6 – Anton : Le programme

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Le lit de Gloria semble petit dans la chambre privatisée de l’hôpital. Bien qu’il serait insensé que quiconque de non autorisé puisse tenter de pénétrer dans le quartier de Sol6, un soldat est assis dans le coin opposé à l’entré, vigilant. Anton lui adresse un hochement de tête et entre.

Gloria est visiblement en train de discuter en visioconférence. Malgré ses traits tirés et son teint un peu pâle, la femme de quatre-vingt-quatre ans déborde toujours d’énergie. L’homme se demande si le monde ne s’effondrera pas avant elle. Le voyant approcher, elle donne quelques instructions à ses collaborateurs, leur souhaite une bonne journée et raccroche.

« Anton ! Ça me fait plaisir de te voir, s’exclame-t-elle.

– Moi aussi je suis heureux de te voir, lui confie-t-il. Toujours aussi active, hein ? Les médecins m’ont dit que tu pourras sortir dans quelques jours : en attendant, prend un peu le temps de te reposer.

– Tu devrais me connaître avec le temps : ne jamais cesser de vivre, déclare-t-elle en étouffant un rire.

– Cette fois-ci, on a vraiment eu peur de t’avoir perdue, avoue-t-il en baissant la tête.

– Ça viendra quand ça viendra, s’amuse-t-elle. Pour le moment, chaque instant compte. Alors, que penses-tu de cette Alice ?

– Les recherches n’ont rien donné, déplore-t-il. La génétique n’indique aucun lien de parenté avec tes ravisseurs, et ses empreintes ne figurent dans le registre d’aucune nation de l’Alliance Africaine.

– Souvent, je me désole que les puissances en ce monde restent là, à ne rien faire, alors que ces choses terribles se passent, se révolte Gloria. Si on peut envoyer cinq avions de combat et plusieurs unités d’assaut lourd pour une vieille dame comme moi, pourquoi ne fait-on rien pour tous ces enfants ?

– Je veux bien en parler à Tachyon, mais je doute qu’ils en retiennent quoi que ce soit, plaisante-t-il amèrement. J’ai d’autres choses sur Alice.

– Rien de grave, j’espère ? s’inquiète la convalescente.

– Je lui ai fait passer les tests d’évaluation standards de Sol6 et elle est… surprenante.

– C’est-à-dire ? Interroge la femme en fronçant les sourcils.

– Elle parle l’anglais et le swahili de façon très correcte, décrit-il. Elle ne sait pas lire, mais ses résultats aux tests de QI la placent dans le dix-millième du haut. Et avec ses exploits sur le terrain, Sol6 ne la laissera pas repartir dans la savane.

– Je ne saisis pas, hésite Gloria.

– Elle est admise, indique Anton sobrement. C’est tout. Dès demain, elle sera intégrée au programme de formation. Une fois son éducation et son instruction faites, elle aura le profil parfait pour une astronaute et Sol6 continue d’avoir besoin d’opérateurs dans les colonies.

– C’est une enfant, pas un nouveau gadget pour la corporation ! s’indigne-t-elle.

– Oui, mais il y a peut-être moyen de faire d’une pierre, deux coups, lui explique l’homme en s’approchant avec bienveillance.

– C’est-à-dire ? se répète-t-elle.

– Légalement, Sol6 ne peut pas engager une mineure sans l’accord de sa famille, détaille Anton. Or elle n’a aucune famille et le gouvernement risque de la placer dans un foyer sans qu’elle puisse être recrutée. Je ne vais pas te mentir : mes supérieurs aimeraient vraiment que quelqu’un adopte cette enfant. Quelqu’un de l’intérieur.

– Que je l’adopte ? Mais j’ai déjà 84 ans !

– Je sais que c’est compliqué, mais je persiste à me dire que tu aurais bien besoin de quelqu’un toi aussi, plaisante Anton. Tu n’auras pas tant de chose à faire et tu sais que Sol6 traite bien ses incorporés.

– Oui… Je vais avoir besoin de temps pour réfléchir.

– Bien sûr, comme je l’ai dit, repose-toi, tu en as besoin. Pour le moment, Sol6 a verrouillé le placement de l’enfant sous le prétexte de l’enquête et je veille personnellement à ce qu’elle soit bien traitée.

– Est-ce que je pourrais la voir ? demande Gloria. Je n’ai pas eu l’occasion de vraiment la remercier.

– Bien sûr, acquiesce Anton. Si tu veux, je vais la chercher.

– Maintenant ?

– Maintenant, ok. », termine l’homme avec un sourire amical. Il se relève et adresse un signe de la main au soldat et sort de la pièce en adressant un petit sourire à la femme alitée.

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