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— Assieds-toi, lui dit calmement Jacob. Tu attires l’attention.

Elle reprit docilement place en face de lui. Mirco, toujours dans l’allée, finit par dire exactement ce qu’elle avait à l’esprit.

— Comment ?

Le Commissaire leva les yeux au plafond, exaspéré.

— T’arrive-t-il de poser une question précise ? Utilise les mots adéquats pour t’exprimer, cela nous fera gagner du temps à tous.

— Je n’ai pas l’intention d’apprendre quoi que ce soit ! protesta-t-il. Vous dites qu’ils peuvent nous retrouver. Comment ?

— Veux-tu vraiment le savoir ?

— Puisqu’il vous le demande, marmonna Kaylee.

— Ne te mêle pas de ça, s’il te plaît, la sermonna l’homme. J’ai une autre question pour vous : qui ici possède un compte Facebook ?

— J’en ai créé un, répondit Mirco. Mais quel est le rapport ?

— Moi aussi, osa Kaylee. Depuis l’année dernière.

Le train redémarra. La jeune fille se dit confusément qu’ils venaient de manquer leur seule chance de se sortir de ce pétrin. Jacob continua.

— Avec votre photo en profil ou en couverture ?

— Évidemment ! Comment feraient mes amis pour me reconnaître sinon ?

Elle se rendit soudain compte de ce que cela pouvait impliquer.

— Mais je n’ai pas utilisé mon vrai nom ! crut-elle bon d’enchérir.

— Moi non plus ! se réjouit Mirco. Et je ne comprends toujours pas en quoi…

Jacob garda le silence.

— Ça ne suffit pas, n’est-ce pas ? souffla-t-elle.

— Pour rester anonyme non, confirma leur interlocuteur. Ajoutez simplement un ou plusieurs proches en ami et…

Kaylee vit Mirco détourner le regard, troublé. Il se rassit à ses côtés. Elle songea que ses parents ne se trouvaient peut-être pas dans ses connaissances Facebook, mais ses cousins et elle partageaient le même nom de famille.

— Votre génération a grandi avec les nouvelles technologies, internet et les réseaux sociaux, les smartphones… Habitués, vous n’en remarquez plus le danger pour la vie privée. Mais tout ce que vous postez en ligne, des photos personnelles aux statuts d’humeur, absolument tout reste stocké dans un serveur quelque part. Et cela pour une très longue période, dix ans au minimum !

— Tant qu’on n’a rien à cacher… tenta Mirco.

— Contrôler ses informations n’est plus qu’une illusion, affirma sérieusement Jacob. Tu penses n’avoir rien à te reprocher aujourd’hui, mais qu’en sera-t-il dans quelques années ? Lorsque tu auras fini tes études, obtenu ton diplôme, crois-tu que ta dernière vidéo à danser sur les tables t’aidera à décrocher un emploi ?

— Mais d’où… rougit l’adolescent. Je n’ai posté ça que pour mes amis !

Kaylee pouffa.

— Alors comme ça tu danses sur le bar !

— N’en rajoute pas toi ! grommela-t-il.

— Ton dernier commentaire sur l’immigration ne me paraît pas plus reluisant.

Ce fut au tour de la jeune fille de protester.

— Ce n’était qu’un partage d’article !

— Rédigé par un extrémiste convaincu, asséna Jacob. Il n’en faut pas plus à certains pour croire que tu approuves également ses opinions. Encore une fois, peut-être que cela ne porte pas à conséquence aujourd’hui, que tu as même gagné quelques likes. Mais seras-tu encore d’accord avec cela plus tard ?

Elle baissa les yeux sur son smartphone.

— Je ne le pensais pas réellement en plus…

— Cela n’a aucune importance à présent. Ce que je veux vous faire comprendre, c’est que si j’ai pu dénicher une masse d’informations en utilisant un simple moteur de recherche, vos poursuivants auront aussi cette facilité.

— Comment réagir alors ? se désola Kaylee.

— Mais qui sont-ils ? ajouta Mirco. S’ils en savent autant sur nous, comment ça se fait qu’on n’ait jamais entendu parler de ces gens ?

Le Commissaire s’appuya sur la tablette laquée entre eux.

— À qui dois-je répondre en premier ? plaisanta-t-il. Il se trouve que le monde des sorciers ne diffère pas tant du vôtre. À quelques détails près, n’importe qui possédant le don peut vivre une vie tout à fait normale s’il prend le soin de rester discret sur ses pratiques. Car bien que la plupart des personnes s’effraient lorsqu’elles entendent parler de magie, ce n’est en fait qu’une autre manière d’utiliser son cerveau. En fin de compte, peu voient le don pour ce qu’il est réellement : un trait génétique. Certains ont les yeux bleus, les cheveux blonds. D’autres sont grands et forts, ou le contraire. Et puis, il y a ceux qui ont hérité d’une capacité accrue à manipuler leur environnement. Vous me suivez toujours ?

Les deux adolescents hochèrent la tête en silence, captivés.

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