28 – Tsadir : Dans la toile

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Installée dans son siège sur la passerelle, elle observe le cosmonaute indiquer les commandes à l’IA. Les sièges se sont orientés pour que la force centrifuge ressentie les pose gentiment dans le fond de leurs sièges. Le mouvement est très lent et Tsadir ressent à peine la gravité artificielle induite par la danse des deux vaisseaux.

Sur l’écran principal, Tsadir ne saisis que la représentation virtuelle des deux vaisseaux. Les deux appareils sont maintenant tellement proches qu’ils pourraient presque se toucher. La samouraï réalise que, techniquement, un tel contact s’appellerait un crash.

Dans cette vue attachée au référentiel de l’Akasha, les deux appareils semblent maintenant immobiles. Pourtant des représentations des vecteurs de poussées du vaisseau de Feyn montrent leur activité et une multitude de micro-corrections en temps réel. L’image radar de leur cible est tellement détaillée que Tsadir jurerait voir les détails des écailles du blindage. Malgré tout, elle ne distingue aucune marque de dégâts en dehors de quelques éraflures probablement provoquées par des débris lors de ses voyages.

Feyn lance la procédure de capture et la wardner voit les quatre bras mécaniques s’abaisser pour maintenir la distance entre les deux appareils fixe. Malgré la précision de la manœuvre, le choc du contact résonne à travers la structure de l’Akasha. Toujours aussi concentré, Feyn déclenche le largage de filins autoguidés qui font le tour de l’appareil et se connectent deux à deux de l’autre côté. Lorsque la vingtaine de câbles se sont retrouvés, ils se tendent lentement jusqu’à enserrer la proie.

L’image est amusante : l’Akasha fait moins d’une cinquantaine de mètres de long tandis que le Mona Lisa doit en fait un peu plus de quatre-vingts. Et pourtant, c’est le petit bourdon qui a attrapé colosse.

« Commandant, la capture est terminée, annonce l’IA de bord.

– Lance la procédure de stabilisation, commande l’astronaute. Doucement dans un premier temps. S’il y a des survivants, ne les secouons pas.

– Bien commandant. », acquiesce l’IA à l’avatar de fée.

Sur l’écran, de nombreux propulseurs latéraux s’allument sur l’Akasha et le siège de Tsadir bascule très lentement sur le côté. En une vingtaine de secondes, l’apesanteur est complètement revenue.

Feyn, croise les mains comme pour signifier sa victoire avant d’annoncer : « Et voilà ! Attitude rétablie. Akasha, donne-moi le statut de notre trajectoire commune.

– Nous suivons toujours une trajectoire orbitale elliptique : la manœuvre ne l’a pas significativement perturbée, indique l’IA.

– Conserve les drones à portée, histoire de suivre tout dégagement du vaisseau, ordonne-t-il.

– Très bien commandant, confirme-t-elle.

– Tsadir, il va être temps d’entrer dans ce monstre, l’informe Feyn. On se retrouve au sas, pour se mettre en combinaison.

– Ça marche commandant. », s’amuse-t-elle en détachant les sangles de son siège. Feyn passe devant, la tête la première vers ce qui était le bas quand le vaisseau était en poussée. L’image retourne un peu l’esprit de la samouraï et son IA de supervision écrase un début de nausée.

Bon, reconnaît-elle, il va falloir être prudente maintenant.

Dans le sas, Feyn l’aide à s’équiper. Les combinaisons de l’Akasha sont prévues pour des sorties et sont particulièrement encombrantes. Devoir remettre une couche à son âge la perturbe un peu mais personne ne sait combien de temps va durer la sortie. Feyn s’équipe plus rapidement, trahissant une longue expérience. Au moins, la samouraï est entre de bonnes mains sur cet aspect.

Alors que l’écoutille externe s’ouvre, Tsadir est surprise : elle s’était attendue à traverser le vide entre les deux vaisseaux à l’aide d’un filin ou pire en s’aidant du mini-jet-pack de sa combinaison. Au lieu de ça, l’Akasha a déployé le conduit en tissu origami qu’elle avait emprunté en montant à bord la première fois.

Arrivés à l’autre extrémité, Feyn vérifie les attaches du tube de connexion. Visiblement rassuré, il examine ensuite l’écoutille d’accès au Mona Lisa.

« Le sas est dépressurisé. Je vais l’ouvrir manuellement. », indique-t-il en sortant son multitool. Modifiant la tête de la visseuse pour correspondre à la prise de l’accès, il fait signe de reculer à Tsadir. Glissant sur le tissu blanc, elle s’exécute sans le perdre de vue. Par précaution, elle a dégainé son pistolet shock et vise la porte, prête à réceptionner tout ce qui pourrait essayer d’en sortir violemment.

Sans un seul bruit, Feyn déverrouille la porte du sas et la fait basculer, très lentement, vers l’intérieur.

« On peut entrer, le sas à l’air sûr. », indique le raton laveur en combinaison alors qu’il replace ses outils sur leurs emplacements. Les deux astronautes glissent dans le sas. Il est plutôt étroit, même si cette impression est évidemment due à l’absence des repères spatiaux habituels. Examinant le terminal du sas, l’expert déclare : « Pas de courant. ». Pivotant avec précision, il reporte ensuite son regard sur l’écoutille du sas.

Bénéficiant de l’image prise par la caméra du casque de Feyn, Tsadir constate, comme lui, que le petit afficheur mécanique de la porte indique une pression nulle à l’intérieur.

« C’est mauvais signe. », confirme l’astronaute.

Ressortant ses outils, il s’attelle à nouveau pour ouvrir la seconde porte. Pendant ce temps, Tsadir jette un dernier coup d’œil vers l’Akasha. La spirale de triangles blanc éclairée par les puissants projecteurs du vaisseau lui donne l’impression qu’ils sont descendus directement du Soleil. Elle revient rapidement à sa mission actuelle.

« Voilà ! », s’exclame son coéquipier tandis qu’il pousse la porte vers l’intérieur. Là encore, Tsadir garde son arme pointée vers le couloir ténébreux. Les lampes du casque de l’astronaute projettent des ombres fantastiques dans l’espace abandonné d’une grande coursive.

Feyn déploie un petit drone d’inspection et le dirige vers l’intérieur. Une nouvelle vue de l’intérieur, en infrarouge, apparaît dans l’espace virtuel de Tsadir. La coursive doit parcourir près de la moitié de la longueur du vaisseau.

« Bien, quand il faut y aller… Première étape, les générateurs : il faut comprendre pourquoi le courant a été coupé. », annonce le spécialiste en exploration d’épaves spatiales avant de se glisser dans la coursive.

Quand il faut y aller… Se répète Tsadir franchissant l’écoutille et plongeant dans les ténèbres éclairées par les seules lampes de leurs casques.

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