Message à toi

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Sylvie,

Voici maintenant deux ans que je suis parti. Je t'ai quitté jeune homme, je reviendrai déjà vieillard. La guerre vieillit les hommes comme le froid et l'orage gèlent les roses. Souviens-toi de celle que j'avais cueillies pour toi : rouge éclatant de beauté, elle déployait ses pétales si gracieusement posés sur sa corole verte. Ils s'étendaient dans une extrême et douce volupté, soutenant sans peine les gouttes de la rosée. Exhalant ses parfums, elle semblait jouer d'un instrument éolien connu seulement des roses : senteurs de printemps, senteurs de soleil doux sur nos visages, et senteurs de ta peau, ton parfum fleuri et si doux et de ton corps que je ne vois plus depuis trop longtemps déjà...

Mais, souviens-toi aussi de l'orage si dur qui avait coupé court la vie si pure de cette rose : elle n'avait pas fini de nous charmer de ses parfums lorsque le ciel la rappela vers lui. La première goutte avait fait ployer durement ses pétales aériens, refusant de rompre elle avait relevé avec force chacun de ses membres. Mais bientôt les gouttes s'étaient assemblées en monstrueux morceaux de glace. La fragile rose d'une beauté si douce ne pouvait qu'affronter vainement le coupant et le tranchant de ces bris de glace qui s'abattait sur elle comme des projectiles enflammés.

Souviens-toi aussi comment le soleil s'était retiré pour ne plus nous imposer la vue de cette atroce condamnation. Nous étions rentrés amoureux dans notre chambre, cependant que la rose subissait l'horreur d'un déluge d'obus glacés. Je serai et suis cette rose qui subit la grêle, y succombe...

Sylvie, ton nom m'évoque la forêt dans laquelle nous allions nous réfugier ensemble, il y a trop longtemps déjà. Mon amour, va dans cette forêt qui n'existe plus, cours-y de toute ton âme mais n'espère pas m'y retrouver. Va te réfugier dans ce monde perdu que je chérissais tant et qui s'efface à mesure que ces mots s'écrivent. Vas t'y perdre sans attendre, fuis de tout ton être la folie de l'homme qui perd son humanité en la ravissant à d'autres.

Cécilien.

PS : tu cueilleras des roses pour moi et les tu déposeras près de ma dernière demeure.

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