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Hypnotisée par les bandes blanches tout au long du trajet depuis la ville, Kaylee n’avait pas prêté la moindre attention au chemin parcouru. Elle quitta l’habitacle pour atterrir dans une flaque de boue.

— Autant pour mes baskets, maugréa la jeune fille.

Jacob avait garé la voiture sur un sentier à peine caché par d’épaisses souches couchées en biais. Dans cette partie des bois, la terre prenait une teinte ocre, entrecoupée ça et là de parcelles herbeuses. Seul le chant des oiseaux brisait le silence presque palpable.

La portière claqua derrière Mirco. Le garçon regardait autour de lui, tout aussi déboussolé que son amie. Kaylee eut à peine le temps de voir un air inquiet se peindre sur son visage que déjà le Commissaire les poussait en avant.

— Ne vous éloignez pas, les avertit-il. C’est important.

La piste se réduisit à néant au fur et à mesure de leur progression. Partout, arbres et arbustes dressaient leurs branches vers le ciel limpide. Le soleil, encore haut, miroitait entre les rameaux et mouchetait le sol de taches colorées. Une légère brise apportait une touche de fraîcheur à cette journée idyllique. Sans la présence de ses compagnons silencieux, Kaylee aurait pu se croire en balade. Le rythme soutenu que leur imposait Jacob brisait cependant cette illusion.

L’homme paraissait connaître la moindre pierre du chemin. Il progressait vite, tout le contraire des adolescents dont les pieds ne cessaient de se prendre dans des racines et autres obstacles invisibles. Un sentiment de malaise envahissait Kaylee plus ils s’enfonçaient dans cet entrelacs de broussailles. Sans idée exacte de leur éventuelle destination, déroutée par ces troncs droits et identiques, elle ne pouvait se départir de l’idée qu’ils commettaient une terrible erreur. Suivre ainsi un complet inconnu à travers les frontières ne lui aurait même pas traversé l’esprit avant.

Les arbres s’éclaircirent soudain, remplacés par une étendue d’un vert étincelant. Kaylee plissa les paupières et s’avança avec prudence. Plus épais que sous les frondaisons, les brins d’herbe lui chatouillaient les chevilles dans une invitation à jouer.

Un regard vers Mirco lui confirma que le garçon partageait son excitation. Sans se concerter davantage, ils s’élancèrent dans la clairière avec un éclat de rire. Il courait vite, et c’est essoufflée qu’elle le rejoignit, une cinquantaine de mètres plus loin, au pied d’une étrange construction en béton.

— Mate-moi ça ! C’est quoi ? Un bunker ?

L’adolescent fixait la partie visible de la bâtisse avec consternation. Plus haut qu’eux, le mur gris mat longeait le bord de la clairière sur quelques pas. La pierre laissait ensuite place à la terre et aux buissons, et donnait l’impression que la porte métallique cachait en réalité toute une partie souterraine.

— Un ancien laboratoire, leur apprit le Commissaire qui les avait rejoints. Et votre nouveau chez vous.

— C’est une blague ! grogna Mirco. Je parie qu’il n’y a même pas l’eau courante dans votre baraque…

— Bien deviné ! J’ai à manger par contre.

Le gargouillement impatient de son estomac rappela à Kaylee que l’après-midi était déjà bien avancée. Méfiante, elle s’engagea dans l’escalier sombre.

Une odeur moite de renfermé l’assaillit sitôt le seuil franchi. Comme elle l’avait supposé, le sous-sol abritait une infrastructure indécelable à partir de la surface. Dans la lumière crépitante des néons, la pièce principale se dévoila à son regard stupéfait. Seules quelques traces dans l’épaisse couche de poussière suggéraient une visite récente. Le reste du mobilier se confondait avec le gris des murs tachetés. Kaylee passa la main sur l’écran encastré dans la cloison, avec pour effet d’afficher une série de graphiques incompréhensibles à ses yeux. L’exclamation de Mirco détourna son attention de ces courbes mouvantes.

— Vous ne faites jamais le ménage ou quoi ?

— J’ai deux apprentis pour ça maintenant, ironisa le Commissaire. Allez, les jeunes ! Videz vos poches.

— Que… quoi ? répliqua Kaylee.

— Vous m’avez bien entendu. Plus vite que ça ! On n’a pas toute la journée.

Le garçon et elle s’exécutèrent avec une grimace perplexe.

— Eh ! Je ne suis pas d’accord avec ça ! protesta son ami à la vue des portefeuilles dépouillés de leur contenu.

— Vous n’en aurez aucune utilité dans les jours qui viennent. Et si ça peut m’éviter de vous voir traîner inutilement dans le village, c’est toujours ça de pris. Je n’ai pas besoin de vous rappeler l’importance de la mission, n’est-ce pas ?

La jeune fille récupéra son téléphone et s’assit à table, résignée. Toute cette histoire commençait à sentir mauvais.

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