Chapitre 13

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Kami était paniqué. Il n'avait pas forcément tout compris, mais son regard était halluciné. J'ouvris les yeux. Mes cheveux étaient couverts de sang. Je fis une grimace, où le dégoût se mêlait à la souffrance, et me relevai péniblement.

— Kami, écoute-moi. Ce n'était pas vraiment moi dans la voiture.

Je regardai une seconde ma main ensanglantée, j'étais fébrile, j'avais peur de sombrer dans l'inconscience d'une minute à l'autre.

— Kami, j'ai été possédée. C'est Malia qui a tout manigancé. Elle a juré de te détruire, je crois qu'elle ne sait même pas pourquoi. Elle avait un ange, tu sais ? Une sorte de gardienne, avec qui elle parlait souvent lorsqu'elle était enfant. C’est elle, sa gardienne, qui lui a demandé de te détruire. Elle a dit que ce serait la dernière fois. Je crois qu’elle veut sortir du cycle des réincarnations, et que pour cela elle doit te tuer, ainsi que Salem, sans y perdre la vie.

Il ne répondait pas, il semblait sous le choc. Son visage était baigné de larmes, sale et sanguinolent.

— Après l'accident avec Robin, je n'avais plus aucun souvenir. Je me suis réveillée, le dimanche, sans comprendre pourquoi ma voiture était accidentée.

La pluie s'était arrêtée, le ciel était calme à présent, et le silence autour de nous me pesait, car il rajoutait encore plus d'intensité à mes explications. J'essayai de lui transmettre ce que je savais, mais dans la confusion que me provoquait la douleur, j'omis peut-être certains détails.

— J'ai cru que tu étais morte. J'ai vu cette lueur s'élever de toi… J'ai cru que tu étais morte !

Oui, il avait failli me tuer. Je ne comprenais pas, d'ailleurs, pourquoi j'étais encore en vie. Les blessures qu'il m'avait infligées à la tête étaient potentiellement mortelles.

— Ce n'est rien, mentis-je.

Bien sûr que je lui en voulais. Comment avait-il pu douter autant de moi, comment avait-il pu souhaiter ma mort ? J'étais triste, mais je ne pouvais pas l'accabler. Il avait encore à faire, il devait régler cette histoire.

— En fait, je crois que je suis morte pendant quelques secondes… Et ça a suffi pour me libérer de l'emprise de Malia sur moi. Mais il faut la retrouver maintenant.

— Je vais m’en occuper. Toi, tu dois oublier tout ça. Je m'en veux tellement. Et si tu étais…

— Je suis là, c'est tout ce qui compte. Laisse-moi venir avec toi, ça me regarde aussi.

— Non. Après tout, nous devons régler ça entre nous, Salem, Malia, et moi. Ne m'en veux pas. C'est juste que…

Je lui fis signe de ne rien ajouter. Peut-être était-ce mieux ainsi finalement.

— Je sais.

 

***

 

Nous ne prononçâmes pas le moindre mot. Enfin, je ne crois pas. Nous nous sommes rendus à la basilique, elle ne se trouvait pas vraiment loin. Je dissimulai autant que possible mon mal-être à Kami, mais j'avais l'impression que j'allais mourir dans l'instant tellement je me sentais faible et que la tête me tournait.

Le sang continuait à s'écouler entre mes cheveux. Je devais être pitoyable à voir. Mon ami aussi était dans un état lamentable. Les gerbes d’énergie de Malia avaient déchiré ses vêtements, et sa peau semblait brûlée à certains endroits. Je ne pouvais pas réfléchir, j'avançais comme une condamnée.

Lorsque j'eus terminé le chemin de croix dans la basilique, j'allai m'asseoir sur les marches à l'entrée. Je soufflai. Kami était enfin au courant, j'avais réussi à lui dire ce que je savais, j'avais accompli ma mission. Je posai ma tête contre la barrière à côté de moi. La mélancolie m'enserrait le cœur. Jusqu'où la peur de l'avenir pouvait conduire certains ? Jusqu'à la folie ? Au meurtre ? À la trahison ?

Pauvre Malia, elle était perdue. Son âme, trop vieille pour continuer à exister sur terre, devenait toxique pour l'humanité qui l'entourait. Comme je la plaignais ! Ogora avait raison. Bienheureuses, les jeunes âmes qui n'ont pas à s'inquiéter de l'après !

Kami vint s'asseoir avec moi. Lui aussi allait mieux. Autour de lui, persistait comme un éclat surnaturel, une aura divine que je connaissais bien. Celle que donnaient les églises à tous ceux qui parcouraient le chemin fantastique.

— Tu sais comment la retrouver ?

Même si l'atmosphère était plus sereine, Kami avait le visage crispé. Sa peau, diaphane, semblait faite de cire et ses yeux roulaient compulsivement dans leurs orbites.

— Non, j'ai peur de ne pas réussir. Et si elle disparaissait ? Elle a échoué, elle pourrait simplement s'enfuir et attendre la prochaine occasion, dans quelques années, lorsque plus personne ne pensera à elle.

— Je ne crois pas qu'elle le fera.

Le soleil nous baignait, les nuages avaient tous fui et il ne restait plus que la lumière crépusculaire pour nous raccrocher à la réalité. Je le regardai, il était si triste et pourtant si déterminé.

— Elle pense que le moment est arrivé. Elle n'a plus d'emprise sur moi, mais elle ne va pas s'arrêter pour autant.

— Salem.

Bien sûr, il avait raison. Il n'y avait pas que Kami en danger. Malia avait échoué dans son entreprise de les faire s'entretuer. Elle n’avait pas réussi à tuer Kami. Elle se tournerait sûrement vers Salem.

— Trouve-le et tu la trouveras.

— Comment ? Je n'ai aucun moyen de le contacter, il me fuit, et je ne sais pas où est le siège des Larmes de Prométhée.

Sa panique était palpable, mais je pouvais l'aider.

— Chut, on va le faire ensemble.

Je pris ses mains entre les miennes et laissai s'entremêler nos énergies. La magie de Kami me pénétra et la mienne l'emplit dans la moindre de ses molécules. Nous n'étions pas deux magiciens, mais bel et bien un seul et unique être. Notre pouvoir s'étendit sur Lyon, par vagues, comme je l'avais fait pour attirer Kami ici. Très vite, nos tentacules psychiques se développèrent par-delà les frontières terrestres.

Nous ne savions pas où étaient vraiment nos esprits. Ils parcouraient le monde intangible dans lequel les énergies de chacun se mêlaient. J'envoyai quelques images à Kami, puis des paroles. Je souhaitais le guider. Seul son esprit pouvait trouver Salem, car je ne le connaissais pas vraiment. Pense à lui, Kami. Vos âmes sont faites l'une pour l'autre. Elles se cherchent depuis la nuit des temps, depuis leurs incarnations sur cette planète. Concentre-toi, il est là, quelque part, tout près de toi. Certains des souvenirs de Kami vinrent se heurter à ma mémoire. Des images de sa rencontre avec Salem, quelques années auparavant, puis une vision surnaturelle. Cette vision, mon ami la connaissait. Il l'avait déjà vue, et elle comportait la réponse à ses questions. Il savait où se trouvait Salem.

 

Avant qu'il ne parte, je lui pris la main. J'étais grave, j'en avais conscience, mais je ne pouvais faire autrement. Ce que j'avais à lui dire lui serait insupportable, c'était certain.

— Kami, essaie de la comprendre.

— Je ne veux pas t'écouter Syrine.

— Non, ne la condamne pas si violemment. Je ne veux pas que tu regrettes, pour la survie de ton âme, pour que tu puisses sortir de ce cycle qui n'a que trop duré.

Ma voix se faisait suppliante.

— Ne la tue pas.

— C'est au-dessus de mes forces. Je ne peux pas faire autrement. Laisse-moi maintenant. Ils m'attendent.

Il dégagea son bras et s'en alla, m'abandonnant sur le parvis de la basilique Notre-Dame de Fourvière.

— Sois prudent.

Il n’eut aucun regard vers moi, sûrement déçu que je ne souhaite pas la mort de Malia. Et pourtant, étais-je vraiment à blâmer ? Malia me semblait devoir vivre encore. Mon instinct qui me criait de la secourir. Je crois que, si quelqu'un m'avait soutenu, j'aurais peut-être même aidé Malia à s'enfuir. Mais ce ne fut jamais le cas.

 

***

 

Ma voisine, Madame Baïkèche, attendait devant la porte de mon immeuble. Quand le taxi me déposa, elle se rua sur moi. Sur le moment, j'ai même cru qu'elle allait m'embrasser tant elle semblait soulagée de me voir arriver. Elle me dévisagea de la tête aux pieds, ne manquant pas de noter que j'étais recouverte de boue et de sang séché.

— Ne me posez pas de questions, je vous en prie.

— Comme vous voudrez Syrine.

Elle me paraissait minuscule, encore plus que la semaine précédente. Mais j'avais l'impression qu'elle rayonnait, elle se sentait utile et ce n'était pas peu dire.

— Pourrez-vous faire ce que je vous ai demandé ?

Je lui tendis mon article, elle devrait le remettre en mon nom à mes employeurs.

— Oui, ne vous inquiétez pas, je le ferai. Je leur expliquerai que vous devez partir, et que vous leur enverrez vos prochains écrits par courrier ou par Internet.

Je ris un peu, elle parlait avec un accent charmant, mais son air sévère lui faisait le visage comique.

— Merci, Madame Baïkèche, vous êtes une vraie mère. Et pour votre petit-fils, avez-vous eu le temps de l'appeler ?

— Oui, il n'y a aucun problème. Il vous attendra aux hangars, à minuit ce soir, juste à la sortie de Lyon. Vous voyez où ils sont ?

Je hochai la tête.

— Il vous donnera les clés d'une fourgonnette, que vous garderez pendant une quinzaine de jours. Au terme de ces deux semaines, vous devrez être à Paris pour récupérer votre camion.

— C'est vraiment généreux de vous être embêtée pour moi.

Finalement, ce fut moi qui la serrai dans mes bras. Elle me repoussa gentiment et remua son doigt sous mon nez.

— C'est normal ma petite. Mais n'oubliez pas, le chèque doit être à votre nom. Il accepte parce que je vous connais, alors pas de fantaisies, d’accord ?

— Oui, ne vous inquiétez pas. Merci encore.

 

Je grimpai les marches quatre à quatre et rentrai précipitamment chez moi. Qu'est-ce que je faisais ? Je n'étais pas certaine de ce qui allait se passer, mais je savais inexplicablement comment je devais agir. Machinalement, sans y penser, je fis mes valises. J'emportais « tout ». J'entassais tous mes vêtements, tous mes livres, dans des cartons et des malles. Bien entendu, il y avait beaucoup de choses que je ne prenais pas, mais, de façon générale, je ne laissais rien d'important.

Ogora arriva pour m'aider à charger mes affaires dans sa camionnette. Heureusement qu'elle était là ! Je tentai d'imaginer ce que j'aurais fait seule avec ce nombre impressionnant de sacs et de valises. Nous ne restâmes pas, juste le temps de revoir une dernière fois ce bel appartement.

Il allait me manquer. Je fermai les yeux, une fois encore, comme pour imprimer dans mon esprit une ultime image de l'endroit où j'avais vécu de si agréables moments, puis je tournai la clé dans la serrure, définitivement.

— Tu es sûre de toi ?

— Tu veux te dégonfler, Ogora ?

Je lui souris.

— Ne t'inquiète pas, je sens que nous devons le faire. Et nous avons peu de temps. Mais si je me trompe, Kami ne nous en tiendra pas rigueur.

Nous étions devant la porte de l'appartement de Kami. Je posai mes mains sur la serrure et projetai mon énergie. Un craquement sourd se fit entendre et le mécanisme céda.

— Si on nous surprend, ce sont des problèmes assurés !

Elle avait raison. Mon cœur battait à tout rompre, l'excitation me rendait légère et la peur me donnait des vertiges. Je sentais l'adrénaline courir dans mon corps.

— Je te dis de me faire confiance !

Je me dirigeai directement vers la chambre de Kami.

— Bon, tu t'occupes de ses vêtements, je vais chercher le reste.

Je savais qu'il possédait une salle consacrée à la magie, là où il entreposait tout ce qu'il chérissait. Je laissai Ogora et traversai le long couloir jusqu’à trouver une tenture qui dissimulait un passage. Je m'y engouffrai et poussai la porte du bureau de Kami.

La pièce me parut immense et effrayante. Tout n'était que ténèbres, et pourtant il y avait une espèce de lumière qui s’en dégageait. Je n'étais jamais venue ici. C'était là, la retraite de Kami. Des dizaines de grimoires tapissaient sa bibliothèque, des bibelots magiques un peu partout, et des variétés incalculables d'encens et de fleurs recouvraient les étagères. L'endroit était odorant, un mélange puissant de senteurs qui faisait tourner la tête. J'entrepris de mettre un maximum d'affaires dans des cartons, mais, bien vite, je dus me rendre à l'évidence : je ne pourrais jamais tout emmener.

Finalement, trois cartons de livres et deux sacs d'ustensiles en tous genres plus tard, je fus contrainte de décider qu'il suffisait.

Je rejoignis Ogora dans la salle à manger. La pièce avait été décorée avec classe. L'immense baie vitrée donnait une vue inimaginable sur Lyon. Ogora avait le nez collé à la vitre et paraissait parler toute seule.

— Ogora, ça va ?

Elle se retourna et me regarda droit dans les yeux.

— Tu pars vraiment, n'est-ce pas ? Tu me quittes.

Je frissonnai, elle semblait si triste et désemparée que je ne savais pas quoi faire.

— Je crois que le moment est arrivé.

Elle laissa échapper un petit hoquet de dépit.

— Mais tu l'as toujours su, non ? Je ne t'ai jamais caché qu'un jour je m'en irais pour de bon. Tu te souviens de notre projet, à Kami et à moi. De courir le monde, de quitter tout ce semblant de vie, de voir la vérité, et d'enfin Connaître au lieu de Savoir.

— Je croyais justement que ce n'était qu'un rêve !

— Je suis désolée.

Je la pris dans mes bras.

— Mais as-tu pensé que tu pouvais faire erreur ? Le moment n'est peut-être pas réellement venu.

— Si ce n'est pas maintenant, alors quand partirons-nous ?

— Je sais que tu as raison, mais...

Sa voix se brisa, elle pleurait, le visage enfoui dans mes cheveux.

Elle se dégagea de mon étreinte et me tourna le dos, admirant notre magnifique cité. La nuit l'avait engloutie. Je regardai Ogora tenter de s'oublier dans l'admiration de la ville, et pris conscience de l'importance que nous avions l'une pour l'autre.

— Ogora.

Elle ne réagit pas. Je m'approchai doucement d'elle et l'entourai de mes bras.

— Ogora, je te fais le serment que nous nous reverrons.

— Et dois-je te croire sur parole ? Si vous partez, jamais vous ne reviendrez.

— Chut, crois en moi. Je reviendrais, et nous ne nous séparerons plus. En attendant, veille sur Lyon, veille sur notre cité. La nuit, pense à moi, parce que la nuit nous appartient. Promets-moi d'aller sur les quais parfois, juste pour voir si personne n'a besoin de pleurer sur un banc, à tes côtés. Tu le feras, n'est-ce pas ?

— Je le ferai.

Elle me serra fort, pour me signifier que l'instant lui était insupportable, et elle me sourit.

— Ce sera bientôt être l'heure.

 

Nous venions de finir le chargement de la camionnette. Elle était pleine à craquer, mais tout était rentré. Mon téléphone sonna, c'était Kami. J'y étais. Une période se terminait pour de bon, et une autre allait commencer. Je fis mes adieux à Ogora.

J'étais déchirée par la peine. Je savais qu'elle me manquerait plus que je ne pourrai le supporter, mais je restai le plus digne possible. Enfin, je pris la route. Mon corps était fatigué, je le sentais, mais pourtant mon esprit était toujours aussi vif et précis.

Je conduisis pendant une heure, un peu plus en fait, et arrivai dans ma ville natale. Les choses changeaient peu ici. Bien sûr, quelques détails avaient été modifiés, mais, dans l'ensemble, je connaissais tout de la petite commune. Je pensais à mon père et à ma sœur, à quelques centaines de mètres de moi. J'avais toujours imaginé leur dire au revoir et prendre la route avec Kami, le cœur léger et empli d'espoir.

Je ris intérieurement. Comme je m'étais trompée ! Cette nuit, aucune légèreté, aucune espérance, ne nous ferait partir à travers les chemins. Seules la souffrance et la tristesse nous guideraient et nous amèneraient à opter pour ce choix ultime. Mais, après tout, peut-être était-ce nécessaire. Depuis des milliers d'années, certains prônent que la douleur est un moteur inégalable pour les êtres humains. Ils ont probablement raison finalement.

 

Je me garai au bord d'un champ. Tout était plongé dans le noir. Je scrutai un moment les ombres et, ne décelant rien, me décidai à sortir de mon véhicule et à explorer un peu. Très vite, je trouvai Kami et Salem allongés sur le sol. Ils étaient couverts de sang. Leurs vêtements étaient déchirés par endroits et leurs visages tuméfiés. Salem dormait, la tête posée sur le torse de Kami. Je m'agenouillai auprès d'eux, et chuchotai de peur de réveiller Salem.

— Est-ce que Salem va bien ?

Kami observa tristement son bel ami qui respirait profondément.

— Il n'a pas dit un mot, je crois qu'il est encore sous le choc.

— Où est Malia ?

Il secoua la tête.

— Je ne pense pas qu'elle retente quoi que ce soit dorénavant.

— Nous devrions peut-être le ramener, dis-je en regardant Salem.

Ses cheveux lui couvraient à moitié le visage et le cou. Ils se ressemblaient beaucoup tous les deux. Ils avaient la même pâleur de peau, cette lumière crue qui émanait de leurs faciès et de leurs auras. Ils étaient comme deux esprits incarnés, malheureux et perdus, mais si beaux.

— Je ne sais pas où le ramener. J'ai peur de le laisser seul. S'en remettra-t-il ? Il aimait tellement Malia.

— Tu as peur qu'il ne te pardonne pas sa mort ?

— Peut-être, oui, un peu…

Kami parlait doucement, mais ce n'était pas par égard pour Salem. Non, il avait le souffle court, comme s'il ne pouvait plus croire en rien ni en personne.

— Mais il t'aime aussi. Il comprendra.

— Et toi, tu as fini par comprendre que sa mort était nécessaire.

— Elle l'était pour que tu puisses trouver le repos, répondis-je.

Il leva les yeux au ciel, une myriade d'étoiles ornait la toile noire au-dessus de nous. Le spectacle était radicalement différent de celui offert par Lyon.

— Je crois que je ne trouverai jamais la paix.

Salem se réveilla.

— Je ne t'en veux pas Kami. Tu as fait ce que tu devais.

Sa voix était belle, un peu nasillarde, avec un accent discret et ensoleillé. Il s'assit et regarda Kami droit dans les yeux.

— Ce que Malia a fait n'était pas pardonnable. Tu as pris la bonne décision.

— Mais comment es-tu arrivé ici ? lui demandai-je d'une voix effacée.

— En fait, j'ai compris que Malia était derrière tout ça grâce aux bribes de souvenirs que Kami a réussi à entrevoir dans mon esprit.

J'ignorais parfaitement de dont il parlait.

— Lorsque je suis allé au Rouge, trouver Salem, j'ai usé de mon pouvoir pour connaître ses souvenirs, m'expliqua Kami. Je l'ai vu dans le mausolée, contempler la rose noire, et je me suis aperçu qu'il ne savait pas à quoi correspondaient ces images.

Alors Salem avait réussi à se souvenir de quelques moments de la période où il avait été possédé !

— J'ai passé des nuits à faire des cauchemars horribles, où Kami me pourchassait, où je l'admirais enchaîné à ma tombe, où la planète était faite de sang et de terre… Bref, ces souvenirs m’ont hanté inconsciemment et j'ai tout fait pour les refouler. Mais, quand Kami est intervenu au Rouge, les membres des Larmes de Prométhée ont décidé de m'aider. Nous avons fait une multitude de rituels jusqu'à ce que la réponse arrive, tout à l'heure. Je suppose que nous avons eu la même vision Kami, celle qui nous a menés ici.

— Oui, la même que nous avions eue il y a quelques années.

— C'est Malia, en fait, qui l’a provoquée. Elle avait tout prévu. Elle a envoyé cette image, sachant que nous comprendrions tout de suite de quel lieu il s'agissait.

Je les regardai, incrédule. J'avais toujours du mal à les suivre. Il était évident que leurs âmes se connaissaient par cœur, on le percevait rien qu'en les voyant. Tout paraissait logique entre eux.

 

Nous avons continué à parler pendant longtemps. Je ne disais pas grand-chose, je me sentais de trop, pas à ma place, même si ce n'était pas vrai, car Salem et Kami ne m'oubliaient pas. Seulement, ils étaient liés depuis des milliers d'années. Puis, Salem devint encore plus grave.

— C'est moi qui ai déposé la rose noire dans le mausolée, tu le sais. Par conséquent, je pourrais activer le Serment, là, maintenant. Kami secoua la tête.

— Je ne suis pas certain de te suivre.

— Celui qui t'offrirait la rose dont tu rêvais pourrait te commander. N'était-ce pas la substance de ce sortilège ?

Salem avait raison, c’était un rituel magique stupide que Kami avait effectué des années plus tôt. Un serment mystique, inviolable.

— Oui, c'est vrai. Mais tu possédais mon âme bien avant tout ça. Sans faire appel à cet enchantement.

— Alors, accorde-moi une faveur Kami.

— Laquelle ?

Salem posa sa main sur la cicatrice de notre ami. Il laissa ses doigts caresser le visage marqué puis regarda au loin.

Accompagne-moi là où je trouverai la paix et la sérénité. Je veux en finir. S'il te plaît, aide-moi.

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