La faune locale

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Chapitre 7


Vivre en Martinique implique également que vous ayez le coeur bien accroché et que vous ne soyez pas crispé à l'idée de croiser un animal, inconnu de vous, de jour comme de nuit. Ici la nature est sauvage, non domestiquée. Les moustiques, lézards, grenouilles, criquets, scolopendres et grillons ne sont rien comparé à ce qu'il m'a été donné de côtoyer durant toutes ces années. Un soir par exemple, alors que j'étais en grande conversation avec mon fils, de dos à la porte-fenêtre du salon, je l'ai soudain vu se décomposer et hurler comme jamais, tout en pointant du doigt quelque chose qui se trouvait derrière moi. Je me suis alors retournée et là, j'ai vu accrochée au bois du montant extérieur de la porte, la plus grosse araignée qu'il m'ait été donné de voir de toute ma vie. Je crois n'avoir jamais poussé un tel cri ! 


Ici, on la surnomme « Matoutou falaises ou mygale ». Rien à voir avec la petite épeire qui tisse sa toile dans nos jardins en France. Non, il s'agit en réalité d'une énorme araignée et je pèse mes mots, de la taille d'une main d'adulte, marron claire et toute velue. Si vous ne me croyez pas, regardez sa tête sur internet et on en reparlera... J'ai été soulagée d'apprendre qu'il s'agissait d'une espèce en voie de disparition ! En tous les cas, elle n'est pas sourde, mes hurlements l'ont fait décampé à toute vitesse dans le jardin et je ne l'ai jamais revue ! Mais peut-être était-ce juste dû aux vibrations de mes vocalises... Mais soyez rassurés, bien que sa morsure soit venimeuse et douloureuse, elle ne nécessite aucune intervention médicale. Les « chances » de se faire mordre sont de toutes façons infimes, elle est bien trop craintive et encore une fois bien trop difficile à observer...


En me renseignant à son sujet, j'ai appris que lors de son accouplement, si la femelle n’était pas prête, elle dévorait le mâle. Intéressant, non ? Par contre ce qui est beaucoup moins drôle, c'est que trois mois après l’accouplement, cette dernière fait un cocon en forme d'entonnoir dans les arbres, pour donner naissance à environ 150 mygalons bleus et blancs, deux mois plus tard. De petites araignées qui devraient atteindre leur taille adulte en deux années !!


Une autre fois, tranquillement installée sur ma terrasse à la tombée du jour, je suis restée interdite devant la bête la plus laide qui soit. Il s'agissait d'un opossum ou " manicou ". Il ressemblait à un rat mais en plus grand, avec un long museau clair où quelques poils se battaient en duel, de petits yeux luisants et une longue queue. Le temps que j'aille chercher mon appareil photo, il avait disparu. 


Par contre, il m'a été donné de visiter l'îlet Chancel en kayak, un havre de paix pour iguanes. Après avoir passé la quasi-totalité de ma visite les yeux fixés au sol afin de les apercevoir, je n'ai appris que vers la fin de ma ballade que la majorité d'entre eux, à cette heure de la journée, se trouvait en fait dans les arbres ! Comment aurais-je pu deviner que ces énormes lézards avaient une telle dextérité ! Cette révélation m'a permis de constater leur nature profondément pacifique, amatrice de farniente et de soleil. 


Quelques mois après mon arrivée sur l'île, mon père et moi avons décidé de faire l'ascension du morne Larcher. Habitués aux vipères de chez nous et à la marche, baguettes en main, nous avons tapé le sol pendant deux heures, jusqu'au sommet et retour, afin de les faire fuir. Pour apprendre par la suite, grâce à un habitué, qu'en réalité il s'agissait plutôt de trigonocéphales et qu'ils se nichaient eux aussi dans les arbres ! À posteriori, nous en avons eu des sueurs froides. Je crois que si un seul avait eu la malencontreuse idée de tomber sur moi, je serais moi aussi tombée à la renverse, mais d'une crise cardiaque ! Quant on sait que les femelles peuvent atteindre jusqu'à deux mètres cinquante et que leur morsure est mortelle... Il existe aujourd'hui un sérum créé spécialement par l'Institut Pasteur que je vous conseille d'acheter en pharmacie et d'avoir sur vous en cas de ballades en forêt. 


Comment pourrais-je encore douter de ma bonne étoile ! 


Moralité, aux Antilles, gardez les yeux levés vers le ciel ! Et pas seulement pour l'implorer ! 

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