18/52 - Tour d'Acier

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Seon est en train de disparaître.


Il est assis, au centre d'une estrade ronde, dans une pièce ronde, dans une tour ronde. Une tour en acier. Une tour impénétrable. Sa tour à lui. Gardée, protégée. Par lui seul. Tout seul. Le dernier.


Les lieux sont plongés dans l'obscurité. Seul un rayon de lune perce à travers le puits de lumière tout en haut du dôme. Son éclat déjà peu brillant est régulièrement atténué par un nuage qui passe.


Seon s'est assis là où le rayon rejoint le sol, comme il l'a toujours fait pour puiser calme et force avant ses combats. S'aligner, respirer, se lier à la terre et au ciel, trouver l'équilibre en lui et ne jamais perdre contrôle.


Sauf qu'aujourd'hui, Seon disparaît. Il le sent. Il sent que la Lune le rappelle. Il sent que la Terre l'aspire, que le Soleil, à l'autre bout du monde, est prêt à le réduire en cendres.

Seon sourit. Un apaisement qu'il n'aurait pu soupçonner le gagne à chaque atome qui se détache de lui. Tout autour, en haut, en bas et au-delà du monde, ils s'éparpillent.

Il était temps. Seon a trop tué et trop vécu. Il est heureux de disparaître, sans avoir eu à prier pour ça.


Calmement, il baisse les yeux vers ses mains fines mais calleuses, souples mais fortes. Ses mains couvertes de sang noir. Il les voit s'effacer, morceau par morceau comme un papier qui brûle. Déjà, elles ne pourraient plus tenir sa lame. Elles ne pourraient plus se serrer autour des gorges bestiales qu'il a si souvent arrachées.


Peu à peu sa perception elle-même devient douteuse, puis son analyse, ses souvenirs. À quoi ressemblaient les monstres, déjà ? Étaient-ils vraiment des monstres ? Et puis, pourquoi les tuait-il ? Pour qui ? Comment ? Est-ce qu'il les tuait vraiment ? …


Seon...


Seon disparaît. Il ne voit plus. Il n'entend plus. Il ne sait plus. Il n'est quasiment plus palpable.


Seon disparaît.


Sur l'estrade circulaire, la lumière de la lune est devenue puissante. Plus aucun nuage ne passe devant elle. Elle éclaire, avec une certaine insolence, un plancher de bois vide où demeure une lame rougeoyante, majestueuse, superbe... immaculée.


Seon était le dernier. Le dernier être au monde capable de la tenir. Si les dieux veulent la guerre à nouveau, s'ils veulent des massacres, des meurtres et des vengeances... il faudra qu'ils renvoient sur Terre des esprits mathématiques, et des mains habiles.

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