La fondation face à la mort.

8 minutes de lecture

Enquêter sur la fondation SCP ? Un échec. Enfin, non. On est à Scribopolis ici. À l'image des scribanimos qu'héberge la cité, rien n'est jamais un échec. Ça produit toujours quelque chose, et seule la qualité varie. La dernière tentative d'infiltration, à défaut d'avoir rapporté des informations, avait au moins eût le mérite de propager la touille dans les locaux ennemis. Mais bon, ce n'était pas vraiment l'objectif.


Le bon professeur Louphoque, du fond de sa tanière, qui était aussi son laboratoire de louphoquerie, acheva les révisions de son chef d’œuvre. Maîtresse du déguisement et du camouflage, c'était à elle d'entrer en piste : la seule, l'unique, la mort en tutu. Là, ça allait enfin enquêter sérieusement.


La belle et noble faucheuse, enfila un képi et une cravate pour se rendre à la fondation, accompagnée de deux fossoyeurs agents pour l'assister dans sa tâche : Moue-moue la fossoyeuse hongroise, George, qui n'est plus à présenter, et Jack, fossoyeur irlandais. Bon en vrai elle n'avait pas besoin d'aide. Mais c'était la mort quand même. Fallait bien qu'elle ait de la classe, qu'elle présente bien. Et puis, si y'avait du mourus dans l'histoire, pas question qu'elle creuse elle-même les lits à décédés.


Roger, le chef des gardes des locaux, en avait connu des choses bizarres à la fondation. Souvent à l'intérieur, mais depuis quelque temps, à l'extérieur également. Des ratons laveurs qui s'infiltrent comme des ninjas, un aigle et des fantômes séniles, des belettes agents secrets. Oui, Roger pensait vraiment avoir tout vu dans sa vie. Et pourtant, il venait de tomber nez à nez avec une nouvelle curiosité s'étant téléportée devant ses yeux. La mort, avec une tenue de police.


Premier réflexe des équipes de sécurité : mettre la faucheuse et ses acolytes en joug. Mais bon, était-ce vraiment utile, voire même intelligent, de faire ça ? C'était la fucking mort, pas Oui-Oui au pays des bisounours. Les gardes tremblaient de peur, mais Roger, bien que tout aussi terrifié, ne se démonta pas.


Roger : Messieurs-dames veuillez vous retirer en tout bien tout honneur du périmètre, vous n'avez rien à faire ici.


La Mort : Monsieur, je me dois en ma qualité d'inspectrice d'enquêter chez vous ! Veuillez me laisser passer.


Roger : Enquêter ? Mais enfin, vous êtes la mort !


La Mort : Regardez mon badge, vous voyez bien que j'ai autorité à inspecter !



« La Mort policière »



Voilà ce que le bon Roger put lire sur le badge. Putain, c'était quoi cette connerie ? Bien que ce soit mortel comme décision, chef des gardes persista à refusé l'accès à la faucheuse. La mort, bien que pouvant aisément forcer le passage, décida d'un repli stratégique. Pas de décès inutiles, sinon elle et ses acolytes devraient faire des heures supplémentaires. La mort changea son déguisement, et celui de ses acolytes.


Roger aperçut des silhouettes venir vers lui, casque de chantier et gilets fluorescents à bandes réfléchissantes. L'une d'elles portait également une cravate rose assortie à son... son... à son « tutu » ? Merde, mais c'était tellement cramé que c'était elle. Forme squelettique dans une bure à capuche... La mort quoi. Elle s'avança vers Roger avec assurance :



La Mort : Monsieur, je suis l'inspectrice de la sécurité. Je viens contrôler les locaux.


Roger : Mais vous n'aviez pas dit que vous étiez de la police ?


La Mort : Non, vous faites erreur. Regardez mon badge.



« La Mort inspectrice des travaux finis »



Sérieusement ? Comment ça pouvait marcher une combine aussi fumeuse ? Puis les travaux finis ? C'était y'a des années de retard pour ça. Puis, ça avait beau être la mort, elle n'était pas pour autant habilitée à réaliser ce genre d'inspection. Une fois de plus refoulé à l'entrée, la faucheuse se replia afin de changer de déguisement avec ses suivants. Ô bien sûr qu'elle aurait pu passer quand même. Mais elle s'amusait tellement, pourquoi l'en priver ?


Un magnifique tailleur, une nouvelle cravate et une paire de lunettes en demi-lune, accompagnée de fossoyeurs en tenue de bureau, la mort se présenta à nouveau devant le chef des gardes.


La Mort : Bonjour, je suis la contrôleuse fiscale.



BAAAM !



George : Didiou !


Jack : Nom d'un pochtron ! Il a essayé de tuer la mort !


Moue-Moue : Espèce d'enfoiré !


Roger : Je le jure, le coup est parti tout seul quand elle dît contrôleuse fiscale ! Sans doute un vieux réflexe d'un ancien temps... Mais... heu... J'ai pas à me justifier d'abord. Je suis le chef de la sécurité ici, c'était mon devoir !


La Mort : Allons, du calme mes amis. On ne me tue pas aussi facilement. Quant à vous, monsieur, vous n'échapperez pas aussi facilement à l'inspection. Si vous êtes en règle, rien à craindre, si ?


Roger : Mais la question n'est pas là ! Ces locaux sont classés secrets défenses ! Je n'ai pas le droit de vous laisser entrer, même si vous êtes la... enfin la... Mort !


La Mort : contrôleuse fiscale, regardez, c'est écrit sur mon badge !



« La mort-contrôleuse fiscale »



Encore un badge à la con pour faire croire à un poste officiel. Cela ne tromperait personne, bien qu'un second écriteau semblait à la fois drôle, mais inquiétant :



« Contrôle fiscal saignant garanti »



Celle-là, fallait oser la sortir. Mais bon, qui irait critiquer la mort ? Et surtout, douter de sa capacité à faire couler le sang. Mais Roger n'était pas au bout de ses surprises. À son grand étonnement, dans son oreillette, on lui ordonna de laisser passer la faucheuse. Les types de la direction l'avaient pris pour un SCP, et voulaient la laisser faire pour mieux la capturer. Ils n’avaient pas peur du ridicule ceux-là. Quoique, si ça se trouve, il avait raison. Elle semblait pas si dangereuse que ça la mort, en dehors du fait d'être increvable.


Tout en prenant des notes sur un calepin, elle commença par prendre le temps d'observer le couloir, et le bureau d'accueil... Non, mais y'avait rien à voir, là. Si elle voulait passer un minimum pour une contrôleuse crédible, fallait peut-être commencer par le faire sérieusement. Et voilà que maintenant, elle s'émerveille devant la porte de l’ascenseur, puis sur les touches des étages... Bon, ça allait enfin devenir presque intéressant, à l'étage du dessous.


La mort passa devant les cellules des SCP, mais la plupart s'écartaient des portes instinctivement. Puis, une cellule « SCP-173 » qui attira l'attention de la mort :



La Mort : Ha ! Là, y'a une œuvre d'art, certes moche, mais ça en est quand même une. Dame Moue-moue, veuillez l'inscrire au rapport.


Moue-Moue : Une statue toute moche...


Roger : Non, mais ça va pas la tête, c'est un de nos pensionnaires. C'est vivant ce truc-là !


George : Crénom de non ! C'es'ty pas qu'y faudrait vérifier, dès fois qu'ils voudraient nous prendre pour des lapins de six semaines !


Jack : bon bah aller, moi j'ouvre !


Roger : Mais faites pas ça !



Trop tard, Jack avait déjà pété l'ouverture de la porte. La mort examina la statue, mais rien de rien. Ça bougeait pas d'un poil de cul cette mocheté. Devant un tel constata, la noble faucheuse ne put que réprimander le bon Roger.



La Mort : mais c'est complètement crevé votre truc. Pas un pet de vie là-dedans. Et croyez moi que je m'y connais en truc mort.


Roger : Parce que vous êtes la mort ?


La Mort : Non, parce que je suis contrôleuse fiscale ! Y'a pas plus mortel comme métier !


Roger : Ce que vous dîtes n'a aucun sens ! Mais vite, quittons les lieux, cette chose est dangereuse.


La Mort : Je vois bien que vous essayez de noyer la poiscaille ! Qu'importe, il nous reste encore beaucoup à inspecter.


Roger : Attendez ! On a pas refermé la porte...



Crack !



La statue avait surgi derrière la mort, et tenté de lui briser la nuque. La faucheuse se la remit en place comme on serre un écrou. Mais franchement, d'accord y'avait de la vie dans l'immonde tas de pierres, par contre, côté intelligence, fallait chercher encore longtemps pour en trouver.



George : Didou ! L'as essayer de crever la foutue mort !


Jack : Ouai, ouai, ouai ! Espèce d'enfoiré, tout ça, tout ça...



L'inspection se poursuivit encore et encore, et même jusqu'à croiser dans une cellule une ancienne connaissance de la mort. Sur la cellule, l'inscription « SCP 76 ». La faucheuse fut des plus intrigués par l’individu. Depuis combien de temps était-il ici ?


La Mort : Depuis combien de temps ce salarié est-il chez vous ? Avez-vous un dossier de paye mentionnant la totalité des primes occasionnelle et celle d'ancienneté ? Est-il à jour côté contrat et mutuelle d'entreprise ?


Roger : Quoi ? C'est un pensionnaire ! On ne le paye pas enfin, il n'a pas de contrat. On lui donne seulement un peu de liberté, et lui nous rend des services. Question de sécurité planétaire...


La Mort : je vois, du travail au noir... Très bien ! Dame Moue-moue, veuillez inscrire « travail dissimulé » dans le rapport.


Roger : Mais puisque je vous dis que c'est pas ça...


Moue-moue : Alors, infraction à la législation internationale du travail, fraude à l'embauche, et emploi illicite.


Roger : Mais... mais...


La Mort : Sortez de là mon brave monsieur, ces vils esclavagistes ne pourront plus jamais vous exploiter.


George : Crénom de saligaud de capitaliste !



Et la mort ouvrit la cellule. Et le prisonnier se rue sur la faucheuse. Il invoqua des lames. Tenta de planter la mort à de multiples reprises.



Jack : Bla-bla-bla, tuer la mort, tout ça.


Moue-Moue : bla-bla-bla enfoiré...



La brave faucheuse le laissa faire un peu pour ne pas le vexer. Puis, elle se mit à bailler, signe que ça commençait à l'emmerder grave. De son index, elle toucha le SCP qui tomba au sol, raide... Mort... ?


L'inspection continua dans la joie et la bonne humeur, enfin seulement pour la faucheuse qui s'amusait. Étage suivant, une seule et immense cellule. À tous les coups, soit y'avait un gros truc dedans, soit c'était là qu'ils planquaient le pognon qu'ils devaient aux impôts. Sur la porte, la mention « SCP-343 » alias « Dieu ».


Le premier réflexe de la mort fut d'entrer en force dans la cellule. Apparemment, le nom de « Dieu » semblait l'avoir fait réagir :



La Mort : Hé, dieu comment vas-tu ma couille ?


SCP-343 : Je... Je ne vous connais pas. J'ignore ce que vous me voulez.


La Mort : Allons, tu sais bien ce que tu me dois. Des milliers d'années à collecter des âmes pour ton compte, et jamais la moindre récompense. Il me semble que tu me dois des millénaires de salaire en retard.


SCP-343 : Heu... Moi étranger, moi pas parler ni comprendre langue de vous...


La Mort : Allez, fait pas ton escroc... T'es Dieu, je suis la mort. On a toujours fait équi...



Plop !



Un flash de lumière aveuglante et un nuage de fumée plus tard, la mort et ses fossoyeurs ses retrouvèrent devant les portes de Scribopolis. Bien qu'ils soient rentrés avec toutes leurs notes et informations, cela n'empêcha pas la mort de s'exprimer dans un juron politiquement incorrect, mais qu'il nous faut mentionner et citer, afin de comprendre au mieux la situation :



« L'enculer de sa race de Dieu ! »



Fin de la citation, et de cette histoire de mort infiltrée. Quelles seront les conséquences de ce rapport fiscal ? La fondation a-t-elle livré tous ses secrets à la mort, ou à t-elle encore des cadavres planqués dans le placard ? Cela, fera peut-être le sujet d'une autre histoire.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Scribopolis ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0