Corre et Nazirine

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 NAZIRINE : … mais étant donné que l’immeuble possède trois sorties annexes, en plus de l’entrée principale rue Tintanade, nous avons malheureusement été obligés d’obtenir le soutien des hommes du préfet Grandberger. Et je pense que tu sais à quel point cela me dérange de travailler avec lui, en particulier de le savoir au courant de l’opération. Malheureusement son unité et son accord nous sont primordiaux, c’est sa juridiction, aussi mal gérée soit-elle. Qu’importe. Il faut prendre la chose du bon côté, il nous a promis un blindé antiémeute. L’ordre sera de le poster à la sortie annexe numéro deux, pour bloquer le passage ; ça libérera des hommes du sergent De Sante. C’est au petit « 2 » en jaune, sur la carte, si tu vois ? Comme ça, si jamais certaines de nos cibles parviennent à sortir vivantes de l’immeuble… C’est possible, il y en a quatre, il faut prévoir toutes les éventualités. Si un ou deux s’échappent, Grandberger les cueillera. Ce qui compliquera peut-être ton travail. Ce serait beaucoup plus facile que tout se fasse dans l’immeuble, je n’ai pas nécessairement envie de les faire disparaitre au commissariat, ce genre de chose est moins… compréhensible. Mieux vaut que tout se fasse dans l’immeuble, dans le feu de l’action. À froid, la chose devient insensée. Ça fait trop souffrir les hommes… Non, mieux vaux dans l’immeuble. Maintenant, dès que l’entrée principale sera forcée, les hommes de De Sante vont procéd…

 CORRE : Je peux t’arrêter là ?

 NAZIRINE : Pourquoi ? Ah, oui, je ne t’ai pas dit pour les deux autres sorties annexes. Il y aura une brigade de la…

 CORRE : Non, non, c’est pas ça, c’est très intéressant ce que tu me dis. Absolument passionnant, de savoir comment vous allez faire ce que vous allez faire. Oui, c’est… C’est très passionnant, je t’écoute avec beaucoup d’attention, évidemment, bien sûr. Mais… enfin, c’est-à-dire que moi je m’en fous.

 NAZIRINE : Pardon ?

 CORRE : Enfin, non, ce n’est pas que je m’en fous, pardon, non non. C’est que… Ce qui m’intéresse, ou plutôt ce qui me concerne, c’est comment je vais parler de ce que vous aurez fait.

 NAZIRINE : Et c’est pour que tu saches comment présenter l’affaire que je t’en donne les détails, pour que…

 CORRE : Oui, mais les détails, j’en veux pas, c’est pas important. Donne-moi juste les grands axes.

 NAZIRINE : Pas important ? Les détails ?

 CORRE : Non, c’est pas ce que je veux dire… C’est que j’ai pas besoin que toi tu me les donnes. Tu m’as dit que tout était dans le dossier, j’ai des assistants qui pourront le lire, qui sauront en faire quelque chose de très bien, j’en suis sûr ; j’ai confiance, j’ai parfaitement confiance. Et j’ai pas besoin d’entendre tout, que tu me dises tout, tout ce que vous allez faire, non… non, c’est pas nécessaire, vraiment pas. D’autant plus… ! D’autant plus qu’avoir trop de détails à cette étape de l’opération, alors que tout peut changer demain, c’est trop, ça m’emmêlerait. Tout peut arriver, tu l’as dit, chaque éventualité doit être considérée, et si tout mon travail d’amont porte en lui des détails qui seront devenus… stériles, ce serait idiot. Tout serait à refaire de fond en comble. Il me faut de la marge, et les grandes lignes, ça me donne ça, de la liberté.

C’est à cette étape de la discussion que j’ai commencé à sentir que les mots de Corre n’étaient pas fiables, que je devais, pour comprendre ce qu’il disait, percevoir ce qu’il cherchait désespérément à ne pas dévoiler. Ce n’est que plus tard que ce constat s’est matérialisé avec clarté en moi. Mais le sentiment s’est manifesté pour la première fois à ce moment précis.

 NAZIRINE : Comme tu veux. Je pensais qu’il y avait peut-être un problème.

 CORRE : Mais il n’y a pas de problème, il y a rien, il y a pas de souci, du tout.

 NAZIRINE : D’habitude tu me disais que tu voulais tout savoir.

 CORRE : Oui, mais les choses ont changé.

 NAZIRINE : Rien n’a changé.

 CORRE : … Ah bon… Villemarin, pour toi, c’était juste un autre lundi ? Ça t’est glissé sur la peau, c’est ça ?

Un grand silence suit dans l’enregistrement. Il y avait en vérité un bruit de stylo qui entrecoupait, mais la machine n’était pas assez puissante pour le capter. Le stylo était, je crois, dans la main de Corre, il le faisait cliqueter à intervalle irrégulier sans noter quoi que ce soit. Je n’ai pas vu, en vérité, qu’il ne notait rien, c’est là une déduction.

 NAZIRINE : Tu vas bien ?

 CORRE : Oui, je vais bien. Moi, oui.

 NAZIRINE : Tu ne veux pas les détails. Mais dans les grandes lignes…

 CORRE : Dans les grandes lignes, oui, je dois savoir, c’est… je dois savoir, c’est mon travail.

Il faudrait changer la machine d’enregistrement, celle-ci s’est révélée absolument incapable de relever la touche de désespoir absolu qui traversait la dernière phrase de Corre.

 CORRE : Si tu veux… Euh… Si… tiens, raconte-moi, en gros, ce que vous voulez que je dise sur la façon dont vous les avez trouvés. Par exemple.

 NAZIRINE : …très bien. Les hommes préféreraient qu’on dise que c’est grâce aux méthodes de la police, leur esprit d’équipe, la finesse de leur investigation, tout ce que tu pourras trouver qui mettra en lumière les compétences particulières du département. Que c’est grâce à ça que les membres restants de ce groupe ont pu être retrouvés, et pas à cause d’un informateur. Ils ne veulent pas que l’on puisse croire que ce serait dû au ministère du renseignement, ni à ses mouchards, ni à rien d’autre. Montrer que l’institution de la police est fiable dans ses capacités, qu’elle mène ses opérations avec fermeté. Qu’elle va au bout.

 CORRE : Parfait, pas d’informateur. C’est bien, il faut se distancer du village autant que possible.

 NAZIRINE : Le village ?

 CORRE : … l’affaire de Villemarin…

 NAZIRINE : Ce n’est pas un village, Corre, ça ne l’a jamais été, et ne le sera jamais.

 CORRE : …bien sûr.

 NAZIRINE : Distancer. C’est dommage, on avait eu l’idée que tu pourrais les peindre comme les derniers dissidents de l’affaire. Pour la clore justement.

 CORRE : Non, non, il faut… Il faut éviter toute mention, même s’ils sont liés, surtout s’ils sont liés, et ils le doivent être, surement. Il faut, il faut oublier, faire oublier, sinon…

 NAZIRINE : Tu t’inquiètes trop. La population est déjà passée à autre chose. Tu me parlais d’un autre lundi, mais c’est ce que tu as réussi à faire. Pour le pays, c’était un jour comme un autre.

 CORRE : Pour moi, Nazirine, pour moi, ce n’en était pas un. Oublie cette idée. Ensuite… Que… qu’est-ce qui justifie leur… ce que vous allez faire ?

 NAZIRINE : Résistance armée. Ils auront tiré les premiers.

 CORRE : Ils auront des armes, je note. Est-ce que tu pourrais demander si certains policiers voudraient bien se porter volontaire pour être blessés ?

 NAZIRINE : Il y en a trois qui se sont déjà portés volontaires, à mes ordres. J’ai pensé que ça t’aiderait.

 CORRE : Très aimable.

 NAZIRINE : Pour les armes, en plus des quelques-unes qu’ils auront, on fera en sorte d’en trouver d’autres.

 CORRE : Quelques-unes ? Ils n’en ont pas beaucoup ?

 NAZIRINE : Peut-être une. Celle qu’ils ont utilisé rue Bassandre, et c’est tout.

 CORRE : Ah, ils ont une pétarade. Et vous, vous avez amené un tank.

 NAZIRINE : Oui.

 CORRE : Le blindé. Dans l’image. Ça me gêne. Il y en avait cinq dans le villag… à Villemarin.

 NAZIRINE : On en a besoin. La sortie annexe numéro 2 va être bloquée avec.

 CORRE : Nazirine, ils ont un pauvre pistolet, qu’est-ce que tu racontes ?

 NAZIRINE : Nos forces sont mesurées selon les prérogatives de l’opération, la force en opposition n’est qu’un critère d’une considération plus lar…

 CORRE : Arrête.

 NAZIRINE : Je parle. Je parle et tu me coupes. Je disais…

 CORRE : Arrête. Arrête de t’expliquer. Vous utilisez ce que vous avez, tout ce que vous avez, c’est comme ça, il n’y a pas de petit moyen avec toi, je le sais. Mais tu disais que tu as pensé à moi, pense à moi maintenant, avec ça. Je vais faire quoi ? Avec un tank. Dans les rues de la capitale.

 NAZIRINE : Tu feras la même chose qu’avec Villemarin.

 CORRE : Je ferais la même cho… Oui, évidemment, je ferais… Tu sais ce que ça m’a demandé ? Enfin… tout les… J’ai dû effacer… trop de corps, trop de gens… Et tu me demandes de refaire ? De refaire ça ?

 NAZIRINE : Tu n’as eu aucune diffi…

 CORRE : Aucune difficulté ! Mais tu sais au moins ce que j’ai dû faire, le cataclysme que vous avez laissé derrière vous ! que j’ai dû laver, que j’ai dû habiller, dresser, arranger comme le cadavre d’un… d’un… J’ai rendu humain votre travail ! J’ai rendu humain ce que même un animal n’aurait pas fait. Vous m’avez laissé un truc de chien. Un putain de cadavre de chien que vous avez violé ! C’était une chose d’animal, Nazirine ! Tu as intérêt à planter des mortiers dans leurs locaux, sans ça je peux rien faire, je peux rien faire d’un tank sans un danger qui mérite qu’on ramène des mastodontes comme ça ! Vous avez rien retenu du massacre, rien ?!

 NAZIRINE : Calme-toi.

 CORRE : Si je ne trouve pas au moins un bombardier dans leur place de parking, c’est non… c’est non ! Tu me trouves quelque chose, tu ne vas pas me laisser seul avec un tank. Un tank. Dans les rues de la capitale !

 NAZIRINE : Je t'ai dis, calme-toi. J’en parlerais à Grandberger. Il était très fier de pouvoir m'en fournir un, mais il nous renflouera d’une autre façon. Et arrête de t’inquiéter, tu trouveras des façons de justifier ça. Tu l’as déjà fait avant, ce n’est pas la première fois.

 CORRE : Mais fais que ça soit la dernière, pitié…

 NAZIRINE : Tu sais que ce n’est pas la dernière. Et c’est grâce à toi qu’on y survit si bien. Tout ton travail nous a préparés pour des moments comme ça. Toute la langue que l’on parle, en dehors d’ici, à la radio, à la télé, dans les journaux, on te la doit. Tu as réussi à créer une manière de communiquer qui nous légitime partout, et qui peut nous sauver de tout. Aie un peu de confiance dans ce que tu as fait. Tout s’articule en notre faveur, parce que tout s’articule à ta manière. Qu’est-ce que tu m’avais dit la dernière fois ? Nous déterminons la…

 CORRE : …nous déterminons la pesée des mots, ici même dans cette pièce, et dehors ils prennent tout leur poids. Ici, notre langue est déchargée…

 NAZIRINE : Et ainsi, nous deux, nous pouvons parler clairement ensemble, sobrement. On se connait depuis assez longtemps, toi et moi, pour que le spectacle n’entrave pas notre communication. C’est notre force. Et la vérité…

 CORRE : …dehors, la vérité a un poids qui n’est plus tenable.

 NAZIRINE : Et c’est ta création ! Ton œuvre. Sois fier. Tu peux nous sortir de ça. Je vais faire mon possible pour le blindé. Si tu penses qu’il nous desservira trop, je suis prêt à t’écouter.

 CORRE : C’est drôle. Comment tu te précipites toujours pour me féliciter sur mon invention… Elle te permet de tout faire. Et ça t’aimes bien…

 NAZIRINE : Ne commence pas.

 CORRE : Il y avait des noms qui ne reviendront jamais. J’ai vu un même nom de famille revenir sept fois, dans la même liste. Il n’arrêtait pas de revenir.

 NAZIRINE : Tu l’as fait trop de fois pour t’en plaindre maintenant.

 CORRE : Nazirine… C’est quoi un nom, pour toi ?

 NAZIRINE : Rien. Ça s’oublie vite, quand il n’y a plus d’humains derrière. Maintenant, reprends-toi.

 CORRE : … passe-moi le dossier, il faut que je lise les… les fiches personnelles des quatre victimes…

 NAZIRINE : Prends ton temps.

Cette lecture dura de longues minutes. Corre m’est apparu particulièrement attentionné à ce moment. Pendant cette pause, j’ai essayé de faire légèrement bouger le tableau qui bloquait ma vue en introduisant dans le trou la cartouche d’un stylo. De là, je voulais l’utiliser comme on utiliserait un levier. Simplement, je crois que le mouvement n’est pas passé inaperçu. Nazirine, à un moment donné, s’est levé sans explication de son fauteuil et son ombre s’est soudainement jeté sur moi. Je ne sais si je dois ma survie à Corre, ou si Nazirine n’avait en vérité pas vu le mouvement du tableau, quoiqu’il en soit, il fut distrait par son collègue. Celui-ci prononça très bas, au point que la machine ne l’entendit pas, la phrase suivante : « Non, non, pas ce nom, pas encore ! »

 NAZIRINE : Qu’est-ce qu’il y a ?

 CORRE : J’ai… J’ai cru voir…

 NAZIRINE : Qui ? Tu reconnais quelqu’un dans le groupe ?

 CORRE : Non, non. Absolument pas, non, évidemment que non. Je ne pourrais pas être associé…

J’ai entendu des feuilles être rapidement tournées. L’ombre de Nazirine s’est alors déplacée sur celle de Corre, se mêlant à elle de telle manière qu’il devait à ce moment-là le dominer de toute sa hauteur. À nouveau, j’ai entendu quelqu’un tourner les feuilles, puis le bruit s’est arrêté.

 NAZIRINE : Margaux Losier. Tu la connais ?

 CORRE : Non, évidemment que non. J’ai été surpris, un peu, c’est tout.

 NAZIRINE : Par quoi ?

 CORRE : Par le fait que j’ai encore de quoi ressentir de l’empathie pour des gens qui sont sur le point de mourir. C’est entré sans bruit, je n’ai pas fait attention. Ça te dérange ?

C’est à ce moment que s’est matérialisée en moi l’idée que les mots de Corre n’étaient pas fiables. Même la vérité était chargée de tant de sens contraires et annexes qu’en l’écoutant, on ne peut que croire qu’il ment. Tout est brouillé dans sa langue, elle semble porter tant de poids que le raisonnement en est généralement impossible à élucider.

 NAZIRINE : …d’accord. Prends ton temps comme j’ai dit.

Nazirine est allé se rassoir à ce moment-là, à en juger par les mouvements d’ombres que j’ai vus. Celle de Corre était à nouveau seule.

 NAZIRINE : Et non, ça ne me dérange pas. Ça me conforte. Tu traiteras humainement cette affaire. C’est nécessaire pour faire passer ça.

 CORRE : Humainement… Nazirine, est-ce que je peux te demander un service ?

 NAZIRINE : Je t’écoute.

 CORRE : Pourrais-tu, de ton côté, faire de même ? Pourrais-tu…

 NAZIRINE : C’est-à-dire ?

 CORRE : Je veux… enfin. Humainement.

 NAZIRINE : Autant que possible. Là où je pourrais, je ferais en sorte que ce soit humain. Je demanderais au sergent De Sante d’enjoindre à ses hommes de ne pas faire d’excès.

 CORRE : Non, non, c’est, ce n’est pas ça que je veux dire. Humainement, c’est… plus que ça. Est-ce que tu pourrais ne pas les… enfin. Humainement.

 NAZIRINE : …continue.

 CORRE : Si un…

En réécoutant l’enregistrement, je me rends compte à quel point il est compliqué, en ne percevant que ce que l’appareil à capturé, de mesurer correctement l’extrême difficulté que semblait éprouver Corre pour poser limpidement sa requête. Le silence, que je couvre actuellement de ma voix, démontre le caractère ineffable de ce que cherchaient à dire le ministre des Discours. Il serait intéressant de découvrir pourquoi il a ressenti la chose de cette manière.

 CORRE : Si un ami… enfin, si un ami te suppli… s’ils pouvaient être… c’est pas nécessaire que ça aille aussi loin.

 NAZIRINE : Si un ami… Continue, Corre.

 CORRE : Ce n’est pas la bonne… lorsque je fais cette demande, et c’est une demande, c’est une demande, j’ai pas d’ordre à donner, j’ai pas l’autorité de t’ordonner de les laisser… mais vraiment tout ça n’a rien à voir avec elle, c’est pas une chose qui m’intéresse de m’immiscer dans ce qui me regarde pas, qui me concerne pas, pas vraiment, parce que ça me concerne pas cette affaire, je la connais pas, c’est vraiment en dehors de mes compétences, de mon département, c’est au nom de l’amitié tout ça, cette demande, qui est même pas une demande, un conseil, plus un conseil entre nous, une proposition que je te fais dans l’intimité de ton bureau, je la fais entre nous au final, tout ce que je te donne c’est un conseil d’ami…

 NAZIRINE : Qu’est-ce que tu me demandes ?

 CORRE : … de les sauver.

 NAZIRINE : Non.

Dans le silence qui a suivi, les ombres n’ont pas bougé d’un pouce. Si quelque chose s’est joué ici, il s’est joué par les yeux.

 NAZIRINE : Non, Corre, je ne vais pas faire ça. Je te remercie pour tes conseils. Tu as d’autres questions ?

 CORRE : Rien. Pardon. Je vais… rentrer chez moi. J’ai toute cette affaire à préparer. Je suis désolé, je sais pas ce que je disais.

 NAZIRINE : Prends le dossier. Lis-le. Et rentre bien, Corre.

J’ai vu l’ombre de Corre se lever et prendre, sur la table, les dossiers tous ensemble, en un grand tas noir qui semblait engraisser son ombre. Il s’est dirigé vers la porte, l’a ouverte, et au moment de la passer, il s’est figé, soudainement. Je ne peux que spéculer sur ce qu’il devait penser à ce moment, sur ce qui a dû le traverser de part en part avec une telle force que ce fut toute son inertie qui en éclata. Qu’est-ce qu’il l’a poussé à prendre la décision de rebrousser chemin ? En réécoutant, j’en suis venu à conclure que Corre s’est probablement rendu compte à ce moment-là qu’il en avait trop dit. Il avait révélé quelque chose, et l’autre le savait. En vérité, quiconque l’aurait entendu en savait déjà trop sur lui. Il n’y a que des serpents entre ces murs, et ils le mangeraient maintenant. Le secret était à découvert ; qui sait ce que Nazirine en ferait ? Je ne crois sincèrement pas que ce furent les sentiments qui taraudèrent Corre, en tout cas pas la pitié. La pitié aurait été certaine dans mon cas, mais moi j’aurais pensé aux victimes. Ces deux-là baignent dans un environnement bien trop dangereux pour se laisser prendre par les sentiments. S’il partait maintenant, il laissait à Nazirine un avantage contre lui, sans rien en retirer de son côté. Alors il s’est retourné.

 CORRE : Nazirine.

Ils se sont regardés, je pense, les deux ombres se sont fait face à travers la salle.

 CORRE : C’est dans notre intérêt à tous qu’ils vivent.

Ici le silence, à nouveau. Puis Nazirine s’est levé, s’est dirigé vers Corre, et l’a dépassé. Il a ouvert la porte et, avant de la passer et de la refermer derrière lui, a intimé ceci :

 NAZIRINE : Assieds-toi. Je reviens bientôt.

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