Chapitre 6 - Nouvelles rencontres (2/2)

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 L'adolescente avait l'impression de s'être endormie depuis seulement cinq minutes lorsqu'elle fut brusquement réveillée par les secousses de Glenn.

 - Aelis, lève-toi, il faut y aller !

 Encore dans les vapes, la jeune fille mit du temps à émerger. Il faisait encore nuit, les lucioles voletaient lentement dans leur lanterne, éclairant légèrement la pièce. Près de la porte, Castanha se tenait debout sur ses pattes arrières, les oreilles dressées et le poil de sa queue hérissé. Quelque chose clochait.

 - Qu'y a... commença Aelis qui fut aussitôt interrompue par le doigt de l'ermite posé sur sa bouche.

 - Ne parle pas trop fort... chuchota t-il. Il semblerait que nous ayons de la visite. Ils sont arrivés plus tôt que prévu...

 Les yeux noisettes de l'adolescente affichèrent une mine apeurée. La situation et le ton de Glenn ne laissait aucun doute sur l'identité des visiteurs.

 - Enfile ta cape, ils seront là d'une minute à l'autre.

 Il envoya le vêtement sur le lit et se retourna pour aller chercher le sac. La boule dans la gorge d'Aelis était si énorme qu'elle ne put dire un seul mot. Elle se dépêcha de boutonner le col de sa cape. Le silence de la pièce était pesant. Au loin, de terribles hurlements se faisaient entendre. La jeune fille reconnut des aboiements de chiens mais aussi un étrange bruit. Elle tendit l'oreille, tentant de l'identifier. Ce son ressemblait à un rugissement effroyable qui la fit trembler de la tête aux pieds. Elle parvint toutefois à demander :

 - Qu... Qu'est-ce que...

 - Des bayards, répondit Glenn qui avait deviné la question de sa protégée. Des montures terribles et très rapides... Je ne pensais pas qu'ils emploieraient de tels moyens... Je me suis complètement trompé...

 Alors que les cris s'approchaient inexorablement, Glenn se mit en action. Il se mit à tirer le lit. Aelis l'aida, ne comprenant pas trop son intention. Et alors qu'il soulevait le vieux tapis qui se trouvait juste en-dessous du meuble déplacé, une vieille trappe de bois se dévoila.

 - Tu vas passer par là. Suis le tunnel. Une fois que tu en seras sortie, tu appelleras Cèrvi et il te mènera au bon endroit, loin du danger. Une fois sur la route, trouve le chemin qui mène à Sérasia. J'espère que tu y trouveras Elric...

 Et alors qu'il disait cela, le vieil homme passa son sifflet autour du cou d'Aelis, la chargea de son sac de provisions et lui donna sa lanterne :

 - Pour t'éclairer. Prends Castanha avec toi, je ne supporterais pas de le voir massacré par ces satanés chiens...

 Massacrés ? La jeune fille était comme tétanisée. Trop d'incertitudes l'entouraient désormais. Elle n'était pas sûre de parvenir à fuir hors de la forêt. Ces bayards et ces chiens de chasse l'effrayaient davantage que ceux qui les menaient. Et Glenn qui ne comptait visiblement pas l'accompagner...

 - Viens avec moi, ils vont vous tuer Glenn... tenta Aelis dans un infime espoir.

 - Hors de question. Cèrvi ne pourrait jamais nous porter tous les deux. Aelis, il faut y aller ! J'ai juré de te protéger, je dois rester là.

 Puis, il ouvrit la trappe. Il saisit son petit écureuil et le donna à la jeune fille. L'animal se débattait, ne voulant pas quitter son maître. Ce dernier avait les larmes aux yeux mais restait ferme dans ses choix. Il poussa Aelis sans ménagement vers la trappe. Sous le choc, elle descendit par une petite échelle dans le tunnel. La dernière chose qu'elle vit de la cabane fut le visage de Glenn devenu tout-à-coup très neutre.

 - Adieu, lui dit-il.

 L'adolescente ne répondit pas et la trappe se referma. Durant un moment elle resta plantée là, seulement éclairée par les quelques lucioles récoltées le soir précédent. Castanha avait cessé de se débattre. Il s'était roulé en boule dans sa main, comme empli d'un chagrin dont il ne se remettrait jamais.

 Aelis n'aurait su dire combien de temps elle demeura là, à écouter ce qui se passait, n'osant avancer. Il semblait que l'ermite ait poussé de nouveau le lit contre le mur. Un silence pesant était tombé, uniquement troublé par les hurlements des chiens, de leurs maître et de ces étranges bayards. Lorsqu'un grand fracas se fit entendre, la jeune fille horrifiée prit ses jambes à son cou. Elle pleurait, suivant le chemin tortueux du tunnel creusé depuis des années. De nombreuses toiles d'araignées la collaient au fur et à mesure de sa course. Tout ce que l'adolescente espérait, était que son protecteur ne subirait pas trop les conséquences de son acte de désobéissance envers Scur. Cet espoir était utopique mais c'était la seule chose qui lui permettait à ce moment d'avancer. Quelqu'un venait de se sacrifier pour elle et allait certainement perdre la vie, il fallait qu'elle s'accroche à ce qu'elle pouvait...

 Au bout d'un moment, Aelis ralentit le pas. Ce tunnel était extrêmement long. De là où elle se trouvait, elle n'ententdait plus rien. Il fallait espérer que ses poursuivants ne trouvent pas la trappe par laquelle elle était sortie. Castanha restait toujours inerte et l'adolescente le caressait comme pour le rassurer. Elle avançait d'un pas rapide et, après quelques minutes de marche, elle finit par arriver devant un mur de pierres. Une vieille échelle y était adossée et plus haut, elle pouvait distinguer un panneau de bois similaire à celui de la cabane de Glenn. Sans plus hésiter, Aelis déposa la lanterne dans sa sacoche et mit l'écureuil dans sa chemise afin de ne pas le faire tomber. Elle entreprit de monter les vieilles barres de bois à l'aveuglette. Dès que sa tête heurta la trappe, elle la poussa. Elle dut s'y reprendre plusieurs fois avant de parvenir à l'ouvrir. Aussitôt, les rayons de l'astre lunaire pénétrèrent dans le tunnel. L'adolescente s'en extirpa. Elle se demandait bien combien de kilomètres elle avait pu parcourir en si peu de temps. Au loin, les bruits terribles de ceux qui la chassaient se faisaient encore entendre. Il était probable qu'ils retrouvent sa trace malgré tous les stratagèmes de l'ermite.

 Sans plus attendre, Aelis tira sur le sifflet accroché à son cou et souffla dedans de toutes ses forces. Aucun son n'en sortit. Elle se demanda s'il n'était pas cassé et retenta l'expérience. Elle n'eut pas plus de succès. Dépitée, elle tergiversa un moment, tentant de voir si l'objet n'était pas bouché par quoi que ce soit mais elle ne trouva rien. Tant pis, elle ne pouvait plus compter sur Cèrvi. Dépitée et la boule au ventre, la jeune fille entreprit de s'échapper par le côté opposé à celui de la provenance des sons. Mais, dans cette forêt, encore éclairée par le jet de lumière que produisait son arbre de vie, il était très difficile d'être sûr de l'origine exacte des bruits. Tout semblait y résonner. Alors, Aelis tenta le tout pour le tout en récupérant Castanha, toujours logé dans sa chemise. Elle le caressa doucement et lui dit :

 - Je t'en prie Castanha, il faut que tu m'aides. Glenn voulait que l'on sorte tous les deux d'ici... Indique-moi le chemin...

 Le petit écureuil s'anima alors. Lentement, il se leva. Ses yeux exprimaient une profonde tristesse. S'aidant de ses griffes, il finit par descendre au sol et se planta devant l'adolescente, droit comme un piquet. Elle le toisait, ne comprenant pas. Elle pensa un instant qu'il ne voulait plus bouger mais très vite, il se remit en mouvement et grimpa de nouveau sur son épaule. L'humaine prit alors conscience qu'un bruit de sabots approchait. Prudente, elle alla se cacher, tant bien que mal, derrière un arbre au tronc épais.

 Aelis n'était pas rassurée du tout. Incapable de déterminer si Castanha demeurait immobile sur son épaule parce qu'il était en confiance ou parce qu'il était toujours plongé dans son chagrin, elle ne savait que penser. Peut-être était-ce Cèrvi, ou alors un bayard... N'ayant jamais vu de tel animal, elle se demandait à quoi il ressemblait. Glenn avait dit que ces bêtes servaient de monture mais il n'avait pas fait mention de leur apparence. Le son des sabots piétinant le sol se faisait de plus en plus présent. L'animal devait se situer à quelques mètres de la cachette de la jeune fille. Il semblait chercher quelque chose, tourner en rond. Cette attitude effraya d'avantage Aelis qui eut l'impression de se faire pister. Une respiration régulière se laissait aussi entendre. Enfin, la bête se fit toute proche et, sa tête apparut dans le champ de vision de l'apeurée...

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