Mali

Une minute de lecture

L’homme ne bougeait pas. Il restait là, dans son imperméable trop grand, semblant flotter sur le perron comme le fantôme qu’il était.

« J’imagine que ça ne doit pas être simple pour toi, dit-il finalement. Mais je suis là, maintenant. »

Et moi je n’arrivais pas à penser. Mes synapses s’étaient momentanément déconnectées. Mais quand elles se réveillèrent à nouveau, je crû bien défaillir. En quelques millièmes de seconde, je revivais son décès, la souffrance, la chute, puis le deuil, les sept étapes et enfin le renouveau. Je pensais à Max, je pensais à ma fille et la prise de conscience de l’énormité de ma trahison me fit chanceler. Max, mon épouse, ma femme, la nouvelle mère de Kashi. Il eut un geste pour me retenir et je reculais. Les mots sortaient tous en même temps de mes tripes et créaient un embouteillage dans ma gorge. Je restais donc muette et abrutie. Le soleil me paraissait soudainement beaucoup trop lumineux et je reculais encore dans l’ombre de la salle à manger. Il avança, franchit le seuil de la porte. Je me serais presque attendue à ce qu’il ne puisse pas, comme les vampires. C’était si irréel. Je voulais rire et pleurer. Lui faire l’amour sur le tapis persan made in China et le tuer avec le couteau à viande Ikea.

A la place, j’ai dit :

« Un café ? »

Et j’ai disparu dans la cuisine. J’ai laissé mes mains s’afférer, mes réflexes d’hôtesse prendre le dessus. Le carrelage blanc des plans de travail me brûlait les yeux et glaçait mes mains. Le café chaud coula de la machine dans un bruit de moteur. Je le laissais déborder en songeant que Max rentrerait bientôt. Ce fut l’homme qui éteignit la machine et je sursautais. L’odeur de café nous enveloppa comme un souvenir de matin douillet. Il prit la tasse et s’installa dans le salon, sur le canapé de cuir dans lequel Max adorait faire sa sieste. Je me suis assise face à lui, la table de verre et le café comme barrières. J’avais trop de choses à dire, alors j’ai soufflé :

« T’aurais dû rester mort. »

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