quand une troisième personne s’immisçait dans un couple. Il admira le physique harmonieux des deux amis sous leur vêtement transparent que la lumière en contre-jour sublimait.

 D'une démarche féline, il s'approcha de ses proies en train d'échanger des regards énamourés. Il portait un marcel fluo sous une veste bleu nuit à paillettes ainsi qu'un pantalon viking gris taupe. Lanista partait toujours en chasse avec des bas amples pour éviter d'être gêné aux entournures.

— Je peux vous offir un verre ?

— Avec plaisir ! répondit Gibraltar en lui faisant une place.

— C'est la première fois que vous venez ici, constata Lanista.

— En effet ! Ça fait un an qu'on est ensemble mais on se connaît depuis longtemps. On a dû négocier avec les parents.

— Je me présente : Lanista.

— Moi, c'est Gibraltar et lui Matéo.

— Je vous connais, s'écria Lanista. Il y avait un avis de recherche à votre sujet ?

 Sans perdre son flegme, Gibraltar rétorqua du tact au tact :

— Ce sont ses parents, mais comme je te l'ai dit, on a négocié.

 L'explication logique rassura le pédophile, toujours sur le qui-vive.

— Je comprends ! Vous êtes venus par curiosité ?

— Pas du tout ! Tout le monde connaît le Bar de Flore. On recherche d'autres expériences. Si tu connais quelqu'un, on est preneur.

— Vous ne pouvez pas mieux tomber, se vanta Lanista.

 Il caressa les jambes de Matéo avec son pied en lui faisant des yeux doux.

— Tu ne parles pas beaucoup. Il y a quelque chose qui ne va pas ?

— Non ! Ne t'inquiète pas ! Il est timide mais il assure terrible quand il le faut.

— Mat, si on terminait la soirée chez moi ? On y sera plus tranquille.

— Super ! Pas de problème ! débita "Mat" avec un sourire forcé.

 Pendant que Lanista réglait l'addition, les deux amis récupérèrent leur roue et sortirent.

— Essaie d'être plus sympa, conseilla Gibraltar. Pense à Baby. C'est pour lui qu'on fait ça.

— Pourquoi tu lui as donné nos vrais noms ?

— Il est d'un naturel méfiant. Tu as oublié que nos noms étaient affichés sur les avis de recherches ? Il valait mieux dire la vérité. S'il se doutait de quelques chose, c'était foutu. Attention, le voilà !

 Gibraltar lui adressa son plus beau sourire. Comme l'autre jouait des mains baladeuses, le jeune homme, dégoûté, le retoqua.

— Pas ici. C'est plus excitant d'attendre non ? Tu te rattraperas tout à l'heure.

— Tu sais parler aux hommes toi !

 Ils montèrent dans la barge. Lanista s'assit en face de ses deux conquêtes et ne cessait de les déshabiller sans vergogne du regard. Gibraltar le laissa frotter ses jambes contre les siennes, s'efforçant de lui sourire comme s'il prenait du plaisir, mais se promettait de le lui faire payer le moment venu.

 Arrivés au palais, le pédophile les invita à monter le grand escalier d'honneur tout en courbes, dans le pur style Art Nouveau. L'intendant ouvrit la monumentale porte d'entrée richement ouvragée.

— Bonjour Monseigneur ! Vous avez fait une bonne promenade ?

— Excellent ! Je suis avec des amis. Je ne veux pas être dérangé.

— À vos ordres.

 Lanista les guida dans des couloirs inconnus, vers les appartements de l'aile ouest.

— Désolé pour l'odeur. Il y a eu un incendie hier dans l'autre aile.

— Rien de grave j'espère !

 Matéo rit mentalement de l'effronterie de son acolyte.

— Rien qui puisse entraver nos projets.

— On t'avait vu à la salle des ventes l'autre jour. Tu as trouvé des choses intéressantes ?

 La question réveilla à nouveau la méfiance de Lanista.

— Tu m'espionnes maintenant ?

— Pas du tout ! Mais on t'a remarqué. D'ailleurs, qui ne te remarquerait pas ? répondit Gibraltar quelque peu flagorneur.

— Oui, j'ai dégoté un oiseau rare.

— Ce n'est pas le petit blond qu'on a vu quand même ? Wouaah ! On peut le voir ? supplia Gibraltar qui se mit à lui caresser le bras.

 Flatté, il comprit qu'il ne pourrait rien en tirer tant qu'il n'aurait pas présenté son nouveau jouet et donna les ordres en conséquence. Dès que le boy referma la porte de la chambre, Matéo prit aussitôt Baby sous sa garde. Lanista s'allongea sur le lit, s'offrant lascivement à ses rencontres du jour.

— Tu peux jouer avec, mais ne me l'abîme pas ! lança-il à l'adresse de Matéo.

Quel abject individu ! Gibraltar n'en pouvait plus.

— Qui vient en premier ? invita Lanista

 Gibraltar sauta sur le lit, debout, les jambes écartées au-dessus du pédophile qui lui tendait les bras et pointa sur lui son taser.

— T'as le feu aux fesses ? Et si je te tasais les parties, sale vermine.

Lanista cessa ausitôt ses simagrées.

— Qu'est-ce que... Attends ! On peut s'arranger !

— Ah oui ? Je vais t'arranger quelque chose, moi ! rétorqua Gibraltar et il tira.

Pendant que Lanista se contortionnait sous l'effet de l'électricité, il mit le taser en position létale puis l'acheva d'un second tir.

 Pendant ce temps, Matéo s'était agenouillé à hauteur du petit garçon qui fit un pas en arrière

— Bonjour Baby. Je m'appelle Matéo. Je ne te veux pas de mal. Je t'ai parlé au marché, tu t'en souviens ? Je viens te délivrer du méchant qui t'a acheté. Maintenant, tu es libre. Tu ne risques plus rien. Tu veux venir avec moi ?

 Baby accepta d'un hochement de tête.

— Faut plus tarder maintenant, pressa Gibraltar qui désirait quitter au plus vite ce lieu infâme.

 Matéo vit le corps inanimé sur le lit.

— Pourquoi tu l'as tué ?

— Oh pardon ! répliqua-il, ironique. Désolé ! Un vieux réflexe qui se réveille quand je vois un salopard !

 Ils quittèrent la chambre. Esprit leur communiqua le plan du palais si bien qu'ils trouvèrent sans problème la sortie où les attendait l'intendant, à croire qu'il passait tout son temps près de la porte.

— Il a demandé qu'on ne le dérange pas, déclara Gilbraltar avec assurance.

 Malgré tout, il toisa avec méfiance les deux compères.

— Où allez-vous avec le petit ?

— Ah oui ! Il nous a demandé de le conduire pour le tatouage obligatoire après acquisition. On ne tarde pas si on veut revenir avant ce soir. Il en a besoin pour cette nuit.

 L'intendant savait que la possession d'un esclave n'était légale et opposable aux tiers qu'après le tatouage du sceau de l'acquéreur. Il comprenait donc que son maître ait hâte de valider sa nouvelle acquisition.

 Il ouvrit la porte, convaincu par l'argument plausible.

— Vous pouvez sortir la barge ?

— À vos ordres !

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